Cameroun: Diaspora, un casse-tête pour le gouvernement
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Cameroun: Diaspora, un casse-tête pour le gouvernement :: CAMEROON

Les pouvoirs publics camerounais, comme bien d’autres à travers le monde, sont de plus en plus conscients de l’intérêt des contributions spontanées de la diaspora et essaie de trouver des moyens de coopérer
avec elles. 

Par-delà leurs envois de fonds, certains membres de la diaspora sont d’importants investisseurs directs dans des branches de production essentielles et émergentes, des mécènes connus de projets touristiques, ainsi que de généreux philanthropes. 

La question qui se pose aujourd’hui et plus encore après le forum de la diaspora (Fodias 2017) n’est donc plus de savoir si la diaspora peut être plus utile au Cameroun. Mais comment et quels types de politiques et de programmes publics sont à même de favoriser leur implication dans le développement du pays. Baromètre Communautaire revisite le Fodias 2017, notamment les recommandations porteuses d’espoirs, les sujets attendus mais occultés ainsi qu’une ouverture aux expériences des pays de la sous-région et d’ailleurs sur le continent.

Il aura donc fallu attendre toutes ces années pour qu’une esquisse de rapprochement entre les Camerounais de l’étranger et le pays se fasse visible. Du 26 au 30 juin dernier, le Cameroun a (enfin) décidé d’écouter ses fils de l’extérieur à travers le «tout premier» Forum de sa diaspora (Fodias). Une nouvelle étape d’un processus donc la longueur et les séquences montrent la difficulté du pays à trouver une place pour sa diaspora. 

Selon le ministre des Relations extérieures, Lejeune Mbella Mbella, ils seraient entre quatre et cinq millions de Camerounais à vivre hors des frontières nationales. Le ministre reconnaît que ces chiffres sont à actualisés. C’est cette population que le pays essaie d’attirer, avec peine, au service de son développement. «En ce qui vous concerne, là où vous exercez votre activité, en France ou ailleurs, je voudrais que vous sachiez que je suis informé du caractère industrieux de vos communautés, et pour beaucoup, du haut degré de compétence dont vous faites preuve. Vous faites ainsi honneur au Cameroun, et je tiens vous en exprimer toute mon appréciation. Mais, il va sans dire que mon vif souhait est de vous voir un jour mettre le savoir et le savoir-faire que vous avez pu acquérir aux prix de tant d’efforts personnels, et pour certains, grâce à l’assistance de l’Etat, que vous mettiez ces talents au profit du développement du Cameroun», déclarait le président de la République en juillet 2009, au cours d’un voyage en France.

Des initiatives sans résultats

Avec cette sortie présidentielle, certains avaient perçu le déclic d’un nouvel amour entre les Camerounais établis à l’étranger et le territoire national. Des avancées ont été notées, comme le droit de vote reconnu aux Camerounais de l’étranger depuis 2011.

Mais entre la diaspora et les pouvoirs publics, il s’est établi au fil des années un mur de méfiance que le gouvernement tente désormais de briser, sans jamais aller jusqu’au bout. En 2010, une mission est dépêchée à l’étranger, avec pour objectif discuter avec la diaspora de ses préoccupations.

Celles-ci intègrent l’épineuse question de la double nationalité. Une fois revenue, alors que l’on pense le sujet véritablement sur la table, aucun écho ne sera fait du compte rendu de la mission. Dimanche
2 juillet 2017, Albert Mbida, ancien inspecteur général au ministère de la Communication et membre de cette délégation, affirmait ne pas savoir ce qui a été fait du rapport de leur mission, qui a pourtant été remis «à qui de droit».

D’autres initiatives dont l’efficacité reste difficile à évaluer incluent le Programme d’aide au retour et à la réinsertion des jeunes de la diaspora (Parijedi) logé au ministère de la Jeunesse et de l’éducation civique, le Programme d’appui au retour des immigrés camerounais (Paric) du Fonds national de l’emploi (FNE) ou encore la création d’une direction des Camerounais de l’étranger au ministère des Relations extérieures (Minrex) depuis 2013.

Cette direction, qui est une évolution de la division des Camerounais de l’étranger créée en 2005 vise des ambitions plus grandes. Elle s’occupe entre autres de la mise en œuvre de la politique
gouvernementale en la matière, du suivi des évènements affectant les Camerounais de la diaspora, de la protection consulaire, etc.

En réalité, la diaspora est une population insaisissable pour les pouvoirs publics. Elle est un mélange de compétences avérées faites d’ingénieurs, de médecins, d’enseignants, d‘artistes, d’hommes de droit, de sportifs, etc. reconnus à l’échelle mondiale.

Mais aussi d’individus qui font peu honneur au pays. Partis pour poursuivre leurs études, bénéficiaires de bourses du gouvernement ou simples «aventuriers», ces Camerounais ont trouvé dans leur pays d’accueil une terre d’épanouissement propice. Plusieurs d’entre eux ont quitté le Cameroun contre leur gré, du fait d’un environnement local ne leur permettant pas de s’exprimer au mieux de leurs capacités. 

Dans le monde du sport par exemple, le cas de Françoise Mbango Etone, double médaillée d’or aux Jeux Olympiques rappelle les limites du Cameroun à retenir ses talents confirmés ou à venir.

Suspicions

Novembre 2016, des avocats et enseignants des régions du Nord-ouest et du Sud-ouest manifestent pour dire leurs ras-lebol face à ce qu’ils considèrent comme des injustices du pouvoir central à leur égard. Un membre du gouvernement monte au créneau pour pointer du doigt une main manipulatrice et étrangère «Je crois que les avocats ont été manipulés.

Les enseignants, quelques uns aussi sont manipulés. Nous en avons les preuves, il y en a qui ont reçu de l’argent de l’étranger. Ils ont donné de l’argent aux avocats, ils ont donné de l’argent à quelques enseignants», déclare Atanga Nji, ministre chargé des missions à la présidence de la République et secrétaire permanent du Conseil national de la sécurité. Cette sortie laisse planer la possibilité que des Camerounais à l’étranger soutiennent les mouvements menés par les avocats et les enseignants.

Même si des preuves officielles ne sont pas déclinées, le gouvernement va couper l’accès à internet dans les régions concernées pendant plus de trois mois.

Il ya également cette diaspora qui mène de façon continuelle, une campagne contre le chef de l’Etat et sa politique. Elle s’attaque presque directement à sa personne lors de ses voyages en Europe. C’est celle qui organise des manifestations au pied de l’hôtel, dans la rue ou non loin des ambassades du Cameroun pour dénoncer la politique du régime en place. C’est avec toutes ces personnes que le Cameroun doit mener la lutte pour son développement.

Le gouvernement se dit conscient, exprime sa volonté de s’y atteler. Mais au-delà des mots, les Camerounais de l’extérieur attendent des actes concrets et efficaces.

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