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© Camer.be : Toto Jacques
- 16 Jun 2025 18:02:08
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Indira Babokè : entre culte de l’image et instrumentalisation politique au Cameroun :: CAMEROON
La soutenance de thèse d’Indira Babokè, retransmise en direct à la télévision camerounaise, a suscité une onde de réactions bien au-delà du cercle universitaire. Ce moment, censé être intime et académique, a été transformé en un spectacle national où l’apparence et la mise en scène ont pris le pas sur la discrétion que mérite un tel accomplissement.
Il ne s’agit pas ici de contester le travail ou l’engagement d’une étudiante, mais de questionner l’instrumentalisation politique et médiatique de cette réussite dans un pays confronté à de profondes inégalités. En pleine crise sociale, avec des hôpitaux en manque de ressources, des étudiants brillants invisibles, et un peuple à bout de souffle, cette exposition fastueuse semble envoyer un message contradictoire.
L’événement, minutieusement scénarisé, répond à une logique de culte de l’image profondément ancrée dans certains régimes en fin de cycle. Dans ces contextes, l’élite tente de restaurer sa légitimité non pas par des actions concrètes, mais par la glorification symbolique de ses héritiers. Le luxe s’affiche comme une réponse brutale à la misère, et les projecteurs deviennent des outils de domination plus que de reconnaissance.
Au Cameroun, cette soutenance publique d’Indira Babokè rappelle les heures sombres d'autres régimes où les enfants des puissants devenaient des figures publiques exaltées au moment même où la société s'effondrait. Le contraste est d’autant plus frappant que les étudiants des campus de Soa ou de Ngoa-Ekellè poursuivent leur parcours dans l’ombre, sans caméras, sans décors, sans reconnaissance nationale.
Le cœur de la polémique réside moins dans l’événement que dans son usage symbolique, presque rituel. Il révèle une stratégie de communication où la famille devient dynastie, où le mérite individuel est récupéré à des fins collectives, où l’académique devient politique. Derrière cette mise en scène, certains analystes perçoivent une tentative désespérée de réaffirmer une autorité vacillante en glorifiant une jeunesse bien née, triée, magnifiée, éloignée du réel.
Cette posture révèle les tensions profondes d’un pouvoir en décalage avec son peuple. À force de vouloir éblouir, on finit par aveugler. Et à force d'exposer, on dévoile plus qu'on ne protège. Car le véritable mérite n'a pas besoin de spectacle, et la légitimité ne se décrète pas sous les projecteurs.
Dans l’histoire des nations, les noms qui traversent le temps ne sont pas ceux des mises en scène, mais ceux qui ont su respecter les symboles, servir dans l’ombre, et protéger le sacré du commun. Ce que l’on fait d’un diplôme, d’une caméra, d’un peuple qui regarde, dit toujours quelque chose de ce que l’on devient.
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