CAMEROUN : PAUL BIYA, LE LONG CREPUSCULE ET LE DERNIER ACTE DE PAIX DE L’HOMME LION
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CAMEROUN : PAUL BIYA, LE LONG CREPUSCULE ET LE DERNIER ACTE DE PAIX DE L’HOMME LION :: CAMEROON

À 29 ans, revenu fraîchement de ses études en France, sanctionnées par une licence, Paul Biya fut nommé Chargé de mission à la présidence de la République. Aujourd’hui, à 92 ans, il cumule plus de six décennies de haute administration. Soixante-trois années au cœur de l’État, au service d’un pays qu’il a vu naître, grandir et traverser les épreuves de l’histoire. Son parcours force le respect autant qu’il suscite le débat, dans un Cameroun où les aspirations de la jeunesse se heurtent à l’usure du temps et à la longévité du pouvoir. Beaucoup s’interrogent : combien de jeunes Camerounais de 29 ans, titulaires parfois d’un doctorat, peuvent aujourd’hui rêver d’un parcours similaire ? La frustration est légitime, mais elle ne doit pas effacer le rôle historique d’un homme qui, dans sa force, a donné le meilleur de lui-même pour la stabilité de la Nation. Paul Biya n’est pas qu’un homme de 92 ans : il est le témoin et l’artisan d’une époque décisive, celle de la construction d’un État nouveau, dont il a contribué à préserver l’unité dans un environnement régional souvent instable. En 1962, il appartenait à cette génération pionnière, celle qui croyait à l’indépendance, à la rigueur administrative et à la loyauté envers la République. Son ascension ne fut pas un simple privilège, mais le reflet d’une responsabilité assumée durant des décennies dans des conditions où peu auraient résisté. Le président Ahmadou Ahidjo, en lui confiant le pouvoir, voyait en lui un patriote sincère, convaincu qu’il mènerait le Cameroun vers la paix et la stabilité.

Pourtant, avec le temps, l’âge et un entourage parfois plus soucieux de préserver ses privilèges que de servir l’intérêt général, l’image de cet homme d’État s’est brouillée. Ce n’est plus tant le président qui est contesté, que le système figé autour de lui. Si sanction il doit y avoir, c’est d’abord cet entourage qu’il faudrait interroger, car il a contribué à isoler un dirigeant autrefois salué pour sa rigueur et sa lucidité. Accuser Paul Biya d’avoir transformé une République prospère en République « villageoise » relève d’une lecture trop simpliste de l’histoire récente. Le Cameroun a affronté de multiples crises : chocs pétroliers, effondrement des matières premières, ajustements structurels, pandémies, menaces sécuritaires et pressions internationales. Malgré tout, le pays est resté debout, uni et relativement stable, un fait rare dans la région. Ce n’est pas le fruit du hasard, mais d’une gouvernance prudente, parfois lente, mais soucieuse d’éviter le chaos.

Les accusations de tribalisme, de corruption ou de népotisme, souvent portées contre le régime, ne sont pas des réalités propres au Cameroun ni à un seul homme. Elles traduisent des dérives systémiques que de nombreux États africains en développement affrontent encore. Le véritable combat n’est donc pas de « chasser un homme », mais de construire des institutions fortes, capables d’assurer la relève dans la continuité, la paix et la justice. Enfin, il serait inexact de parler d’un rejet de la diaspora. Le président Biya a reconnu, à plusieurs reprises, le rôle déterminant des Camerounais de l’extérieur dans le développement national. Des politiques de facilitation des investissements, de transfert de compétences et de dialogue sont venues renforcer ces liens. À l’heure où la question de la succession politique se pose avec insistance, il est urgent que la Nation toute entière fasse preuve de responsabilité. Paul Biya mérite de sortir par la grande porte, sans violence ni rupture brutale, dans la dignité et la reconnaissance de ce qu’il a apporté au Cameroun. L’histoire retiendra de lui un homme qui, malgré ses limites et ses erreurs, a maintenu la paix dans un pays traversé par tant de contradictions. Le Cameroun avance, avec ses forces et ses faiblesses, mais il avance, et c’est là, peut-être, le véritable héritage du président Biya.

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