Au tribunal : Quand Yves-Michel Fotso fait le mort
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Un homme qui est déjà condamné à 25 ans de prison n’a plus rien à gagner. Alors, autant qu’il soit mort au lieu de se faire embêter par des juges qui ont tout faux sur le dossier.

Les nouvelles ne sont décidément pas bonnes pour le fils du milliardaire de Bandjoun. Le magnat aurait bien pu casser sa tirelire pour rembourser le corps du délit, et son fils aurait utilement aboulé quelques milliards supplémentaires, et le chérubin se serait retrouvé en liberté. Mais voilà, les choses n’ont jamais été aussi simples pour Yves-Michel Fotso. il en a pris pour 25 ans dans le dossier de l’acquisition foireuse d’un Boeing Business Jet pour Paul Biya, tout est compliqué dès le départ. Les habitués des argus de l’aéronautique civile savent tous qu’un Boeing Business Jet ne coûte pas 36 millions de dollars. En convertissant aux cours de l’époque, on est bien à 18 milliards.

Un Boeing de ce type coûte au moins le double. C’est à croire que les conseillers de Paul Biya lui-même ne voulaient pas exactement acheter un avion. Tout se passe comme si on avait joué à piéger le fils du milliardaire qui, lui-même, voulait se rendre important. Il est tombé dans le panneau, à vouloir jouer les ingénieurs financiers sur les avions, tel ce Boeing 747 baptisé Big Boss, et qu’on n’a jamais revu dans la flotte, malgré les assurances du Pca Etienne Ntsama.

L’affaire était mal amorcée, et les avocats commis pour sa défense se sont tous déconstitués, les uns après les autres. L’affaire est pendante en appel à la cour suprême. Ce n’est pas le nouveau premier président qui va autrement se dépêcher d’ouvrir le dossier. L’affaire est pourrie. Les avocats, contrairement aux apparences, s’abreuvent aux bonnes sources a1 de la république, y compris jusques dans les salons du sommet de l’état. Pour les mêmes 18 milliards, la justice a condamné Yves-Michel Fotso. Elle a aussi épinglé Marafa Hamidou Yaya, le ministre d’état qui n’a jamais vu la couleur de l’argent, pour un délit tout trouvé d’intelligence maffieuse. Même le nouveau code pénal n’avait rien prévu. Les mêmes tribunaux ont aussi condamné Atangana Mebara, pour tentative de détournement des milliards qui avaient déjà été détournés par Yves Michel Fotso. Allez-y donc y comprendre l’art de faire le feu sans le triangle classique connu.

L’urgence D’Attendre

Le dossier en appel devra attendre. Me Alice Kom a beau se démener, ce n’est pas demain qu’on rouvrira le procès en sorcellerie. La Mama Alice, qui sait faire l’apologie de l’homosexualité, n’est d’ailleurs pas la seule avocate à s’être mêlée du dossier de l’acquisition foireuse du BBJ présidentiel. Lorsque Michel Fotso a eu le génie de jongler avec les 18 milliards dans des tours de passe-passe avec les avions et que le scandale éclate, un autre brillant avocat, l’ancien bâtonnier akere Muna, s’en était déjà occupé. Il dit avoir gagné le procès pour le compte de l’état du Cameroun. Il y a gagné 800 millions de dollars, et un aéronef, un Boeing 767.

Personne au Cameroun n’a vu la couleur de ces 800 mille dollars. Selon l’avocat, ils ont servi à rémunérer la troupe des avocats. L’avion dont parle l’ex-bâtonnier était déjà immobilisé au sol à l’ancien aéroport de Douala, des mois avant l’ouverture du procès aux Etats-Unis. Tours de malins du début jusqu’à la fin. Il est presque certain qu’en appel, on devra lui redonner sa liberté à Marafa. La malchance de Michel Fotso consisté surtout à s’être embarqué dans le même rafiot que l’ancien ministre d’état. Il devra donc attendre. Attendre quoi ? Une grâce ou une mort présidentielle.

À propos de remboursement du corps du délit, Yves-Michel Fotso avait largement de quoi rembourser. Par exemple, sur les 50 milliards gagnés contre la Guinée équatoriale d’Obiang Nguema. Même en prison, le fils du milliardaire pouvait faire mes avions de la flotte équato-guinéenne, de même qu’il faisait signer des actes notariés pour la création de nouvelles entreprises. En voilà au moins un, ses avocats en sont convaincus, qui serait plus utile dans la nature que derrière les barreaux. Mais alors qu’il n’a pas fini de ressasser l’injustice qui lui est faite avec l’interdiction tacite de rembourser, on lui sert d’autres procès.

Arguments spécieux

Et les nouveaux procès, il y en a tout un chapelet. Il y a l’argent du crash du combi en trois chapitres : détournement des indemnisations des passagers, vente frauduleuse de l’épave et détournement des mêmes fonds. Les chroniques judiciaires servies sur la question sont parfois impayables. On a tarifé le coup autour du crash à 18 milliards… encore 18, comme un chiffre maudit. On est alors loin du compte. D4abord, Michel Fotso n’a jamais vendu le 747-combi. L’avion a fait une sortie de piste à Roissy Charles de Gaulle avec son « père », Jean-Louis Angounou aux commandes. L’avion n’a pas crashé, il était juste un peu cassé. Et il y avait du beau monde à bord, dont quelques ministres de la république.

Personne n’es est mort, on n’a même pas déploré de blessés. On se demande donc ce que les assureurs auraient dû payer. La vérité est pourtant ailleurs. Flairant la bonne affaire à l’occasion de cet accident, les assureurs de la Lloyds arrivent sur les lieux et inspectent l’appareil. Tout est bon, surtout les réacteurs qui, à l’époque, représentent la moitié du prix de l’appareil. Ils proposent un marché tout simple au Cameroun : « nous vous payons 30 milliards, mais nous reprenons l’épave ». Sur ce tour de marché de dupes, Michel Fotso va recevoir non pas 18 milliards, mais bien trente milliards, virés en trois tranches dans un compte à la CBC, sa banque. Les assureurs britanniques vont se montrer plus généreux encore. Au moment de la vente aux enchères des réacteurs à Londres, Michel Fotso est invité dans la capitale britannique, il y enverra quelqu’un le représenter, on lui ramènera un autre chèque de 4,5 milliards. Au total donc, le crash du combi aura rapporté non pas 18 milliards, mais bien 34 milliards.

À quoi a servi l’argent ? Il n’a surtout pas servi à remplacer l’outil d’exploitation. Il a plutôt servi à enrichir la banque de Fotso et à lui permettre de faire le garçon flamboyant et le super généreux. On retrouvera difficilement les traces de tous ces milliards dans les bilans de la compagnie aérienne. Yves-Michel Fotso soutient lui-même, devant les journalistes et en mondovision, que la cameroon Airlines n’a jamais tenu de comptabilité sous son règne. On se demande comment il avait pu calculer les bénéfices qu’il annonçait, en l’absence d’une comptabilité, ou alors par quelle astuce le conseil d’administration lui délivrait des quitus de bonne gestion à chaque session.

Normal donc que Michel Fotso plaide non coupable quand on l’accablé d’avoir vendu l’épave du combi. Il ne l’a pas vendue, ce sont les assureurs qui a lui ont achetée. Nuances. Et c’était une offre qu’il ne pouvait pas refuser, d’autant plus que l’appareil avait le défaut d’être peu rentable pour une compagnie de la taille de camair. On n’aura pas le temps d’ouvrir le dossier proprement dit de la gestion de la camair, il faudra recruter des surdoués de la comptabilité pour reconstituer les comptes. La tâche est tout ce qu’il y a d’impossible.

Alors, tant qu’à faire, face à des accusations aussi incongrues, on fait le malade. Et même le mort. Lorsqu’on est déjà condamné à 25 ans de prison ferme pour un dossier discutable, il est des moments où il vous passe même l’envie de vous défendre. Même lorsqu’on plaide non coupable. Le fils du milliardaire ne risque tout au plus qu’une condamnation par défaut et cela lui vaudrait tout au plus une peine majuscule de cinquante ans ? Trop peu, pour un homme qui n’a plus rien à perdre. Déjà appelé à comparaître en début décembre, il ne s’est pas présenté. L’affaire a été ajournée au  début janvier, rebelote, l’homme est malade. Une maladie très opportune…

© L'Equation : David Serge BEHEL

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