Un colonel de gendarmerie impliqué dans le «vol» d’un véhicule
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Le pandore a restitué un véhicule sous-main de justice entre de mauvaises mains présumées sur la base d’une décision de justice qui a été annulée. Le véhicule est porté disparu.

Depuis le 28 février 2017, le véhicule de marque Toyota Land Cruiser immatriculé CE 510 CI a disparu de la circulation. En tout cas, depuis cette date, les dirigeants de l’Hotel Contact Service Sarl (HCS Sarl) notamment, Elisabeth Chegno et Joseph Wambo Bouga sont à sa recherche. Ils accusent Jean Noël Essomba Ondigui, officier supérieur de gendarmerie, d’avoir contribué à le faire subtiliser. Ils exigent de ce fait réparation à l’Etat du Cameroun. Cette procédure judiciaire est pendante devant la Chambre administrative de la Cour suprême ainsi que devant un juge pénal.

Le 8 juillet dernier, le dossier a été appelé devant la Haute juridiction avant d’être renvoyé au 11 août prochain pour que Me Francis Djonko, l’avocat de HCS Sarl, apporte les preuves que son client a interjeté appel du jugement rendu par le Tribunal administratif du Centre le 19 mars 2019 dans les délais. La copie du jugement attaqué, consulté par Kalara, permet d’avoir une idée précise sur l’affaire. Le véhicule en question avait été placé sous-mains de Justice et gardé au Groupement territorial de gendarmerie du Mfoundi à la suite d’une plainte avec constitution de partie civile déposée en 2012 au Tribunal de première instance (TPI) de Yaoundé centre administratif (CA) par Pius Wafo, le représentant légal de la société Verodistribution. M. Essomba Ondigui, lieutenant-colonel de gendarmerie à l’époque des faits, était le commandant du Groupement Territoriale du Mfoundi. La plainte alléguée visait les dirigeants de HCS Sarl déjà cités. Tous accusés des faits présumés de faux et de fabrication ou de suppression de preuves en rapport avec l’immatriculation du véhicule allégué. Les parties se disputent en fait la propriété dudit véhicule, documents à l’appui.

Préjudice commensurable

Le 9 septembre 2016, le juge d’instruction du TPI de Yaoundé CA dressait son rapport d’enquête judiciaire (ordonnance de renvoi) dans lequel M. Wambo Bouga était renvoyé en jugement, tandis que Mme Chegno était élargie (non-lieu). Il ordonnait en outre la restitution de l’automobile saisi au plaignant. Le lendemain, les mis en cause avaient attaqué cette ordonnance de renvoi devant la Chambre de contrôle de l’instruction judiciaire de la Cour d’appel du Centre. La requête d’appel était notifiée au commandant Essomba Ondigui. Ce qui bloquait en principe la restitution de l’automobile querellé comme décidé dans l’ordonnance contestée. Rien n’y a fait.

Bien que notifié de la requête d’appel, le commandant Essomba Ondigui avait quand même restitué la Toyota à Pius Wafo, le 28 février 2017, prenant prétexte de l’exécution de l’ordonnance de renvoi critiquée. Deux jours plus tard, le 2 mars, il informait les accusés de son acte par exploit d’huissier de justice. Cet agissement qualifié tantôt de «faute de l’administration », tantôt «d’abus d’autorité », vaut aujourd’hui au Secrétariat d’Etat à la Défense (SED) en charge de la gendarmerie d’être traîné devant le juge administratif par la HCS Sarl.

Le 28 septembre 2017, la Cour d’appel du Centre avait annulé l’ordonnance de renvoi attaqué pour cause d’irrégularités décelées dans ses développements, puis avait ordonné la reprise de l’information judiciaire par un autre juge d’instruction. Déjà, neuf mois auparavant, le 12 janvier de la même année, la Cour avait renversé la décision de restitution du véhicule querellée au profit de M. Wambo Bouga. Après ces décisions, HCS Sarl, s’arc-boutant sur le PV de restitution dressé par le commandant Essomba Ondigui, introduisait un recours en indemnisation au Tribunal administratif du Centre le 18 décembre 2017. Selon la HCS Sarl, du fait de son préposé le commandant Essomba Ondigui, l’Etat a commis une «faute administrative» qui lui a causé un «préjudice incommensurable», car le véhicule disputé est «aujourd’hui porté disparu». Il dit l’avoir acquis à l’étranger au prix de 6,7 millions de francs en dehors des frais de douanes, 10 millions. Sans compter le préjudice moral évalué à 7 millions.

Faute personnelle

Le SED n’a versé aucune écriture pour sa défense. Sous la plume de son avocat Me Woupala, la Société Verodistribution a rejeté les allégations de ses adversaires se disant légitime propriétaire de l’automobile. Il en veut pour preuve les pièces de dédouanement et d’immatriculation régulièrement établies en son nom. Le ministère public avait suscité un débat juridique sur la qualification de l’acte attaqué. Pour lui, le PV de restitution décrié est «manifestement un acte de police judiciaire», car résultant de l’exécution d’une décision judiciaire. Par conséquent, l’appréciation de sa régularité échappe à la compétence du juge administratif.

Il avait étayé son argumentaire en invoquant le principe de la séparation des ordres juridictionnels selon lequel les Tribunaux administratifs ne peuvent examiner les litiges nés des activités judiciaires. Avant de décliner la compétence du tribunal. Le 19 mars 2019, le tribunal s’est déclaré incompétent. Dans les développements de son jugement, il fait la distinction entre une «faute de service» et une «faute personnelle».

Ainsi, la première n’est pas commise au cours de l’exécution du service, tandis que la seconde est commise à l’occasion des services mais relève de l’intention malveillante du son auteur, dit-il. «[…] Au mépris de cette voie de recours, le lieutenant-colonel Essomba Ondigui a restitué l’automobile […] Qu’en abusant ainsi de ses fonctions pour porter atteinte aux intérêts privés, il a nécessairement commis une faute personnelle dont l’appréciation de la responsabilité civile et pénale ressortissent de la compétence judiciaire.».

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