Décès d’Anicet Ekane : La réponse du Dr Vincent Sosthène Fouda au ministre Jean de Dieu Momo
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Dr Vincent Sosthène Fouda recadre le ministre délégué auprès du ministre de la justice sur son dernier texte hommage à Anicet Ekane.
 
Ma réponse au ministre Jean de Dieu Momo

Monsieur le Ministre, 

Il est des heures où la République se juge elle-même, non à l’aune des procédures qu’elle invoque, mais à la lumière des principes qu’elle proclame.

Le décès d’Anicet Ekane n’est pas seulement une tragédie humaine, il est une épreuve pour notre conscience collective. 

Vous alignez des diagnostics médicaux, des comptes rendus d’examens, des détails cliniques comme si la République se réduisait à un dossier hospitalier. Mais vous n’êtes pas médecin, et si vous l’étiez, vous seriez tenu au droit de réserve, à la discrétion qui protège la dignité du patient. La République n’est pas un amphithéâtre où l’on expose la souffrance d’un homme pour justifier l’appareil répressif. 

La République, Monsieur le Ministre, c’est d’abord le respect de l’homme, de sa liberté, de son droit à l’affection des siens. On ne soustrait pas un citoyen à sa famille pour le soigner dans un milieu carcéral. On ne transforme pas la fragilité d’un corps en argument de procédure. On ne confond pas la justice avec la médecine, ni la garde-à-vue avec le soin. 

Vous parlez d’insurrection, de rébellion, de fausses nouvelles. Mais ce que vous oubliez, c’est que la République vit du débat, de la contradiction, de la parole libre. Anicet Ekane n’était pas un ennemi de la Patrie, il était un patriote, un combattant de la démocratie, un homme qui a porté la voix des disparus de Bepanda, qui s’est dressé contre les abus, qui a fait de sa vie un témoignage. 

La République ne se défend pas en enfermant ses enfants, elle se défend en les écoutant. Elle ne se protège pas en médicalisant la détention, elle se protège en garantissant la dignité. Elle ne se justifie pas en publiant des bilans cliniques, elle se justifie en respectant la mémoire des combattants de la liberté. 

Monsieur le Ministre, ce que vous ne comprenez pas, c’est que la République n’est pas une forteresse assiégée, mais une maison commune. Elle ne se gouverne pas par la peur, mais par la confiance. Elle ne se légitime pas par des comptes rendus médicaux, mais par la fidélité à ses principes. 

En exposant ainsi la maladie d’un homme, vous avez trahi la réserve, vous avez trahi la pudeur, vous avez trahi l’esprit même de la République. Et c’est à nous tous qu’il revient de rappeler que la République n’est pas un mot, mais une exigence. 

Monsieur le Ministre,  la République, c’est la grandeur dans la retenue, la force dans le respect, la dignité dans l’épreuve.  Aujourd’hui, il nous appartient de faire vivre cette exigence, pour que la mémoire d’Anicet Ekane demeure celle d’un patriote, et non celle d’un dossier médical instrumentalisé.

Voici le texte querellé du Ministre Jean de Dieu Momo 
 
Le décès de notre ami Anicet Ekane  est une tragédie. Son combat pour la démocratie et les droits de l’homme ne doit pas être récupéré par les ennemis de notre nation. Anicet Ekane  a reçu les soins appropriés depuis son interpellation suivie immédiatement de son hospitalisation pour des soins appropriés.

Je rappelle que Ekane Anicet n’était pas un ennemi du Cameroun mais un grand patriote aux côtés duquel j’ai personnellement mené les combats pour l’avènement de la démocratie et pour la protection des droits de l’homme dans l’affaire des neuf disparus de Bepanda,  dans l’affaire contre AES Sonel, pendant la grève de la faim de 2008, dans les affaires de destruction des monuments par Mboua Massok et par l’activiste Essama.

Il ne faut point que les gens qui ne sont jamais entrés dans une arène de combat profitent de cette triste et terrible perte pour détourner son combat. Mes condoléances à sa famille si durement éprouvée et à tous nos camarades de combat pour la démocratie et les respect des droits de l’homme.

LU POUR VOUS CES ELEMENTS D’APPRECIATION DE LA SITUATION DE SIEUR EKANE ANICET GEORGES

1- Motivations de l’interpellation 

– Il a été interpellé le 24 octobre 2025 à Douala, poursuivi pour insurrection, rébellion, révolution, hostilité contre la Patrie, propagation de fausses nouvelles, fraudes électorales et écritures publiques et authentiques, dans une procédure commune avec les nommés Djeukam Tchameni Dominique, ABA’A OYONO Jean Clavin et consorts.

– Il était sous le registre de la garde-à-vue judiciaire décidée par le Commissaire du Gouvernement près le Tribunal Militaire de Yaoundé. Sa procédure a fait l’objet de renvois pour compléments d’enquête depuis le 30 octobre 2025, notamment pour l’exploration de ses téléphones. EKANE Anicet avait réfusé de communiquer les codes d’accès de ses deux téléphones portables.

2- Conditions d’incarcération 

– EKANE Anicet, dès son arrivée à Yaoundé, n’a pas passé une seule nuit en cellule. Se plaignant d’un souffle, il a été interné immédiatement au Centre Médical Militaire de la Gendarmerie Nationale, où il y a séjourné jusqu’à son décès le 1er décembre 2025. Au début, son alimentation était prise en charge par la Gendarmerie Nationale, avant que son épouse ne prenne le relais.

– Il a bénéficié de visites permanentes de la part de tiers (son épouse, un de ses fils, un neveu, amis, connaissances et militants du MANIDEM). Il a également reçu la visite des représentants de la Commission des Droits de l’Homme du Cameroun. Lors du débriefing, ces derniers ont indiqué qu’EKANE leur a dit qu’il est bien suivi au plan médical.

– Il a bénéficié sans entraves de l’assistance de ses conseils (Me SIMH Emmanuel et MELI Hyppolite).

3- Situation médicale 

– L’évaluation clinique initiale du 24 octobre 2025 (dès son arrivée à Yaoundé) a révélé une détresse respiratoire due à une fibrose pulmonaire idiopathique dont il souffre depuis plusieurs années et pour laquelle il suivait de nombreuses médications irrégulières (son médecin traitant a confirmé qu’il se soignait très mal). D’où sa mise sous oxygénothérapie alternant entre l’administration d’oxygène pur et l’utilisation d’un extracteur mis à disposition par la Gendarmerie Nationale. Plusieurs explorations biologiques et radiologiques ont permis la mise en route d’un traitement, après concertation avec l’un de ses médecins traitants.

– Après des plaintes de difficultés lors de la miction, la concertation avec son urologue qui le suivait à l’Hôpital Laquintinie de Douala (irrégulièrement du fait de l’indisponibilité du patient) a entraîné des explorations complémentaires faits dans des centres de référence de Yaoundé (Centre Pasteur, Laboratoire Prima), tous évoquant un cancer de la prostate, diagnostic confirmé par l’examen anatomopathologique de la biopsie prostatique.

– Le 3 novembre 2025, il a présenté des œdèmes des membres inférieurs. L’échographie cardiaque et un électrocardiogramme (ECG) ont montré un important trouble du rythme cardiaque, d’où la prescription d’un Holter ECG. Lequel examen a mis en exergue la présence de très nombreuses extrasystoles supraventriculaires avec une hyperexcitabilité ventriculaire et une perte de la bradycardie physiologique nocturne. Une médication appropriée lui a été prescrite à cet effet.

– Son état, bien que préoccupant au regard de ces pathologies chronniques, était stable avant son décès soudain. Tous les frais afférents aux actes médicaux (examens, scanners, biospie, médicaments…) depuis son admission, étaient pris en charge par la Gendarmerie Nationale.

4- Mesures après le décès :

– Ouverture d’enquête en vue de déterminer la ou les cause(s) exacte(s) de la mort.

– -Constatations faites par deux légistes, en présence de Me SIMH Emmanuel et de l’épouse du de cujus.

– Sur réquisitions du CG/TMY et sur la demande de son épouse, une autopsie sera conduite demain, 2 décembre 2025 à 10 H, à l’Hôpital Central de Yaoundé, où le corps a été déposé

5- Sur l’affaire d’extracteur d’oxygène appartenant à Monsieur EKANE Anicet.

– Monsieur EKANE Anicet s’est présenté au Groupement de Gendarmerie Territoriale de Douala  le 24 octobre 2025 à 18 heures suite à l’interpellation de son neveu au siège du MANIDEM. Compte tenu de ce qu’il était lui-même recherché, il a été transféré le même jour à Yaoundé. Il se trouvait en compagnie du nommé NJOYA HAROUNA, également interpellé pour distribution de tracts séditieux, mais incarcéré lui à la Prison de New-Bell. Au moment de son transfert, EKANE n’a fait pas fait allusion à son extracteur d’oxygène.

– C’est près d’un mois plus tard, à la lecture de la lettre de son conseil (Me TIAKOUANG MELI) circulant dans les réseaux sociaux que le COLEGION LITTORAL est au courant que son extrateur se trouve dans le véhicule du nommé HAROUNA, incarcéré à la Prison de New-Bell et dont le véhicule était sous séquestre judiciaire au Groupement de Gendarmerie Territoriale de Douala.

– Au reçu de cette information dans la nuit du jeudi 20 novembre 2025, le COLEGION LITTORAL fait appeler Me MELI qui lui retorque qu’il est déjà à Yaoundé. Suite à l’accord du Commissaire de Gouvernement, le nommé NJOYA HAROUNA a été extrait le samedi 22 novembre en matinée de la Prison de New Bell. C’est ainsi qu’il a procédé lui-même à la fouille de son véhicule et a récupéré un plastique blanc sur le siège arrière du véhicule. Entendu sur cette affaire d’extracteur, le nommé NJOYA HAROUNA a déclaré que son véhicule avait été loué pour deux semaines afin de procéder à la distribution des tracts et affiches. C’est dans ces manœuvres que M. EKANE Anicet a laissé un plastique dans son véhicule. Ne sachant pas son contenu, il ne s’y est pas intéressé particulièrement. C’est au moment où il fouille son véhicule qu’il découvre qu’il s’agit dudit extracteur d’oxygène. Il a tout de suite été mis en contact avec l’épouse de M. EKANE Anicet pour sa restitution. Cette dernière a déclaré qu’elle ne pouvait arriver à Douala et qu’elle viendrait le récupérer lundi 24 novembre 2025. Dans le souci de mettre un terme à ce malentendu, une équipe a été envoyée la même soirée sur Yaoundé et a procédé à la remise de l’extracteur au propriétaire, contre décharge.

- En dépit de cette restitution, M. EKANE n’a jamais utilisé son extracteur. Il a continué à utiliser l’extracteur d’oxygène du Centre Médical qui était dans un meilleur état et d’une plus grande capacité (débit de 8 litres par minute, contre le sien qui était de 3,5 litres par minute).

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