Livre de Enoh Meyomesse: Kum'a Mbappé Bonabéri 1884 Liberté
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CAMEROUN :: Livre de Enoh Meyomesse: Kum'a Mbappé Bonabéri 1884 Liberté :: CAMEROON

Lundi 22 décembre 1884, l’armée allemande bombarde Bonabéri à partir d’un bateau stationné au milieu du Wouri. Elle désire mettre fin à l’opposition de Kum’a Mbappé, autrement appelé Lock Priso, au traité du 12 juillet 1884 plaçant le Cameroun sous protectorat allemand. Les combats durent plusieurs jours, les troupes de Kum’a Mbappé opposent une résistance opiniâtre à celles de Knorr, l’officier allemand dépêché spécialement de Berlin pour le vaincre.
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Max Buchner, le Consul allemand, était arrivé en provenance du Togo, à Cameroons Town, en qualité de « Représentant Provisoire de l’Empire Allemand à Kamerunstadt ». Il avait été désigné à cette fonction par Gustav Nachtigal, le personnage qui, le 14 juillet 1884, avait levé le drapeau allemand sur le plateau Joss. Il avait été ainsi le premier allemand chargé d’installer effectivement le colonialisme de ce pays à Cameroons Town.

Il était un freluquet au visage barré par une épaisse moustache et au regard incisif. Il était très autoritaire, et imbu de la toute-puissance de l’Allemagne face aux peuples qu’il venait trouver sur place et dompter. Il sillonnait l’Afrique depuis six années, à savoir, 1878, et s’était déjà familiarisé avec la mentalité des hommes qui y vivaient. Il était demeuré à Kamerunstadt jusqu’au mois de juillet 1885, soit une année entière.

Pour entamer sa mission, il était arrivé avec une petite milice constituée de soldats recrutés sur d’autres territoires, car c’était le moyen pour lui de se garantir la férocité de celle-ci sur la population de Cameroons Town.

Jusque-là, la population de Cameroons Town n’avait jamais eu affaire à des militaires étrangers. Elle découvrait donc ces soldats venus d’ailleurs, s’exprimant certes en pidgin pour certains, mais tous dans des langues inconnues d’elle. Même physiquement, la différence était notoire avec les habitants de la région. Par ailleurs, bien qu’ils furent pieds nus, ils portaient de beaux vêtements militaires qui impressionnaient les gens. Ils avaient de longs fusils et des sacs-à-dos, chose que n’avaient jusque-là pas encore vue les gens de Cameroons Town.

Max Buchner s’était d’abord installé dans le magasin Woermann, que dirigeait Edouard Schmidt. Il s’était empressé de placarder sur sa devanture un écriteau en allemand, que ne pouvait cependant pas comprendre la population, car ne s’exprimant pas en cette langue. Il y était écrit en gros caractères : Deutsches Reich Kamerunstadt. Elle ne comprenait que Kamerun, dont elle trouvait toutefois bizarre la nouvelle orthographe. Par ailleurs, Max Buchner avait également levé devant le magasin, le même drapeau que celui qui flottait au plateau Joss depuis le 14 juillet. C’était celui-ci qu’il avait aussi planté à Hickory Town, non loin du palais de Kum’a Mbappé. Sa milice, chaque matin, s’alignait devant lui au son du clairon. Ce que trouvaient bien étrange les gens. Il s’adressait alors à elle, après l’avoir passée en revue. C’était devenu un spectacle matinal pour les gens. Il y en avait qui venaient y assister de près, tandis que d’autres l’observaient de loin. « Le nouveau Blanc-là est différent des Anglais, pour quelle raison se trouve-t-il obligé de faire résonner son clairon le matin ? Est-ce un rite de son pays ? Les Blancs sont vraiment comme nous les Noirs, chaque peuple de chez eux a ses habitudes toutes différentes de celles des autres, exactement comme nous », disaient les gens.

Mais, sans tarder, les histoires avaient rapidement commencé entre ce nouveau Blanc et la population. Il était arrogant, brutal et très méprisant envers elle, rien à voir avec un personnage tel qu’Alfred Saker qui avait considérablement marqué la région. Ses miliciens n’étaient pas en reste. Ils étaient très provocateurs. Ceci avait amené la population à critiquer davantage les rois duala qui, par le traité qu’ils avaient signé quelque temps auparavant, avaient ouvert les portes du pays à ces nouveaux venus peu accommodants. Aussi, les gens disaient : « Alfred Saker avait la Bible en main, les commerçants européens leurs marchandises à vendre, lui il a sa milice et des fusils, pour quoi faire, sinon pour nous tuer, nous les Noirs ? »

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Lundi 1er septembre 1884, Kum’a Mbappé, autrement appelé Lock Priso, s’était levé du mauvais pied. Il était déterminé à en découdre ce jour une bonne fois pour toutes avec ce Blanc provocateur. Pour qui se prenait-il ? Il arrive dans le pays d’autrui, et se met à semer la terreur avec sa milice. Bien plus grave, qu’il le fasse de l’autre côté du fleuve où des rois félons ont vendu leur liberté à ce commerçant nommé Eduard Schmidt, cela se comprendrait. Mais, voilà qu’il avait eu l’outrecuidance de traverser le fleuve et de venir planter son détestable bout de tissu en forme de drapeau sur sa terre à lui, Kum’a Mbappé. Non, cela n’était guère acceptable. Depuis la lettre qu’il lui avait adressée dans laquelle il lui demandait de venir lui-même enlever son chiffon, il n’avait toujours pas daigné s’exécuter. Et le temps était en train de passer. Trop c’était trop. Puisqu’il en était ainsi, lui, Lock Priso, roi d’Hickory Town, qui était, comme son nom l’indique si bien, « roi de ces gros arbres semblables aux baobabs nommés hickory » et que l’on ne trouvait essentiellement qu’à Bonabéri, d’où le nom, il allait jeter au sol ce soi-disant drapeau allemand. Hickory Town était Bonabéri, pas Berlin. Lui, Lock Priso, n’avait rien signé du tout

avec cet Edouard Shmidt. En conséquence, il n’y avait aucune raison de laisser ce bout de tissu provocateur flotter insolemment au vent chez lui, dans son royaume. Aucune.

Il appela son fils. Celui-ci vint en courant, il savait détecter au timbre de la voix de son père son état d’âme. Il savait quand il était de bonne humeur. Il savait quand c’était le contraire.

― Oui, papa !

― Je règle son compte ce jour à ce sale Blanc qui est venu planter là (il se tourne et désigne du doigt le drapeau allemand hissé sur un poteau non loin de son palais), ce bout de chiffon.

― Comme il te plait ô mon père.

― Je l’ai décidé.

― D’accord, ô mon père.

― Bien avant que le soleil n’atteigne le firmament ce jour, celui-ci n’encombrera plus ma vue.

― Comme il te plaît, ô mon père.

― Ce Blanc de malheur n’a avec lui qu’une petite poignée de guerriers. Je ne sais pas s’ils atteignent la trentaine.

― C’est exact, ô mon père.

― De mon côté, j’en dispose de cinq cents, je dis bien cinq cents. Il ne peut rien me faire, il ne peut absolument rien me faire, rien du tout. Militairement, je suis plus fort que lui. Et puis, je suis chez moi, et lui, un envahisseur.

― C’est la vérité, ô mon père.

― Quand la semaine dernière, il était venu planter son drapeau ici, il avait ameuté les gens, et s’était fait accompagner par sa milice. Eh bien, moi également, je vais ameuter les gens tout de suite, avant qu’ils ne partent à la pêche ou que les femmes ne se rendent dans leurs champs, il faut qu’elles soient présentes, tout comme lorsque lui il est venu me provoquer ici. Je vais rassembler mon peuple, ainsi que mon armée. Ainsi, tout le monde comprendra que j’ai jeté à terre ce bout de chiffon que cet impertinent Blanc est venu planter ici.

― C’est une bonne idée, ô mon père.

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