Déclaration de l'ambassadeur US au Cameroun: Dr Siméon Kuissu "Que de bruits pour pas grand-chose"
CAMEROUN :: POINT DE VUE

Déclaration De L'ambassadeur Us Au Cameroun: Dr Siméon Kuissu "Que De Bruits Pour Pas Grand-Chose" :: Cameroon

On a remué beaucoup de vent, versé beaucoup de salive (heureusement pas de sang) et noirci beaucoup de papier à propos de la déclaration de l’ambassadeur US au Cameroun, Mr Peter henry Barlerin. Et pourtant, c’est une habitude des diplomates états-uniens et de l’Etat US lui-même.

Qu’a dit exactement l’ambassadeur BARLERIN ?

Qu’il y a eu "meurtres de gendarmes, enlèvements de fonctionnaires et incendies d'écoles, des assassinats ciblés, des pillages de villages" dans les régions anglophones, commises par les forces gouvernementales. Il a en plus "suggéré au président qu'il devrait réfléchir à son héritage et à comment il veut que l'on se souvienne de lui dans les livres d'histoire".

Ceux qui se réjouissent de cette déclaration comme ceux qui s’en plaignent perdent leur temps. Bien que défavorable à Paul BIYA, cette déclaration ne suffira pas à renverser le pouvoir du RDPC. C’est aux camerounais de le faire. S’ils ne le font pas, ils donneront raison entre autres à l’écrivain français La Boétie qui constate avec étonnement "qu’un homme seul en opprime cent mille (25 millions pour les camerounais) et les prive de leur liberté " et dit que "ce sont les peuples eux-mêmes qui se laissent, ou plutôt se font malmener, puisqu’ils en seraient quitte en cessant de servir".*

Et qui dit que les US ont envie de faire sauter Paul BIYA ? Est-ce que leurs intérêts sont compromis par le pouvoir actuel ? Est-ce que Biya s’est allié aux russes qui sont maintenant tout prêts de nous, en République Centrafricaine ? Est-ce que Paul BIYA refuse aux multinationales américaines l’accès au pétrole et au gaz de BAKASSI ? Est-ce que les USA sont fâchés avec la France ?

Ce n’est pas la première fois qu’un ambassadeur US à Yaoundé commet une déclaration « non diplomatique », ou que les Etats Unis « s’immiscent » dans les affaires intérieures du Cameroun. Pendant les « années de braise », Mme COOK avait fait mieux que parler ; elle avait agi contre l’élection de Paul Biya en 1992, sans réussir, comme chacun sait, à l’empêcher. En 2006 un autre ambassadeur, Niels Marquandt avait dénoncé la corruption et demandé que les dirigeants du pays publient leurs avoirs.

En 2011, c’est la secrétaire d’Etat elle-même, Mme Hilary Clinton, qui était montée au créneau en disant : " Nous espérons en cela que le peuple camerounais puisse participer cette année (2011) à des élections libres, équitables et crédibles », ce qui veut dire que les élections antérieures n’étaient pas libres, équitables et crédibles.

Si les gesticulations autour de la déclaration de l’ambassadeur US veulent montrer la différence entre le bruit que font les américains et le silence embarrassé de la France, elles ont réussi. Mais nous savons tous pourquoi la France ne dit rien alors que, pour des raisons non avouées, elle avait envoyé ses soldats kidnapper Gbagbo et le livrer à son pire ennemi à l’hôtel Le Golf d’Abidjan, et parachuté d’autres en Lybie assassiner Kadhafi pour bien moins que ce que fait Paul Biya. Depuis que le maréchal Leclerc, dont la statue trône devant la poste centrale de Douala sans que les chefs du canton Bell la casse, avait rangé d’autorité le Cameroun dans le camp du général de Gaulle contre l’Allemagne, notre pays fait partie de ce qu’on appelle la "chasse gardée" de la France. Eternellement ?

La France et les USA défendent leurs intérêts, chacun à sa façon, mais toujours à l’unisson.

Si le gouvernement US, qui laissent sa police assassiner les noirs américains, qui a détruit l’Irak et assassiné son président en mentant au monde entier au sujet de prétendues armes de destructions massives, volent au secours des populations du West Cameroun, ce n’est certainement pas pour des raisons humanitaires. On ne tardera pas à savoir ce qu’ils ont derrière la tête. Ceux des anglophones qui pensent s’appuyer sur l’impérialisme états-unien ou anglais pour se libérer du colonialisme (français) de « La République du Cameroun » se trompent : un Cameroun uni, fédéral (ou réellement décentralisé) et démocratiquement gouverné sera plus fort contre tous les impérialismes.

Quant à la France, le Cameroun n’a pas encore réglé son contentieux historique avec elle. C’est la mission des générations à venir. Pour l’heure, Si les camerounais ne veulent pas rester pour toujours "chasse gardée" de la France, ils doivent en tout premier lieu consacrer tous leurs effort au remplacement de la dictature RDPC par un pouvoir soucieux de l’avenir du pays et de ses habitants. En 2018, ceux qui ont la ferme intention de le faire peuvent y parvenir. Le RDPC a mis le doigt dans un engrenage qui peut l’emporter. Nos compatriotes anglophones se sont levés contre le pouvoir qui les tyrannise. Au lieu de parler avec eux, il a préféré la guerre. Ils sont allés provoquer une ruche ; maintenant ils courent après les abeilles et se font piquer. Est-ce qu’on tire les abeilles au fusil? Certaines « groupies » de Paul BIYA commencent à dire que "la guerre n’est pas bien ". Mais qui a déclaré la guerre ?

L’inaction des francophones devant le drame qui se déroule dans le SUD OUEST et le NORD OUEST est inadmissible. Je refuse catégoriquement le terrorisme politique qui consiste à considérer comme alliés des séparatistes tout citoyen camerounais qui soutient les revendications légitimes et spécifiques des anglophones. Le point numéro 1 du programme de l’UPC qui a libéré le Cameroun des colonialismes français et anglais était la réunification du pays. Ancien secrétaire général de l’UPC, J’y tiens. Mais ce point est inséparable des deux autres : l’indépendance et l’élévation du standard de vie des camerounais. Or notre souveraineté reste à conquérir, et le niveau de vie des camerounais ne cesse de se dégrader. Le pouvoir RDPC qui affame le peuple n’a pour slogan que l’unité et la paix, deux choses qu’il est en train de détruire lui-même. Sa chute est la première condition aussi bien pour une solution satisfaisante du problème anglophone que pour le développement et la conquête de la souveraineté du pays.

*Dans "discours de la servitude volontaire" édition Mille et une nuits. 1995.

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