Made in Cameroon : la farce gouvernementale
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Le 23 juin 2020, quelques députés et sénateurs du parlement camerounais étaient au Palais des Congrès à Yaoundé pour la première édition de la journée du patriotisme économique baptisée made in Cameroon, à l’initiative du Réseau parlementaire Espérance jeune, sous le thème « consommer camerounais pour promouvoir l’entreprenariat et valoriser l’emploi jeune. » L’occasion était idoine pour les élus du peuple et les membres du gouvernement de développer une fois de plus de grandes théories sur le patriotisme économique. Selon Joshua Osih, le président du réseau, la Covid 19 était une occasion unique pour mieux vendre les produits locaux, surtout avec la fermeture des frontières qui imposait un changement des habitudes de consommations. Le ministre du Commerce Luc Magloire Atangana a rappelé la nécessité de consommer local pour booster la création et la richesse, tandis que son collègue des mines, de l’industrie et du développement technologique Gabriel Dodo Ndoke invitait les jeunes à saisir le train des opportunités qu’offre l’industrialisation. Et pour le ministre de la Jeunesse et de l’éducation civique, le développement de l’économie emploi-jeune est l’un des défis majeurs à relever par les pouvoirs publics. Pour finir, le vice-président de l’Assemblée nationale Théophile Baoro, qui présidait la cérémonie a salué l’initiative en citant le président de la république qui prévenait sur le fait de « consommer ce que nous ne produisons pas et produire ce que nous ne consommons pas »

Au regard des images de la cérémonie, l’on peut conclure que ces personnalités ne croyaient pas un seul mot de leur théorie sur le patriotisme économique, étant tous vêtus de grands costumes importés, jusqu’au simples cache nez. Quand on prône la consommation locale au cours d’une cérémonie où tous sont habillés par des couturiers étrangers, de qui se moque-t-on ? Cette initiative venait déjà rejoindre d’autres, déjà exprimés dans divers discours aussi bien du chef de l’Etat que de divers membres du gouvernement. Mais au quotidien qu’est ce qui est fait pour la promotion de la consommation locale ? Chaque année, d’importantes sommes d’argent sont allouées à l’ameublement des bureaux administratif. Mais au moment de passer les commandes, les artisans locaux sont superbement ignorés au profit des grandes boutiques qui font dans les meubles, c’est à elles que les commandes sont passées.

Pourtant dans toutes les villes du Cameroun, on trouve des travailleurs du bois, qui exposent même le long des rues les produits de leur travail, qui ne manque plus d’imagination. En conséquence, pendant que ces jeunes camerounais sèchent leurs produits au soleil pendant des mois, des grandes surfaces importent des meubles en quantité qui sont livrés dans les administrations. L’Etat investi dans l’économie d’ailleurs en privant les artisans locaux d’importantes devises. C’est vrai qu’on peut reprocher aux artisans locaux un peu de négligence sur les finitions, mais l’essentiel est là, il suffit de les encadrer et d’être exigeants, ils se mettront à la hauteur.

Préférences des produits étrangers

De même pour les fêtes et les agapes, qui rythment la vie des activités du gouvernement tout le long de l’année, à plusieurs niveaux. Si le gouvernement décidait par exemple, que lors des dîners officiels et autres agapes organisées dans le cadre des activités gouvernementale, toutes les boissons à consommer doivent être de fabrication locale, imagine-t-on les devises qui resteront au pays, imagine-t-on le nombre d’emploi que cela pourrait créer ? Une décision pareille devrait être appliquée déjà à la présidence de la république qui donnera ainsi l’exemple et le ton, et l’on veillerait à ce que cela soit appliqué. Pour les fêtes de fin d’années 2019, le directeur général du Budget de la république du Cameroun a ordonné le 18 décembre 2019, par un fax adressé au percepteur payeur auprès de l’ambassade du Cameroun à Paris, l’achat en France pour le compte de la présidence de la république, des boissons pour près de 1 milliard 500 millions de francs Cfa. Si cet argent avait été mis à la disposition des fabricants locaux, il rentrerait dans le circuit économique interne, ferait tourner les activités, créerait de la richesse et emploierai un minimum de personnes.

En définitive, le gouvernement qui prône la consommation locale, devrait donner l’exemple, et compte tenu du volume d’argent qu’il réserve à la consommation chaque année, si tout cet argent était reversé dans l’économie nationale, le pays compterait moins de chômeurs, encore que bien d’études économiques montrent que le Cameroun est assez riche pour avoir des chômeurs.

Institutionnalisation de la consommation locale

Le processus, faute d’être impulsé par le haut, pourrait être initié au niveau local. Les élus locaux doivent bien cela à leurs populations qui les ont élus. Les maires pourraient commencer par adopter la fabrique locale dans leurs mobiliers de bureau. Le meuble en rotin communément appelé bambou de chine, les bambous ordinaires connus dans le faune camerounaise, sont d’une beauté extraordinaire quand ils sont bien travaillé.

De même, lors des fêtes, si les mairies lançaient des appels d’offre pour la fourniture des boissons locales, et exigeaient que les soumissionnaires soient implantés dans la commune concernée, nulle doute que cela serait motivateur pour beaucoup d’entrepreneurs qui ont le savoir-faire nécessaire, mais manquent de marchés, étouffés par les produits étrangers, par ailleurs hautement chimiques, que préfèrent paradoxalement les donneurs d’ordre, parfois sous le fallacieux prétexte qu’ils ne font pas confiance aux produits locaux, comme s’ils avaient aussi la garanti que ce qui vient par la mer ou par les airs est de bonne qualité, alors qu’ils se fient juste sur les écrits gravés sur les boites, que les contrebandiers falsifient d’ailleurs à volonté. Comme disait Thomas Sankara, l’impérialisme est dans nos plats. On ne peut pas manger du riz importé tous les jours et sortir parler du patriotisme économique, au moment même où le riz camerounais peine à s’imposer sur le marché local

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