25 JUIN 2019, PROCLAMATION DE LA DECENNIE POUR LES PERSONNES D’ASCENDANCE AFRICAINE
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BELGIQUE :: 25 JUIN 2019, PROCLAMATION DE LA DECENNIE POUR LES PERSONNES D’ASCENDANCE AFRICAINE :: BELGIUM

Les africains ou afrodescendants de Belgique, ciblés par les outils de recherche internet reçoivent ces dernières semaines, une invitation à participer à la célébration, le 25 juin prochain de la « proclamation de la décennie pour les personnes d’ascendance africaine au niveau national ».

Organisé par l’administration fédérale égalité des chances, sous le mandat du Ministre de l’Egalité des chances et avec le soutien du SPF Affaires Etrangères, cet événement s’adresse selon les organisateurs, « en premier lieu à la communauté afro-descendante en Belgique, à la société civile, aux chercheurs, aux administrations et aux décideurs politiques ».

En effet, depuis 2014, les Nations Unies ont proclamé la période 2015-2024 comme la Décennie internationale des personnes d'ascendance africaine, et ont appelé les Etats membres à le faire également à leur niveau. Le thème retenu pour cette décennie, "Reconnaissance, justice et développement", a été développé par les Nations Unies dans un programme d’activités.

Selon les organisateurs, « l’événement est avant tout le premier pas d’un processus plus large » ; « Lors de la matinée, les orateurs débâterons des initiatives de recherche et de politiques prises pour la communauté afro-descendante. Ensuite les panélistes aborderont les perspectives qui s’offrent pour l’avenir. Par la suite, dans trois sessions thématiques, la communauté afro-descendante en collaboration avec la société civile étendue, indiqueront les actions spécifiques qui, selon eux, sont prioritaires. Ceci permettra la mise en place d’un dialogue entre le gouvernement et la société civile et l’événement contribuera à la réalisation de l’agenda de la Décennie au niveau national ».

De prime abord, on ne devrait que saluer une telle initiative. Mais le contenu, le timing et le manque de transparence de l’organisation, masquent quelque peu les vraies raisons de ce nième enfumage, distraction et breuvage pour la communauté africaine et afrodescendante de Belgique, qui subit depuis plusieurs décennies, l’indifférence et le manque de respect d’une élite politique largement négrophobe.

Qui peut véritablement croire en la bonne foi des organisateurs de cet évènement, alors que les croissantes discriminations et souffrances de ladite communauté sont ignorées.

Aux organisateurs, nous disons que cet évènement constitue une insulte, la preuve à suffisance du mépris pour la communauté. Car il est inapproprié, non crédible, illégitime et sans lendemain.

1. De nombreuses interrogations sur la crédibilité et la durabilité de la démarche :

Après toutes les études et les rapports, rédigés ici et là, comment peut-on continuer d’organiser des activités concernant les africains et les afrodescendants, sans transparence, sans consultation de la plus grande base possible et sans l’implication effective des associations de terrain qui ont fait leur preuve dans de nombreux domaines ?

Comment sur la base de ces nombreuses études et rapports rédigés, d’ailleurs sans les africains et afrodescendants, et contenant de nombreuses recommandations, peut-on encore inviter les personnes et associations africaines à “indiquer leurs besoins et leurs recommandations concrètes à l'égard des décideurs politiques” (comme cela est écrite dans la note conceptuelle de l’évènement).

Comment, après les sages conseils de Mandela, continue-t-on à vouloir parler et faire au nom des africains, alors que l’on sait que ce qui est fait en votre nom, sans vous, est faite contre vous ?

Comment les organisateurs de cet évènement veulent-ils être pris au sérieux ? Eux, qui durant cette législature ont manifesté leur mépris, leur hostilité, voire leur haine à l’endroit de la communauté africaine et afrodescendante de Belgique.

Comment les organisateurs de cette beuverie (le membres du gouvernement sortant, CV&V et MR), garantissent-ils la continuité d’actions en faveur de cette décennie onusienne en faveur des afrodescendants, alors que depuis pratiquement 20 ans, ces élites, tous partis de gouvernement confondus, ont manqué de volonté politique pour respecter les engagements tenus à Durban en 2001 pour entre autres, mettre sur pied un plan national de lutte contre le racisme en Belgique ?

Qui ne se souvient pas ou plus, tout au long de cette législature, des propos racistes, méprisants et humiliants des membres du Gouvernement sortant/sorti NVA-MR et leurs affiliés à l’endroit des africains et des afrodescendants?

Qui a oublié le « grimage » d’un super ministre, le ministre des « affaires étrangères » de Belgique, défilant fièrement avec les « Noirauds » de Bruxelles en mars 2015, soi-disant pour collecter des fonds pour des enfants en difficulté ; en réalité, comme on le sait, la tenue grimée vise à « singer » (imiter) ou faire de la dérision des notables africains du 19ème siècle, dont les « Noirauds » se sont inspirés, et surtout de se moquer des africains et afrodescendants ?

Qui a oublié, que ce sont certains membres d’un parti au pouvoir aujourd’hui, qui ont organisé une cabale raciste contre leur camarade de part, Alain Eyenga, le premier échevin noir de Charleroi, l’accusant faussement d’actes manquant à l’éthique ; ancien échevin qui heureusement vient d’être innocenté après de longues années de bataille juridique contre l’image immorale et malhonnête que l’on a voulu faire passer de lui, en particulier, mais aussi des africains et afrodescendants, en général?

Qui a oublié le détricotage des droits des réfugiés et des migrants, dont de nombreux viennent d’Afrique, avec les rafles de rues et les visites domiciliaires à des heures indues ?

Qui a oublié la suspicion de tricherie et d’escroquerie à l’amour, véhiculée sur toute tentative d’union mixte afro-belge, à travers la rhétorique du « mariage blanc » ?

Qui a oublié le détricotage des droits des belgo-africains, à travers les nouvelles conditions imposées au regroupement familial, créant une discrimination entre belges, et des obstacles au droit fondamental « à une vie de famille normale » ; les afrodescendants se trouvant dans l’impossibilité de faire venir leurs parents ou leurs relations en visite ou séjour en Belgique?

Qui a oublié la complicité de ces gouvernements dans les ventes d’armes dans des pays « pauvres », en recherche de développement, et qui produisent des guerres çà et là et poussent la cohorte de migrants à l’aventure mortelle en méditerranéenne ?

Qui a oublié la participation de ce gouvernement dans le soutien coupable à l’OTAN et à l’assassinat d’un dirigeant africain, le colonel Kadhafi, avec toutes les conséquences connues : la dislocation d’un africain Etat stable et prospère, la Lybie avec un effet domino sur l’ensemble des pays voisins; la dislocation de la Lybie, pays d’emploi de nombreux migrants africains était une barrière contre les morts africaines actuelle en méditerranée ; explosion du terrorisme en Afrique avec Boko Haram ; et l’escalade des violences ethno-tribales des seigneurs de guerre en Afrique ?

Qui a vite oublié le résultat des dernières élections 2019, avec le succès des xénophobes et racistes, qui se trouvent désormais portés nombreux et plus ouvertement aux commandes des instances exécutives et législative de la Belgique ?

Qui a oublié le résultat des dernières élections européennes, fédérales et régionales, avec le faible nombre d’élus afrodescendants, tous partis confondus ?

Qui a oublié que la banalisation du racisme par l’élite politique de ce pays, contribue à la dévalorisation de soi, à la marginalisation doublée d’une paupérisation des jeunes d’origine étrangère en général et africaine en particulier. Ce qui conduit au repli sur soi, à la constitution de « gangs » et à la violence inter-communautaire ? Qui a oublié que cette violence inter-gang, a encore tué un jeune africain il y a quelques semaines au quartier Matongé de Bruxelles?

Qui a oublié la présence massive (encore actuelle) des réfugiés et migrants Africains dans le hall de la gare du Nord, compétence du gouvernement central, qui y sont pourtant entassés et abandonnés à leur sort ?

Qui a oublié l’absence et la faible place (encore actuelle) des Africains dans le fameux African Meuseum (musée africain) « modernisé » ?

Qui a oublié, concernant Matonge, l'indifférence du gouvernants pour un quartier si symbolique et pour lequel il manque de projet de développement véritable ?; au contraire, on s'est empressé de saucissonner ce quartier mémorable et touristique, pour chasser définitivement les Africains de ce quartier.

Qui a oublié?, qui a oublié ? pas certainement les africains et afrodescendants ?

2. Africains et afrodescendants, acteurs de développement et non téléspectateurs :

Depuis des décennies, de nombreux porte-paroles individuels, associatifs, experts et spécialistes tous acabits, ne cessent de parler des problèmes des africains, pour et au nom des africains. Le temps est venu de comprendre que les choses ont changé et qu’émerge une nouvelle génération, mieux sensibilisée aux discriminations, mieux préparée et mieux armée politiquement.

Les africains et afrodescendants de Belgique regorgent de talents et de compétences, qui, dûment consultés et rémunérés, sont valablement capables de fournir une expertise, une analyse de terrain pointue sur les questions de société et surtout lorsque celles-ci les concernent.

Cet évènement démontre une fois de plus qu’il n’est pas organisé avec la communauté large des africains et des afrodescendants et dans leur intérêt collectif. Il s’agit d’un « show », d’un évènement mal engagé et sans lendemain mené par un gouvernement moribond.

3. Acta, non verba. Des actes et non des paroles.

La philosophie des « décennies » des Nations Unies pour telle ou telle cause, vise à fournir un cadre temporel aux gouvernements et aux organisations pour accomplir des activités recommandées par le programme d’action mondiale et proclamé par l’Assemblée générale. Pour notre cas présent, il s’agit au niveau national, d’apporter une réponse adéquate et appropriée aux problèmes divers identifiés, en terme, d'élaboration de la politique nationale dans le but d'égaliser les opportunités en faveur des personnes africaines ou afrodescendantes. Ce qui passe, entre autres, par une politique globale intégrée antiraciste et anti-négrophobie et anti-islamophobie, articulée en matière d’enseignement de l’histoire complète du pays, y compris des conséquences de l’esclavage et de la colonisation et des génocides négligés ou oubliés ; activités d’éducation décoloniale ; mesures en faveur d’égalisation des droits et d’égalité des « places » et d’emploi des africains et afrodescendants. Il pourrait ainsi s’agir particulièrement de la définition des moyens d'action pour promouvoir la participation, la formation et l'emploi des personnes africaines et afrodescendantes dans tous les ministères gouvernementaux et à tous les niveaux de gouvernement.

En conclusion, il s’agit d’un évènement inutile, qui, non seulement permettra des dépenses publiques injustifiées, mais servira pour les organisateurs (CV&V et MR), d’arguments et de cautions politiques, en vue de solliciter dans le futur l’adhésion et le soutien des africains et afrodescendants. Enfin et surtout, il s’agit d’une opération de relations publiques, destinée à permettra à ce Gouvernement déchu, d’apporter une réponse maladroite aux critiques formulées par les experts des Nations unies en faveur de la décennie des afrodescendants, à l’issue de leur visite en Belgique en février dernier ; Rapport groupe d'experts NU sur la situation des afro-descendants en Belgique, dont la version définitive est prévue en septembre 2019; le rapport provisoire, rédigé après une consultation des africains et afrodescendants, démontre la situation alarmante et dramatique vécue par une bonne partie de cette communauté en Belgique et suggère des recommandations.

A mi-parcours de la « décennie », le temps n’est plus à la « proclamation », quatre ans après et à cinq ans de l’échéance, mais à des actions concrètes et durables. Ces actions sont identifiées, connues et répertoriées. La déclaration provisoire des experts des Nations unies sur les afrodescendants de février dernier en regorgent…

Non en notre nom. Faites cette proclamation en votre nom

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