Coopération : le Cameroun toujours sous surveillance de la France
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Le 5 mars 2020, l’Ambassadeur de France au Cameroun, Christophe Guilhou a été reçu en audience par le président de la République Paul Biya. Au sortir de l’entretien, le diplomate français déclarait à la presse que l’audience s’inscrivait d’une part dans le cadre des « rapports étroits » et des « contacts continus » entre les deux pays et, d’autre part, elle était le prolongement des échanges entre les deux Chefs d’Etat lors de leur entretien téléphonique quelques jours auparavant. On apprenait également que les deux personnalités avaient abordé l’évolution de la situation politique au Cameroun après les élections législatives et municipales du 9 février 2020, la situation dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, notamment l’incident de Ngarbuh le 14 février2020. Les deux s’étaient accordé sur « notamment l’identification des responsabilités pour comprendre ce qui s’est passé et pour prendre des sanctions contre les auteurs de ces attaques »

La 16 avril 2020 également, les Camerounais pouvaient lire sur le compte twitter du président de la République, « Je viens de recevoir au Palais de l’Unité, l’Ambassadeur de France au Cameroun, Christophe Guilhou. Au menu de notre échange de cet après-midi: la gestion de la pandémie COVID-19 au Cameroun, en France et dans le monde. » Invisible et silencieux depuis que le pays se battait contre la corona virus, c’est par le diplomate français qu’on avait ainsi les nouvelles du président de la république.

Le 5 juin 2020 encore, le diplomate français était à nouveau reçu par le président de la république, et les deux ont d’après les médias, parlé de la pandémie du Covid-19, de la question des droits de l’Homme et de l’incontournable situation dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest. Au total, trois visites de l’ambassadeur français au palais de l’Unité, en l’espace de 3 mois, temps pendant lequel les Camerounais eux-mêmes ont vu le président une seule fois lors de son discours à la nation le 19 mai 2020. Comme quoi l’ambassadeur de France au Cameroun est plus proche du président camerounais que les Camerounais eux-mêmes.

Accords de dépendance

Que fait l’ambassadeur de France au palais de l’Unité avec une telle fréquence, peut-on se demander, au moment où le président de la république se fait rare et reçoit peu de diplomates, dans le même temps à l’exception de l’ambassadrice de la Corée du Sud Mme Bok-Ryeol Rhyou arrivée en fin de séjour, qui est allée lui dire aurevoir le 5 juin 2020 dernier au même moment où il recevait Christophe Guilhou pour la troisième fois. Au sortir de l’audience du 5 mars 2020, le diplomate avait conclu ses propos par ces termes « le Cameroun et la France entretiennent des « relations étroites et confiantes », les deux pays doivent se dire « la vérité » car « c’est le propre des amis ».

Cette vérité, c’est que la France continue de surveiller le Cameroun, et s’assurer que ce qui se passe corresponde bien aux accords qui les lient. En effet, Parmi les accords qui furent signés entre le Cameroun et la France, il y avait les conventions franco-camerounaises de coopération du 30 décembre 1958, élargies par le traité franco-camerounais du 13 novembre 1960, puis complétées et améliorées le 8 août 1961 par des accords spéciaux en matière d’enseignement supérieur. Ces accords prévoient : Article 1- la France devra déterminer les choix politiques, économiques et socioculturels du Cameroun. Article 2- la France devra battre une monnaie pour le Cameroun, le FCFA. Article 3- la France devra orienter la détermination des programmes scolaires du Cameroun à tous les niveaux. Article 4- la France devra disposer dans son trésor public, d’un portefeuille appelé compte des opérations, de 100% des réserves de change du Cameroun. Il faut préciser ici que ce pourcentage a évolué en 1972 et 1973 respectivement à Brazzaville et Dakar pour la BEAC et l’UMOA, à 65% et finalement aujourd’hui il se situe à 50%.

Article 5- les matières premières stratégiques du Cameroun devront être exploitées par la France en priorité. Si celle-ci n’est pas intéressée le Cameroun pourra trouver un autre partenaire où l’exploiter lui-même. Article 6 concernant l’assistance militaire : Chaque fois que le président camerounais sera débordé par une agression externe ou une rébellion Interne, il pourra faire appel à l’aide militaire de la France. S’il n’est plus dans la capacité de le faire par un quelconque moyen de communication, l’ambassadeur de France au Cameroun peut le faire à la place de l’autorité camerounaise. On peut se limiter à ces contenus

Surveillance

D’après Albert Bourgi dans le Monde diplomatique du mois d’août 1976, « Après la Mauritanie, Madagascar et le Gabon, le Cameroun signait à son tour de nouveaux accords de coopération avec la France le 21 février 1974 à Yaoundé. Au nombre d’une vingtaine, si l’on tient compte de l’ensemble des actes (y compris les annexes, les protocoles accord et les échanges de lettres), ces textes se substituent aux accords-cadres du 13 novembre 1960 et autres conventions conclues entre cette date et le 21 février 1974. Coiffés par trois textes de principes, les nouveaux accords couvrent, comme dans le passé, tant le politique, l’économique que le social, le culturel et la technique. »

En somme, jusqu’à ce jour, ni Paul Biya du Cameroun, ni les présidents successifs de la France après de Gaulle, à savoir Georges Pompidou, Valéry Giscard d’Estaing, François Mitterrand, Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy, François Hollande ou même l’actuel président français Emmanuel Macron n’y ont rien changé. Aujourd’hui encore, la régularité de l’ambassadeur français au Palais de l’Unité suscite des interrogations. Ne serait-il pas en train d’appliquer les termes de l’article 6 de ces accords, en passant un subtilement un message aux camerounais ?

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