Corona virus : les Camerounais abandonnés à eux-mêmes
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Corona virus : les Camerounais abandonnés à eux-mêmes :: CAMEROON

Par un simple communiqué, le Secrétaire général des services du premier ministre Séraphin Magloire Fouda a porté le 31 mars 2020 à la connaissance du public, que le président de la République son Excellence Paul Biya, a décidé de la création d’un Fonds spécial de solidarité national pour la lutte contre le corona virus. Il va plus loin pour dire que le Chef de l’Etat a d’ores et déjà instruit d’abonder en urgence ledit Fonds à hauteur d’un milliard de franc cfa pour le financement des opérations relevant de la stratégie de riposte contre la propagation de la pandémie de corona virus au Cameroun. Un geste à saluer en ce moment où rien n’est peu pour lutter contre la pandémie, mais aussi un geste qui démontre à suffire quelle importance le président de la république accorde à cette pandémie et la considération qu’il a pour les Camerounais dans l’ensemble.

Regard de haut

Pour ce qui est de la considération de sa population, sans négliger une institution de l’Etat, il convient de noter que l’annonce de la création de ce Fonds Spécial est faite par le Secrétaire général des services du Premier ministre. Même pas par le ministre de la Santé publique qui est au four et au moulin, même pas par le Premier ministre lui-même qui préside pourtant les réunions de crise en lien avec la pandémie depuis le 17 mars 2020, même pas le ministre Secrétaire général à la présidence de la République qui bénéficie d’une délégation permanente de signature du président de la république, encore moins le président de la République lui-même.

Le corona virus a pourtant fait sortir tous les chefs d’Etat de la planète, le pape y compris, qui se sont directement et personnellement adressés à leur peuple, les a rassurés qu’ils avaient pris la mesure de la situation, et ont encouragé toutes les couches sociales à leur prêter main forte contre ce qui est unanimement qualifié de guerre. On a vu des présidents des pays dit les plus puissants, sur le terrain des hostilités, prenant les risques, encourageant les malades, félicitant les médecins, infirmiers et personnels soignant, tenant des réunions avec toutes les composantes de la société pour trouver des voies et moyens pour lutter contre cet ennemi commun.

Mais sur ce coup encore, les Camerounais sont orphelins, comme un troupeau abandonné par le berger. Ils doivent se contenter des communiqués, des résolutions, des notes de services, des correspondances et autres signés par des membres du gouvernement et assimilés, et tous avec la même mention, « sur très haute instruction du Chef de l’Etat ». Mais il y a des situations dans la vie où le chef ne se contente plus seulement de donner des instructions, il prend lui-même les choses en main. Tous les autres chefs d’Etat de la planète savent qu’ils peuvent donner des instructions, ils ont même des gouvernements et des administrations plus structurées et plus cohérentes, mais ils ont tous compris que cette pandémie du corona virus commande qu’ils prennent eux-mêmes le bâton de commandement. Tous, sauf le chef de l’Etat Camerounais.

Fonds de misère ?

Quant à l’importance même accordée à la pandémie, Paul Biya semble n’avoir pas encore compris de quoi il s’agit, ou plutôt son administration ne lui a pas encore présenté toute la situation. Si oui il ne créerait pas un Fonds spécial de solidarité, il déciderait d’une dotation spéciale d’urgence comme l’on a vu par le passé. Le 29 janvier 2020, le gouvernement décidait de mettre 100 milliards de francs cfa sur la table pour payer les dettes intérieures, sur haute instruction du Chef de l’Etat. Bien loin en arrière, des exemples existent aussi. La situation exige en ce moment une décision similaire. Un fonds spécial de solidarité suppose que les élans de solidarités des uns et des autres sont attendus. Et si jamais ces élans n’arrivaient pas, que ferait-on ?

Ce qui conforte encore l’idée selon laquelle Paul Biya ne serait pas au courant de la vraie situation, c’est qu’il instruit de mettre en urgence un milliard de francs, alors qu’un jours avant, le ministre de la Santé publique annonçait que la prise en charge des passagers confinés dans les hôtels à Yaoundé et Douala, avait déjà coûté à l’Etat 630 millions de franc Cfa. C’est dire que le milliard devrait être rapidement englouti dans cette rubrique.

En côte d’Ivoire, le président Alassane Dramane Ouattara a annoncé un plan de riposte d’un montant de 95,8 milliards de francs cfa pour lutter contre la pandémie, au Sénégal le président Macky Sal a créé un Fonds nommé « force Covid-19 » qui sera doté de 1000 milliards de Francs cfa, en république du Congo le président Sassou Nguesso a annoncé 100 milliards, pour ne citer que ces quelques exemples, et les annonces ont été faites par les chefs d’Etats eux-mêmes, pas par personne ni communiqué interposé. La modicité du montant de un milliard annoncé pour le fonds spécial de solidarité laisse donc un goût d’inachevé, une impression de mauvaise appréciation d’une situation pourtant critique.

Pendant que les autres chefs d’Etat mettent les moyens en jeu pour lutter contre la pandémie et sauver leur peuple, au Cameroun on a droit aux communiqués qui demandent aux populations de cotiser pour se laver les mains. Plus intriguant encore dans le communiqué du Secrétaire des services du premier ministre, le président Paul Biya qui a l’habitude d’être large n’a même pas commencé à cotiser lui-même. Il a plutôt instruit de mettre un milliard dans le Fonds, ce qui est différent d’un don personnel du chef de l’Etat, comme c’était le cas en 2019 quand il a offert le milliard pour faciliter le départ à la Mecque des pèlerins camerounais.

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