Note analytique: Le très regrettable et irresponsable retrait des Etats Unis de l’OMS
ÉTATS-UNIS :: POINT DE VUE

ÉTATS-UNIS :: Note analytique: Le très regrettable et irresponsable retrait des Etats Unis de l’OMS :: UNITED STATES

Après des menaces ouvertes teintées d’une arrogance loin des protocoles diplomatiques consacrés, le Président des Etats Unis, Donald Trump, vient de décider du retrait de son pays de l’Organisation Mondiale de la santé (OMS).

Trois paramètres au moins méritent d’être rappelés :

Le premier c’est que l’OMS fait partie d’une vingtaine d’institutions spécialisées dotées de l’autonomie financière et de la personnalité juridique, résultant des instruments institutionnels techniques, dont la mise en place fut décidée par les Puissances victorieuses de la seconde mondiale 1939 – 1945, en vue de doter la coopération entre les nations, de structures adéquates plus performantes.

Le deuxième paramètre, c’est que l’ONU n’existe que parce que les grandes puissances, signataires de plusieurs pactes, accords et traités après divers pourparlers, s’étaient portées garantes, parrains et protecteurs de ces institutions au nom du maintien de la paix et de la sécurité internationale.

Le troisième paramètre enfin, c’est que compte tenu du niveau de santé financière de l’époque et en considération de ce que le siège de l’ONU serait sur le territoire américain, les Etats Unis acceptaient – c’était un engagement – de contribuer pour 20% dans les budgets de l’Organisation, et de même que pour les démembrements techniques et spécialisées.

Dès le milieu de la décennie 1970, vexé et traumatisé par le réveil de la contestation et l’exigence des réformes conduits par la masse des pays de l’hémisphère sud, les Etats Unis avaient commencé à dénoncer leur propre engagement, en soutenant que celui qui paye ne peut pas subir les récriminations et des votes humiliants de ceux qui ne payent presque rien. C’est devenu petit à petit une constance de la politique étrangère des Etats Unis, avec des intensités plus moins fortes selon les couleurs de l’alternance à la Maison Blanche.

Hélas, malgré la modification des données économiques, financières et industrielles qui a changé les rapports des forces mondiaux en termes de richesses des différentes nations, des réformes conséquentes n’ont pas été actées au sein de l’ONU pour mettre fin au chantage américain en révisant les taux des contributions. Voilà comment les Etats Unis versent 450 millions de dollars de contribution annuelle à l’OMS, pendant que la Chine, maintenant très riche, ne verse que 50 millions de dollars.

Les Américains eux-mêmes n’ont véritablement jamais appuyé trop fortement sur l’accélérateur pour obtenir une réforme, préférant garder cette situation comme une arme de menace et de chantage à tempérament. C’est exactement ce que pratique Donald Trump qui manie cet état de chose envers et par devers les réalités plutôt très défavorables des nouvelles configurations stratégiques et géopolitiques.

Il demeure que la décision des Etats Unis, suscite deux observations qui ne grandissent pas leur président, et donnent à penser clairement que malgré le temps, la diplomatie du pays recule fortement au plan conceptuel par rapport aux exigences d’une vision pragmatique des affaires du monde. La première, c’est qu’il s’agit d’une violation d’un engagement pris librement lors de la création de l’ONU. La deuxième c’est le sentiment de comportement fanatique, aveugle, inconséquent, brutal, égoïste et infantile, compte tenu du contexte sanitaire international dans lequel il intervient.

Il est peut-être utile, de rappeler ici, ce que j’écrivais le 11 septembre 2002, soit un an après les terribles attentats terroristes du 11 septembre 2011, attentats que j’avais du reste amplement prévu, en commettant des analyses d’une prémonition sans appel.

« Une vieille tradition commune à toutes les civilisations, voudrait que celui qui a été frappé par un grand malheur, procède à une profonde méditation sur sa propre conduite, sur ses actes, sur tout son passé, sur l’ensemble de ses rapports aux choses, ses rapports aux autres. Cette démarche vaut bien aussi pour les Etats, ainsi que pour toutes les entités institutionnelles, qu’elles soient de droit public ou de droit privé. Et lorsqu’il s’agit précisément d’Etat, ce sont fondamentalement les stratégies et les tactiques de son expression sur le plan international qui sont concernées. En l’espèce, il ne peut pas seulement être question de cultiver la politique des représailles et des rétorsions, il est au contraire question de rechercher, de comprendre et de maîtriser, ce qui, dans ce que l’on est et dans ce que l’on fait aux autres, pourrait ériger des voisins, des partenaires, des Etats et des peuples entiers en ennemis ».

Ce texte est tiré d’un chapitre de l’ouvrage « Pensée unique et Diplomatie de guerre », aux Editions l’Harmattan à Paris en 2008. 272 Pages.

La décision de Donald Trump, constitue un revers cruel d’avantage pour l’image et la crédibilité des Etats Unis en tant que Grande puissance responsable et consciente de ses missions et des obligations, que pour l’OMS, ses programmes, son existence et la coopération internationale globalement.

C’est une décision regrettable, indigne, condamnable, honteuse et inacceptable.

En effet la décision de Donald Trump devrait encourager les nations périphériques, à repenser effectivement les instruments, les mécanismes et les normes actuels de la coopération institutionnelle internationale, dans l’optique de nouvelles orientations dégagées des carcans impérialistes sacralisés en son temps en 1945 à San Francisco. Cette démarche devrait se situer dans les efforts louables, compréhensibles et encourageantes déjà engagés par le Groupe des BRICS (Brésil-Russie-Inde-Chine-South Africa), pour l’abandon progressif du Dollar comme principale devise des échanges mondiaux.

La décision de Donald Trump, vient jeter la lumière sur les imperfections, voire les avatars et les fautes plutôt graves, insoupçonnables autant qu’inconcevables, d’un système qualifié de modèle de démocratie. Comment dans une vraie démocratie, le Chef de l’exécutif peut-il prendre une telle décision qui équivaut dans la pratique à une rupture diplomatique de temps de guerre, sans une consultation préalable des élus du peuple, en l’occurrence le Congrès (Sénat et Chambre des Représentants) ?

Le Directeur exécutif

J.C. SHANDA TONME
Shato11@yahoo.fr 

Lire aussi dans la rubrique POINT DE VUE

Les + récents

partenaire

Vidéo de la semaine

évènement

Vidéo


L'actualité en vidéo