Au-delà des tourments d’Alain Abouna Noah : pour la petite histoire…
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Il y a parfois, derrière une histoire livresque, une autre histoire à raconter qui elle-même pourrait aussi faire l’objet de tout un livre. Autour de l’œuvre poétique d’Arthur Rimbaud, par exemple, gravite l’histoire d’une amitié forte, avec Paul Verlaine, sur laquelle on a écrit, réalisé des films. Intéressons-nous à la petite histoire derrière le livre de l’auteur Alain Abouna Noah, de regrettée mémoire, qui nous a légué le roman intitulé Au-delà des tourments. L’ouvrage avait attiré notre attention en 2016, nous avions alors publié deux jolis extraits du livre à l’occasion de la deuxième édition du Cahier des bonnes feuilles. Puis ces jours derniers, un article récemment publié sur la toile a remis le livre au goût du jour, avec une révélation assez préoccupante, à savoir que le titre de l’ouvrage avait été repris par deux autres auteurs, originaires de l’Afrique de l’Ouest notamment. On peut lire le texte en question sur la toile, sous le titre : « Au-delà des tourments : l’héritage d’Alain Abouna Noah ».

L’histoire derrière Au-delà des tourments d’Alain Abouna Noah est aussi une histoire d’amitié. Né le 8 août 1966, son unique livre publié à ce jour ne l’est pas encore lorsqu’il décède le 20 novembre 2005, c’est-à-dire il y a vingt ans. Des amis de l’auteur, d’anciens camarades et co-chambriers de l’Université de Yaoundé, qui s’étaient pour ainsi dire constitués en un petit fan club d’Alain Abouna Noah, lisant et relisant ses manuscrits, décident finalement de partager avec un plus grand nombre de lecteurs l’œuvre de l’artiste l’artiste ne meurt jamais, dit-on. C’est en 2010 que le livre paraît d’abord chez un petit éditeur, en France, avant d’être publié à nouveau dans une plus grande maison d’édition en 2014. Pari gagné, car le lectorat est favorable et en redemande. Puis en 2015, le livre est retenu et présenté par une association littéraire à l’édition 2015 du GPAL…

Si les morts ne sont pas morts, comme a dit le poète Birago Diop, cela est encore plus vrai pour l’écrivain. Cinq ans après la disparition de son auteur, Au-delà des tourments jaillit de terre, de l’au-delà, comme un « mémoire d’outre-tombe », porté par des âmes de bonne volonté, elles-mêmes animées d’une amitié à toute épreuve, celle qui transcende la mort. Et depuis on dirait qu’il vit de nouveau parmi nous. Il est là, Alain Abouna Noah, sur nos bureaux, dans nos ordinateurs et nos smartphones, à nous entretenir encore et encore au sujet de son héroïne, Odilia Nanga.

Orpheline de ses deux parents, Odilia connait une enfance plutôt tourmentée jusqu’à ce que la Providence lui envoie l’homme qui va la délivrer de la souffrance, de ses tourments. Serge Dubois, bienfaiteur mais d’abord amoureux, « con-vole » littéralement à l’autre bout du monde avec sa dulcinée, là-bas, au-delà des tourments, du côté de la Nouvelle-Orléans, où ils vécurent heureux et firent deux enfants, selon la formule consacrée… Le livre serait teinté d’une inspiration autobiographique. Raison de plus pour aller parcourir l’ouvrage, essayer de lire et déceler entre les lignes la ressemblance entre l’histoire derrière l’histoire et l’histoire elle-même.

Ce pourrait être une erreur de se fier à l’intitulé, et croire que c’est un roman qu’on peine à parcourir, comme on peine à surmonter des épreuves, des tourments. Que non, le style est plutôt digeste, et par endroits c’est un vrai délice, à l’image de cet extrait que nous, le collectif Readind is so Bookul, avons publié en 2016 à l’occasion de la deuxième édition du Cahier des bonnes feuilles. Un critique le commentant a trouvé le mot juste en écrivant qu’il y a même comme un air jazzy de Manu Dibango dans ce petit extrait : « Le temps était beau par cette nuit de pleine lune. Les enfants étaient allés à la recherche du bois qu’ils avaient entassé, par fagots, dans la cour du chef. Les hommes, de leur côté, avaient apporté des dames-jeannes de vin de palme et des litres d’odontol qu’ils avaient disposés, avec soin, sur une étagère apprêtée à cet effet. Quant aux femmes, elles s’étaient occupées de la nourriture, essentiellement constituée de mets de cacahuètes, de mets de concombre, de plats de viande de brousse, fraîche et boucanée, de bâtons de manioc, d’igname, de plantain et de macabo. » Et la nuit s’étend sur le village…

Respects pour l'artiste.

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