L’Union Africaine (UA) : une Organisation géopolitiquement Hors-Jeu
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AFRIQUE :: L’Union Africaine (UA) : une Organisation géopolitiquement Hors-Jeu

Dans les milieux académiques, l’on définit en général la géopolitique comme étant l’étude de l’influence des facteurs géographiques, économiques et culturels sur la politique des états et sur les relations internationales.

A cette définition politiquement correcte, nous préférons celle directe et honnête de Michael Klare(1), qui entend la géopolitique comme étant l’affrontement entre les puissances rivales pour le contrôle des territoires, des ressources naturelles, des sites géographiques vitaux (ports, les fleuves, les oasis, etc.), et de toute autre entité à même de conférer à son détenteur des avantages militaires et économiques.

D’après cette dernière définition de la géopolitique, le récent sommet de l’UA a une fois de plus botté en touche. Certes, il y a une avancée sur le plan du financement de l’organisation, mais, globalement, les thèmes qui ont été abordés demeurent très éloignés de l’impératif du moment qui est, la prise en main effective du pouvoir de contrôle du destin du continent.

Les chefs d’Etat Africains sont-ils les seuls à ignorer que notre continent est le lopin de terre le plus riche de la planète? Et que l’objectif exclusif, la justification ultime de leurs rencontres devraient être le contrôle de nos ressources naturelles. Ou alors ils savent que nous détenons entre 60% et 80% des ressources naturelles énergétiques et minières de la planète mais restent terrifiés face aux défis et aux efforts qu’impose la réappropriation de nos biens.

Cet immobilisme est très grave; car nos adversaires comprennent très bien ce qu’est le pouvoir et ne lésinent pas sur les moyens et les méthodes pour nous en éloigner. Deux exemples récents vont nous édifier sur ce sujet. Le premier est le barrage du grand Inga au Congo Kinshasa, le deuxième est la découverte d’un vaste gisement d’hélium en Tanzanie. Mais avant d’aborder ces exemples, rappelons en deux mots l’une des philosophies qui soutend l’impérialisme occidental.

Le malthusianisme

D’après Thomas R. Malthus (2): « … la population croit de façon géométrique, alors que les moyens de subsistance croissent de façon arithmétique… ». En d’autres termes, quelque part dans le futur, il y aura un point où les ressources naturelles ne seront plus suffisantes pour satisfaire les besoins de l’humanité.

Bien que cette doctrine ait été rejetée au niveau des économies nationales des prédateurs, elle continue d’être validée sur le plan international, et spécialement dans leurs relations avec l’Afrique. L’une des conséquences de cette doctrine est l’éruption du concept de « Surplus de Population ». Une autre est le principe de l’« industrialisation zéro pour l’Afrique », qui mérite que l’on s’y attarde un tout petit peu.

Le rationnel derrière ce principe est le suivant: compte tenu des projections de la croissance de la population mondiale, les ressources naturelles disponibles sur la planète et sensées couvrir les besoins de l’humanité seront d’après les « experts » épuisées d’ici un centenaire. Il devient dès lors vital pour l’Occident de mettre la main sur ces ressources afin d’en avoir le contrôle complet, et d’empêcher dans le processus aux autres de les utiliser de façon significative.

Or l’Afrique étant le principal locus des ces ressources, le contrôle de la taille de sa population combinée au maintien d’une industrialisation zéro rentrent désormais dans le domaine des politiques de sécurité nationale en Occident. Tant il est vrai que la poussée démographique en association avec l’industrialisation pourraient sérieusement déprécier le stock de ces ressources naturelles.

Avec cela à l’esprit, il devient dès lors facile de comprendre certaines initiatives stratégiques enclenchées dans les grandes capitales, depuis le rapport « Global 2000 » ordonnée par le Président Jimmy Carter, à la poussée des discours écologiques, en passant par de nombreux génocides instigués en Afrique, jusqu'à l’irruption d’endémies foudroyantes et de rebellions armées. Cela permet aussi de comprendre les obstructions Occidentales récentes face aux grands projets comme la construction du barrage du Grand Inga.

Le barrage du Grand Inga ou la solution au problème Africain d’énergie

Nous avons déjà évoquée ce projet dans un article précèdent (3) dont nous recommandons la (re)lecture. Rappelons néanmoins que le barrage du « Grand Inga » a la capacité d’approvisionner la moitié de l’Afrique en énergie, et cela fait très peur aux prédateurs qui usent de tous les moyens pour saboter sa réalisation. Signalons en passant que le président Nkurunziza et le peuple Burundais en sont des victimes collatérales à travers les troubles survenus au Burundi récemment.

En effet, le président du Burundi a refusé de participer à la déstabilisation du Congo. Cette fin de non-recevoir adressée à cette invitation diabolique déplait énormément aux maitres du monde qui essayent de le lui faire payer très cher.

Nous espérons que sa lucidité va inspirer tous les leaders politiques congolais à privilégier les intérêts de leur pays sur des avantages insignifiants (faussement appelés ambition politique) que procure le rôle de faire-valoir. Tous ces leaders devraient s’asseoir autour d’une table et s’engager à faire aboutir le projet « Grand Inga » quelle que soit l’issue des manœuvres politiques du moment, car les hommes passent, mais les grandes œuvres et les nations demeurent, et ce projet est plus grand que chacun de ces acteurs politiques actuels.

Un autre gros problème qui se profile à l’horizon est la récente découverte d’un gigantesque gisement d’hélium en Tanzanie.

Le Gisement d’Hélium en Tanzanie, un atout stratégique pour l’Afrique

L’hélium est un gaz rare qui est utilisée en imagerie médicale, en aérospatiale, en cryologie, dans l’industrie électronique, dans l’industrie nucléaire, et dans bien d’autres domaines. Sa raréfaction commençait à inquiéter sérieusement la communauté scientifique; d’ailleurs l’américain Robert Richardson (prix Nobel de physique) indiquait déjà en 2010 que les réserves mondiales de ce gaz pourraient s’épuiser autour de 2035. La découverte d’environ 1,5 milliards de mètre cube de ce gaz dans la vallée du rift est donc une véritable bouffée d’oxygène selon la communauté scientifique. Mais également une nouvelle source d’inquiétude pour les Africains avertis qui savent que leurs dirigeants ne savent pas tirer profit des avantages stratégiques.

Certaines activités et manœuvres récentes ne nous rassurent d’ailleurs pas. A peine la nouvelle découverte publiée que le 1er ministre israélien a immédiatement organisé une tournée chez les voisins de la Tanzanie. Lorsqu’on se rappelle du rôle déstabilisateur de l’Ouganda et du Rwanda dans les régions, il est troublant d’apprendre que ces pays figurent parmi ceux visités par Netanyahou.

L’Union Africaine : la grande muette

Avec une telle situation sous la main et autant d’atouts à sa disposition, que fait l’Union Africaine ? Elle parle de l’institution d’un passeport africain ! Nous pensons vraiment qu’il est temps de devenir sérieux dans la prise en charge de nos problèmes.

L’Union Africaine doit immédiatement cesser d’être l’ambassade en Afrique de l’Union Européenne. Il devient urgent que les actions et les priorités de cette organisation se focalisent sur l’extraction des pouvoirs matériel et stratégique que procure l’abondance des ressources naturelles du sol et du sous-sol du continent. La définition des objectifs stratégiques précis sur le court et le long terme devrait également faire partie de l’ordre du jour.

Il faut par exemple convoquer sans délai un sommet où serait discuter les questions d’énergie avec comme thème central le barrage du Grand Inga. Nous recommandons également que soient ensuite organisés des sommets ordinaires et extraordinaires sur les questions de contrôle et de gestion de nos matières premières, de la mise sur pied d’une force militaire continentale et intégrée.

Le reste pour le moment n’est que distraction, perte de temps, et il faut le dire, confusion. La priorité revient en pratique de faire coïncider les moyens de la politique à la politique des moyens; plus explicitement, l’on ne peut pas être aussi riche et se contenter de conduire la politique du pauvre ou de la chaise vide ; c’est inacceptable! Nous n’allons pas être assis sur le continent le plus riche du monde et nous comporter comme des mendiants apeurés.

Il est en conclusion clair que, ce n’est qu’après avoir pris le contrôle de nos ressources naturelles que la nouvelle Afrique riche sera respectée dans le monde, c’est de ce respect pour le continent que viendra le respect réel pour nos dirigeants, pour nous Africains et pour tous nos frères afro-descendants dans le monde. En effet, dans les relations internationales, les mots pouvoir(ou puissance), respect, et peur sont synonymes ; et cela que nos dirigeants qui préfèrent se faire protéger par des soi-disant forts plutôt que de se fortifier eux-mêmes ne l’oublient jamais.

(1) Michael T. Klare, Blood and Oil, page 147.

(2) Thomas R. Malthus, Essay on the Principle of Population.

(3) Paul D. Bekima, L’Union Africaine se Trompe-t-elle de Priorités ?, www.afriquenewsinfo.net du 19 Juillet 2015.

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