Echéances électorales : La résurgence du spectre de la présidentielle 2018
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Le Cameroun va de toute évidence vers l’organisation des élections législatives et locales, l’année prochaine. Dans le présent contexte sociopolitique et sécuritaire biscornu, organiser ces scrutins ne reviendrait-il pas à ouvrir des boîtes de pandores d’où jailliraient des esprits maléfiques ivres de sang et d’instabilités ?

Les contestions postélectorales nées du scrutin présidentiel de l’année dernière devraient mettre toute la Nation en effervescence dans l’optique d’organiser des consultations apaisées. Si le Grand dialogue est passé outre de cette préoccupation, il va sans dire que l’espoir est encore entière et totale dans la mesure où la session parlementaire qui s’ouvre dans quelques jours au palais des Verres de Ngoa Ekelé, pourrait en plus du vote du budget de l’Etat qui lui est essentiel, revisiter certaines des dispositions de notre ordonnancement juridique pour, à défaut de taire les contestations postélectorales, les minorer à tout au moins. Ce n’est pas jeter un pavé dans la marre en remettant au goût du jour les multiples demandes formulées dans ce sens par la société civile et les partis de l’opposition.

On a de ce fait entendu parler du vote électronique ; de l’instauration du bulletin unique ; des élections à deux tours ; de la réforme d’Elecam, en particulier de sa composition, pour y inclure les représentants des partis politiques ; la révision de la Constitution pour permettre le vote à 18 ans, de l’interdiction de la distribution des cartes d’électeur par Elecam le jour du vote, de l’exigence que les Pv des résultats remis aux représentants des candidats et des partis politiques dans les bureaux de vote fassent foi au même titre que l’exemplaire remis à Elecam ; de l’instauration du vote obligatoire au Cameroun. S’il est certain que toutes ces sollicitations sont loin de connaître une satisfaction au cours des prochaines échéances électorales, il n’en demeure pas moins vrai qu’une entame d’incorporation de ces mesures dans notre appareillage électoral pourrait contribuer grandement à décrisper la tension, la suspicion légitime et corrélativement céder la place à des élections apaisées et sereines. Présenter cette exigence législative comme une panacée suffisante est un véritable leurre, car les contingences sociopolitiques et sécuritaires brillent de mille feux contre la prétention d’Elecam à organiser matériellement les élections dans les deux régions. Il y a aussi en amont le lancinant problème de la nouvelle carte de la représentativité au niveau de l’Assemblée nationale.

Les douleurs du Noso

C’est clair que depuis le déclenchement de cette crise en 2016, Elecam a déjà organisé dans les deux régions deux élections en 2018, les sénatoriales du 25 mars et la présidentielle du 7 octobre. L’organisation des premières, même si elles étaient indirectes avaient donné tout le fil à retordre à l’instance chargée des élections. On se souvient que les forces de défense et de sécurité avaient été spécialement mobilisées pour sécuriser son déroulement. Le pouvoir avait pris soin de loger avant le scrutin, les conseillers municipaux à l’hôtellerie. Cela n’avait pas été suffisant pour obtenir la quiétude car à Lebialem par exemple comme dans d’autres localités de la zone, les balles crépitaient avec une telle intensité autour des bureaux de vote que certains conseillers municipaux avaient été héliportés.

A l’élection présidentielle, d’autres défis plus difficiles sont venus s’amasser devant la porte d’Elecam. L’assiette électorale était désormais élargie et tous les citoyens lambda inscrits sur les listes électorales appelés à voter. Si aux sénatoriales il y avait sur toute l’étendue du territoire 10.000 votants inscrits, à la présidentielle on cumulait à 6 667 754 d’inscrits. Autant dire que le risque sécuritaire, par rapport aux sénatoriales, était en principe multiplié par 666, 775 sur l’ensemble du Triangle national. Ce qui rend les élections législatives, municipales et régionales si différentes des deux premières dans le Noso est que tout se joue au niveau local. On se souvient qu’au cours du scrutin présidentiel ici, Elecam avait dit recourir à la création des centres de vote, pour mieux assurer la sécurité du scrutin. Est-ce qu’une telle mesure est possible avec les législatives et municipales ? Comment est-ce qu’Elecam va procéder pour sortir les populations de la brousse et les conduire dans les bureaux de vote ? Il y a des villages dans le Noso qui sont devenus des cités fantômes. Comment va-t-on procéder ? Qui va voter ? Et qui sera élu ? Peut-être qu’Elecam reconduira probablement les anciens conseils municipaux dans de tels cas. N’est-ce donc pas le moment de communiquer là-dessus pour taire les contestations postélectorales ?

Souci de transparence et de clarté

On attend aussi qu’Elecam fasse une lumière sur les listes exhaustives dans ces deux régions. Le piège en arrière-plan, est qu’une incapacité de la maison que dirige Enow Abram Egbe à organiser le vote viendrait donner plus d’onction à une consécration de fait de la partition du pays. Il est donc de bon ton que la tour au bord du lac central de Yaoundé, par souci de transparence et de clarté, donne plus de visibilité au vote dans le Noso. Il est vrai qu’ici on ne regardera pas le taux de participation. L’essentiel sera probablement l’organisation. La nouvelle taille des circonscriptions est un autre pan dont le soulèvement pourra laisser sortir des démons particulièrement remuants et maléfiques. Ainsi, parce qu’on dénombre près de 500.000 déplacés internes dans la partie francophone du pays, cela induit que les villes frontalières des deux régions en crise, ont connu un accroissement exponentiel de sa population. Ceci est tant et si bien établi au point où on se demande si dans certaines métropoles à l’exemple de Douala, Bafoussam ou Yaoundé, il ne faille pas créer d’autres arrondissements.

Il est clair que du côté de Bonabéri, Banga et sa périphérie, tout comme à EtougEbe à Yaoundé, ou Bamengoum à Bafoussam, Dschang ou Mbouda, la population est passée du simple au double dans certains quartiers. Cette réalité joue effectivement en défaveur des deux régions si on en juge par le nombre de sièges affectés à l’Assemblée nationale au prorata du député par nombre de citoyens. Il va sans dire que les pouvoirs publics ne vont pas certainement faire cas de cette situation, car le retour à la normalité des choses fera en sorte que les populations rentrent chez elles. C’est là une esquisse des défis non exhaustifs auxquels Enow Abram Egbe et Erik Essousse devront s’atteler pour que les prochains votes, par leurs spécificités locales, ne débouchent pas sur un océan de contestations, surtout au moment où, au nom de la coloration politique, certaines circonscriptions se déclarent hermétiquement fermées à l’opposition au propre comme au figuré. C’est encore à Elecam en dernier ressort, d’user de toute sa diplomatie pour qu’un tel état des choses soit au plus vite relayé aux calendes grecques.

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