Point de vue: L’Apocalypse du pangolin
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Début décembre 2019, les autorités chinoises informent l’OMS, de l’apparition d’une forme de « pneumonie » jusque-là inconnue.

Mais il est presqu’établi qu’en réalité, c’est dès le mois d’octobre que cette infection a commencé à se répandre au sein de la population de la ville de Wuhan, dans la province de Hubei à partir d’un virus de la famille des « Coronavirus », transmis à un commerçant de gibier du marché de Wuhan, par un pangolin provenant des forêts situées à la frontière sino-laotienne. Certains virologues affirment que la plupart des coronavirus – dangereux pour l’homme – proviennent des chauves-souris. Une chauve-souris morte dans une grotte, est aussitôt dévorée par les fourmis. Le pangolin se nourrissant de fourmis, nous avons là l’origine du COVID-19.

La mondialisation des échanges à l’échelle planétaire, a fait le reste : presque toute la population humaine du monde risque la contamination et la mort pour beaucoup, avant de trouver le médicament qui soigne ou le vaccin qui immunise. Notamment en Afrique. 1,3 milliard d’Africains, répartis dans 55 pays-États, aux structures et équipements sanitaires ô combien déplorables ! Une situation dont la responsabilité revient aux gouvernances d’Etat, prédatrices des ressources nationales à des fins personnelles ! Moi qui sillonne ce Continent depuis plus de 45 ans et qui connais comment vivent la grande majorité de ses populations, le spectre des ravages que pourrait causer la pandémie du COVID-19 dans certains pays, est simplement effroyable !

Un naufrage à redouter

Cependant, bien que militant depuis des décennies pour un Panafricanisme réel, ma préoccupation face à une telle perspective, concerne en premier le Cameroun, Terre de mes ancêtres, terreau de mes racines. Que faire pour le sauver du naufrage qui se profile à l’horizon ? Voici brièvement les ingrédients du cocktail mortel :

- L’approfondissement d’un marasme politique et social explosif ;

- Un entêtement obtus et suicidaire, aveuglé par la sensation de toute puissance que confère la détention inexpugnable d’un pouvoir d’État, de la part d’une classe dirigeante qui conduit inexorablement le pays vers un embrasement final ;

- Et pour corser la mixture, l’arrivée d’un virus sur un terrain dépourvu de moyens sanitaires de lutte contre cet ennemi invisible et sinueux !

Dans un gouvernement sérieux, il existe un ou plusieurs centres d’études prospectives aux problématiques et aux enjeux géopolitiques du monde. S’agissant des conséquences plausibles que pourrait avoir la crise du COVID-19 sur le Continent africain – notamment dans les pays au Sud Sahara – le Centre d'analyse, de prévision et de stratégie (CAPS) du ministère français des Affaires étrangères dans une note, sous le titre «l’effet pangolin, la tempête qui vient d’Afrique », les prospectivistes écrivent que la crise du COVID-19 c’est : « la crise de trop, qui déstabilise durablement, voire qui mette à bas des régimes fragiles (Sahel) ou en bout de course (Afrique centrale) ». Plus loin, on peut lire : « La crise du Covid-19 va révéler de nouveaux rapports de force politique pour le contrôle de l'Etat, pendant et après la crise. "Anticiper le discrédit des autorités politiques signifie accompagner en urgence l'émergence d'autres formes d'autorités africaines crédibles pour s'adresser aux peuples afin d'affronter les responsabilités de la crise politique qui va naître du choc provoqué par le Covid-19 en Afrique »… En Afrique centrale, "le choc pourrait précipiter la crise finale de la rente pétrolière au Cameroun »…

Toutefois, sans forcément croire à de tels scénarii, n’empêche qu’il faut toujours tenir compte, comme élément de réflexion, l’analyse de ceux qui n’ont jamais cessé de s’immiscer dans les affaires africaines, en jouant souvent des rôles néfastes en vue de la préservation de leurs intérêts ; voire, de la consolidation d’une domination souvent pernicieuse.

De l’Enfer au Paradis

En effet, le régime de Paul BIYA a dramatiquement échoué. Il n’a pas réussi à construire une Nation camerounaise solide et prospère pour tous ses filles et fils. Malgré un formidable potentiel humain et économique, notre pays ressemble aujourd’hui comme un Enfer pour une écrasante majorité de ses citoyens ! Mais pour transformer l’« Enfer en Paradis », l’étape du « purgatoire » s’avère nécessaire pour la « Pénitence » des âmes, si l’on peut me permettre l’utilisation de cette métaphore biblique ; sans pour autant en être disciple. Le Purgatoire pour moi ici signifie qu’un jour, ceux des Camerounais, qui seront pénétrés véritablement par l’esprit du sacrifice, prennent la responsabilité de mettre un terme à cette inexorable décadence ! Les agissements maléfiques des dirigeants d’un État que d’aucuns qualifient d’« État voyou », les actions séditieuses et les comportements gravement irresponsables qui sapent les fondements de notre « Camerounité », de la part d’une horde d’hurluberlus qui prétendent remplacer les dirigeants actuels, doivent être mis hors d’état de nuire. Je l’ai déjà indiqué dans certains de mes écrits : les hommes d’État ne s’improvisent pas. Les hommes qui cherchent le pouvoir, oui. Par égotisme, jouissance de privilèges attachés, envie de domination... depuis la dernière Élection présidentielle, on assiste à un grotesque spectacle de guignols politiques qui embrouillent les esprits et sèment la confusion. Les méga-meetings et le brouhaha ininterrompu, quel que soit leur tonitruance, ne pourront légitimer une imposture qui excelle dans l’art de la manipulation et de la traitrise. La témérité qui est l’opposé du courage, n’est pas la qualité d’un bon leader. Dans « L’art de la guerre », Sun Tzu dit « qu’un Général téméraire est un mauvais Général ; car, dépourvu d’intelligence stratégique et tactique, il ne peut que conduire son armée à la perte ». Il conseille donc de ne point confier le commandement à un tel Général. Le « Kamerun » de nos martyrs ne pourra être éternellement la proie facile d’esprits malins, vautours assoiffés de pouvoirs et prompts à toute sorte de basses manœuvres pour arriver à leurs fins. Ce fut le cas ces soixante dernières années. Si on veut que cela change, alors il faudra agir différemment. Que ceux qui croient que les croassements ininterrompus d’une multitude de corbeaux, associés aux impatients trépignements d’un renard peuvent chasser un vieux loup de sa tanière, sachent qu’ils se trompent. Même s’il meurt, il est vite remplacé par un mâle dominant de la meute et non par un louveteau. Il faudrait que l’on comprenne que le système politique mis en place par les Français depuis les années 20, et qui a produit les régimes d’Ahmadou AHIDJO et de Paul BIYA, n’a rien à voir avec celui qui prévaut en Amérique d’OBAMA où, on peut permettre l’accès au trône d’un impétrant par l’inondation des réseaux sociaux et des médias d’internet, d’une propagande spécieuse et partisane. Pas plus que l’organisation de méga-meetings –pour faire foule – en vue d’intimider le camp adverse ou pour impressionner une opinion publique, tant nationale qu’internationale, ne peut changer les ressorts blindés d’un régime sans foi ni loi. Il est cependant plausible que dans les années à venir, internet et les réseaux sociaux puissent jouer un rôle prépondérant dans le domaine des compétitions électorales. Encore faudra-t-il que les populations aient reçu au préalable, une formation politique qui leur permet d’être des citoyens éclairés.

Or notre pays n’en est pas encore là. Aujourd’hui, plus qu’hier, notre chère Patrie est en danger de dislocation ! Elle est devenue un champ clos où de funestes rivalités politico-sociales font redouter le pire : la voir sombrer dans une guerre civile qui pourrait, si elle survenait, dans ce pays de plus de 250 ethnies, où sévit depuis quatre ans une guerre de sécession dans la partie anglophone, qui est confronté aux actions terroristes de Boko Haram dans son Septentrion, provoquer la disparition du 3 Cameroun, comme pays ; au profit de micro-États, dirigés par des potentats locaux ! Il y a dans l’histoire du monde, des précédents qui nous font craindre un tel scénario.

Mettre un terme à la dynamique en œuvre

C’est pourquoi, le spectre d’un tel cauchemar doit être impérativement conjuré. Dans un pays, où il existe de vrais patriotes, une seule institution possède la force de mettre un terme à cette dynamique en œuvre ! À condition, bien sûr, que les plus hauts responsables de cette institution soient pleinement conscients de leur devoir envers un pays en déconfiture. Cela s’est vu naguère au Ghana ; mais aussi il ya peu au Burkina Faso, au Zimbabwe, en Algérie, en Egypte, au Soudan… Car, il est plus qu’impérieux que certains de nos compatriotes semblent avoir perdu la raison, puissent comprendre qu’on ne joue pas impunément avec la défense d’une Cause nationale ; moins encore bafouer les symboles d’une Patrie. Tous ceux qui pourraient apparaître comme traites à cette Cause, paient souvent le prix du châtiment suprême. La Révolution française a ainsi passé plus 18 000 personnes jugées contrerévolutionnaires, à la guillotine ; l’épuration gaulliste à fusillé plus 1 800 collaborateurs des Nazis en 1946 ! Nul ne doit s’amuser avec l’honneur d’un pays et resté impuni. Bien entendu, le changement de régime politique étant devenu un impératif dans notre pays, le débat sur la forme de l’État en République (Fédération, Confédération, Autonomie régionale etc.) et les modalités de son organisation, demeurent une nécessité absolue. Il peut se faire de manière civilisée, sans imprécations abjectes, sans opprobre ni anathèmes, et sans disqualification de quiconque ; afin d’aboutir, le moment venu, au meilleur choix des plus qualifiés – au plan moral et des compétences requises – à la gouvernance des affaires de notre pays.

Devoir civique de solidarité

Mais pour l’heure, au regard de l’apocalypse annoncé dû à la pandémie du COVID-19 en Afrique, l’urgence est de venir au secours de nos malheureuses populations. Dans la fameuse note de prospective citée plus haut, on peut lire : « Pour la France, dans ce chaos, il s'agit de trouver des interlocuteurs à la fois fiables et légitimes pour compenser la possible faillite des Etats. "L'immanquable détournement de biens publics (à commencer par des masques) et de l'aide sanitaire internationale à venir (déjà dénoncée sous le terme « Covid-business ») peut facilement cristalliser l'ultime perte de crédit des dirigeants". A ce stade, quatre catégories d'acteurs ont la capacité de mobiliser des foules. Ils doivent "donc d'ores et déjà constituer des interlocuteurs pour nos efforts de gestion de la crise en Afrique", estime-t-on au Quai d’Orsay. Ils poursuivent : « Quels sont ces interlocuteurs ? Les premiers sont les autorités religieuses. Si des institutions ont accepté d'accompagner les premières consignes (Eglise catholique, certaines confréries musulmanes), d'autres, qui ont fondé leur succès sur la canalisation politique des émotions populaires, pourraient vouloir défier l'ordre public pour imposer le leur dans ce moment de faiblesse de l'Etat. Les deuxièmes sont les diasporas, qui peuvent avoir un devoir d'information civique »…

En quoi pourrait consister le « Devoir civique » de la Diaspora camerounaise dont le nombre est estimé à 4,5 millions de personnes, face à l’urgence et au défi que nous impose la pandémie du COID-19 ? Faute d’avoir su, jusqu’à maintenant, s’organiser politiquement avec efficience, elle pourrait – si ce n’est encore fait – commencer par faire montre de solidarité sans exclusive, envers la majorité des 25 millions de nos compatriotes qui vit dans la pauvreté, et risque la mort que fait planer cette épidémie, faute de moyens pour se protéger ; ou d’accès aux soins en cas de contamination par le virus. Une initiative, d’où qu’elle vienne, permettant la création d’un Fonds de Solidarité, abondé par le versement d’un minimum de 25 € par chaque membre de cette diaspora, constituerait un acte patriotique de grande portée. Un tel fonds pourra être exclusivement destiné : au financement de la fabrication par les entreprises et artisans locaux, des masques de protection en tissus, de gel hydro-alcoolique en grande quantité et à la fourniture de tests sérologiques, à distribuer gratuitement à tous nos compatriotes qui en auront besoin ;

2) À l’achat des médicaments pour soigner gratuitement tous les malades du COVID-19 et accessoirement d’autres pathologies ;

3) À accorder des aides financières – sans intérêts et non remboursables – à ceux qui seront confrontés à la perte de leurs moyens de subsistance (entrepreneurs indépendants, opérateurs et commerçants du secteur informel, petits artisans), qui s’engageront à rendre des comptes de l’utilisation de l’aide obtenue. Bien entendu, le pilotage et la gestion d’un tel projet devront se faire avec équité, probité, rigueur et confiés à une équipe basée au Cameroun et dont les membres seront choisis sur la base d’une moralité et d’un engagement social irréprochables, et dont la notoriété est assez reconnue. Pour ma part, je suis prêt à donner ma modeste contribution si un tel projet voyait le jour ou s’il existe déjà. Je pense que si on veut faire Nation, de telles actions peuvent faire sens avec le sentiment d’appartenance à une communauté nationale et à un destin commun. N’apporter de l’aide qu’à sa seule famille ou à sa tribu, bien que louable et légitime au demeurant, ne contribue pour autant pas à mon sens, au renforcement de l’esprit patriotique. Ce faisant, il n’en reste pas moins comme obligation impérieuse de l’État dans une république, d’assumer sa responsabilité pleine et entière, de protection des populations sur tous les plans : sanitaire, sécuritaire, économique, social… A l’État camerounais d’en assumer la sienne face à l’apocalypse annoncé du COVID-19 !

Devoir de vigilance

Enfin, il n’est peut-être pas inutile de rappeler quand même que génétiquement, il y a quelques différences entre le Négroïde et le Caucasoïde. En effet, il est établi qu’une partie des populations europoïdes a dans son génome, 30% de gènes de l’ « Homo Neanderthalensis » - disparu –, après son croisement avec l’ « Homo sapiens » venu d’Afrique. Les gènes de l’Homme de Neandertal étant absents chez les Noirs africains, peut-être que la réponse immunitaire pourrait être différente face à ce virus. C’est pourquoi, vu les immenses enjeux économiques et les bouleversements géopolitiques gigantesques que va entraîner cette pandémie, une nécessité de réflexion et de vigilance s’impose pour les dirigeants et leaders africains, aux suites et autres conséquence inhérentes à cet évènement. Mais aussi à toutes sortes de manœuvres, propositions de coopération, de partenariat ou d’assistance de toute provenance qui sont déjà élaborées dans des officines. Elles souvent entachées d’arrières pensées pas toujours bienveillantes à l’égard du Continent noir. Après tout, avant l’arrivée de l’homme Blanc en Afrique, il y avait bien une vie : aussi bien humaine, animale que végétale. Nos ancêtres se nourrissaient et se soignaient ; ils avaient une vie sociale et un savoir-faire traditionnel que les Africains ont intérêt à réhabiliter !

Quant à moi, à titre individuel, nonobstant un douloureux exil que je subi depuis si longtemps, j’essaye de garder vivace mon africanité, pour ne pas dire ma « bantüité », voire ma « bäsaité », mon ethnie d’origine. Comment ? En revisitant les connaissances des pratiques traditionnelles de ma culture et gardant à l’esprit, ce vieux proverbe : « quel que soit la durée de séjour d’un morceau de bois dans une rivière, il ne deviendra jamais poisson ».

Par Sayë (Richard) MBOUMA KOHOMM,

Président du Mouvement des Patriotes Camerounais (MPC)

Le 6/04/2020

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