Un permis de bâtir fait débat sur les compétences de Tsimi Evouna
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Un avocat traîne le maire de la commune d’arrondissement de Yaoundé 4 devant la barre. Il l’accuse d’usurper des attributions du délégué du gouvernement auprès de la communauté urbaine de Yaoundé et notamment en délivrant les permis de bâtir qui seraient de la compétence exclusive du super maire de Yaoundé.

A quelle autorité revient la compétence de délivrer un permis de bâtir pour construire dans la capitale? Le questionnement est au centre d’un procès qui joue les prolongations au Tribunal administratif de Yaoundé. Me Mambok Luc, avocat au barreau du Cameroun, est dans la peau du plaignant contre la commune d’arrondissement de Yaoundé 4. Il accuse Mme Amougou Noma Régine, chef de l’exécutif municipal, de s’être arrogée les compétences de M. Tsimi Evouna Gilbert, délégué du gouvernement auprès de la Communauté urbaine de Yaoundé (CUY) en lui délivrant un permis de bâtir en ses lieu et place. Cette prétendue usurpation de compétences est à l’origine du rejet de sa demande de crédit immobilier, du retard observé dans les travaux de réalisation de sa résidence et de divers autres frais engagés pour reprendre certaines de ses procédures. Il réclame 5,9 millions de francs en réparation.

L’avocat raconte que dans le cadre d’une procédure d’obtention d’un prêt au Crédit foncier du Cameroun (CFC), visant à construire son habitation au quartier Ekounou, il a, comme l’exige la loi, saisi la commune de Yaoundé 4 afin d’obtenir un permis de bâtir. Le document lui a été octroyé quelque temps plus tard. Il a déposé son dossier complet au CFC, qui lui a versé une première tranche des fonds attendus. Seulement, il sera surpris au moment d’obtenir la seconde tranche du prêt que l’établissement paralyse la procédure et rejette le permis de bâtir, signé du maire, au motif que l’autorité n’est pas compétente pour valider le document.

La compétence de le faire ne revient, selon le CFC, qu’au seul délégué du gouvernement auprès de la CUY en vertu des dispositions d’un arrêté du 23 mai 2011 du ministre du Développement urbain et de l’Habitat (Minduh) fixant les modèles de demande et de permis de construire. C’est ce qui fait débat. Face à ce revers, Me Mambok a dû reconstituer un autre dossier déposé auprès de la CUY. Il a obtenu son permis de bâtir. Le portail des camerounais de Belgique. Il affirme que cette nouvelle procédure lui a occasionné divers préjudices, notamment un retard dans l’exécution de ses travaux puisque le chantier a connu une interruption en attendant l’obtention du document. L’avocat se plaint aussi d’avoir dû se saigner encore pour élaborer ce nouveau dossier à hauteur de 400 mille francs, son traitement à la CUY, un peu plus de 500 mille francs et surtout verser des loyers supplémentaires à son bailleur. Il a perdu la période de différé du remboursement du prêt, étalée sur neuf mois que lui avait accordée le CFC à la signature devant notaire de la convention de crédit. C’est ce qui justifie son recours en indemnisation.

Super maire

L’article 4 de l’arrêté du 23 mai 2011 du ministre du Développement urbain et de l’Habitat (Minduh) évoqué par Me Mambok fixe les modèles de demande et de permis de construire.

«(1) Au cas où le projet doit être réalisé dans une ville érigée en communauté urbaine, dit ce texte, le permis de construire est délivré par le Délégué du Gouvernement, après avis de la commission d’examen du permis de construire, au plus tard quarante-cinq (45) jours après réception dans ses services de la demande de permis de construire ». La suite de cet article précise toutefois que

«(2) la demande de permis de construire doit être introduite auprès de la Commune d’arrondissement du lieu de réalisation du projet. Le Maire de la Commune d’arrondissement concernée dispose d’un délai de trois (3) jours à compter de la date de dépôt de la demande de permis de construire pour la transmettre au Délégué du Gouvernement. En outre, il délivre dans les mêmes conditions de délais au demandeur du permis de construire un récépissé de dépôt comportant nécessairement les références de l’acte de transmission de sa demande au Délégué du Gouvernement. (3) Le Maire de la Commune d’arrondissement du lieu de réalisation du projet ou son représentant participe aux travaux de la commission d’examen du permis de construire.»

La loi contre l’arrêté

Pour se tirer d’affaires, la commune de Yaoundé 4 juge la démarche irrecevable. Elle soutient que les dispositions de l’article 31 du décret du 25 mars 1977 déterminant les pouvoirs de tutelle sur les communes, les syndicats de communes et établissements communaux et ses textes modificatifs disent, qu’en cas de litige, c’est le préfet territorialement compétent qui apprécie les agissements de l’autorité municipale. Pour n’avoir pas saisi l’autorité administrative, Luc Mambok a violé la loi, selon l’avocat de la municipalité. Son recours devrait, de ce fait, être irrecevable, soutient la municipalité.

Au fil du débat, il est apparu ce que Me Taptué, conseil de M. Mambok a qualifié de «conflit de loi». Le juge Anaba Mbo, président du tribunal a rappelé que la loi du 22 juillet 2004 fixant les règles applicables aux communes donne au maire le pouvoir de délivrer le permis de bâtir tandis que l’avocat soutenait, pour sa part, qu’un arrêté du Minduh, plus récent, attribue cette compétence au seul délégué du gouvernement qui fait office de super maire de la capitale politique. Les termes d’un arrêté, futil récent, peuvent-ils supplanter les stipulations d’une loi? Qui de Mme Amougou Noma Régine et M. Tsimi Evouna Gilbert était donc habilité à apposer son paraphe au bas du permis de bâtir sollicité par Luc Mambok? Ces questions n’ont pas trouvé réponses au terme de l’audience du 8 octobre 2019. Le tribunal a décidé d’ajourner l’examen de l’affaire pour permettre aux différents intervenants de peaufiner la réflexion autour de ces préoccupations.

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