LE PREMIER MINISTRE JOSEPH DION NGUTE POSE LA PREMIERE D’UNE USINE DE BAUXITE
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Quand le Cameroun relance son rêve industriel en pleine campagne présidentielle

Minim-Martap, 24 septembre 2025.

À quelques semaines  de l’élection présidentielle, l’industrialisation du Cameroun refait surface dans les discours officiels. Ce lundi, au nom du président Paul Biya, le Premier ministre Joseph Dion Ngute a procédé à la pose de la première pierre du projet d’exploitation et de transformation de la bauxite de Minim-Martap, dans la région de l’Adamaoua. Un projet porté par la société CAMALCO S.A., présenté comme stratégique pour l’économie nationale.

Un projet ambitieux aux promesses colossales

Avec plus d’un milliard de tonnes de réserves de bauxite estimées à près de 9 600 milliards de FCFA, le site de Minim-Martap est décrit comme l’un des plus importants gisements d’Afrique centrale. Le projet prévoit une extraction de 10 millions de tonnes par an pendant 20 ans, assortie de la construction d’une usine de transformation de bauxite en alumine, dont le coût est évalué à 1 200 milliards de FCFA. Selon le gouvernement, cette initiative devrait générer 5 000 emplois directs et 20 000 emplois indirects, en plus de doter la localité de nouvelles infrastructures sociales : un hôpital, une école et un marché moderne. 30 % des revenus annuels issus de l’exploitation seraient destinés aux communautés locales, un engagement destiné à rassurer sur les retombées régionales du projet.

L’industrialisation comme slogan électoral ?

La mise en scène de ce projet intervient dans un contexte hautement politique. Alors que le Cameroun s’apprête à vivre une nouvelle campagne électorale, cette annonce résonne comme le point de lancement symbolique d’une nouvelle phase de « grandes ambitions », concept récurrent dans les discours présidentiels depuis deux décennies. Pour de nombreux observateurs, cette multiplication des annonces en période électorale n’est pas anodine. « C’est toujours au moment des campagnes qu’on redécouvre l’urgence d’industrialiser le pays », commente un économiste à Yaoundé. D’autres ironisent sur ce qu’ils appellent la « politique des pierres » : des cérémonies de lancement en grande pompe, rarement suivies d’inaugurations concrètes.

Entre scepticisme populaire et soif de changement

Dans la rue comme sur les réseaux sociaux, l’accueil de cette annonce est mitigé. Si certains saluent une réelle volonté de valoriser les ressources naturelles locales, d’autres restent prudents, voire cyniques. « Une première pierre de plus, mais combien déjà posées sans suite ? », interroge un habitant de la région. D’autres rappellent les nombreux projets abandonnés en cours de route : voies ferrées inachevées, stades en arrêt de travaux, zones industrielles promises mais jamais livrées. Le scepticisme est accentué par l’absence de clarté sur des aspects clés ; le recrutement de la main-d’œuvre locale, les conditions de formation, l’accès à l’électricité, ou encore la route d’accès au site, qui reste impraticable selon plusieurs témoignages.

Une vision industrielle crédible ou simple habillage politique ?

Le gouvernement, lui, insiste sur le caractère structurant du projet. Le Premier ministre Joseph Dion Ngute a rappelé que cette usine de transformation représentait un tournant vers une chaîne de valeur locale plus compétitive et souveraine, à rebours de la simple exportation de matières premières. « C’est le début d’une nouvelle ère pour le Cameroun », a-t-il affirmé. Mais pour une jeunesse frappée par le chômage endémique, la précarité et l’exclusion, ces annonces ne suffisent plus. L’attente est immense, la frustration plus encore. « On ne mange pas les slogans », lance un diplômé au chômage, amer. « On attend toujours de voir les résultats sur le terrain, pas seulement des discours. »

 Industrialisation ou instrumentalisation ?

La relance industrielle annoncée à Minim-Martap pourrait, si elle est menée à terme, représenter une réelle avancée pour l’économie camerounaise et un levier de développement local. Mais dans un climat marqué par la méfiance, les promesses non tenues et la centralisation excessive, la population demande désormais des actes tangibles. Plus que jamais, l’industrialisation du Cameroun devra convaincre par sa réalisation et non plus par son annonce. Et à l’orée de l’élection présidentielle, la question demeure : s’agit-il d’une vision stratégique à long terme, ou d’un simple outil de campagne électorale pour redorer l’image d’un régime vieillissant ?

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