Vivre ensemble : Que se passe-t-il dans la région du Sud ?
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Depuis les fâcheux événements de Sangmélima et le meeting du Mrc interdit à Ebolowa, cette unité administrative alimente les débats.

Du mercredi, 09 au jeudi, 10 octobre 2019, la ville de Sangmélima, département du Dja et Lobo, région du Sud, a été au centre d’une actualité brûlante. La population locale s’en est violemment prise aux autres communautés de la localité. Des membres de la communauté Bamoun ont ainsi décidé de quitter la ville. Des familles entières. Hommes, femmes et enfants. Comme bagages, des motos, et matelas et plusieurs valises. Ces départs massifs ayant surtout été constatés dans la journée du samedi 12 octobre et celle du dimanche 13 octobre en matinée.

A en croire Aboubakar Mbouobouo, chef de la communauté bamoun à Sangmélima, « d’autres départs étaient encore en vue ». Et ce, en dépit de l’appel à la paix lancé samedi matin, 12 octobre 2019 par Louis Paul Motaze, élite du Dja et Lobo qui a tenu une réunion en sa résidence avec les leaders de la communauté bamoun pour les rassurer quant à leur sécurité à Sangmélima. Une sécurité du moins renforcée depuis jeudi, 10 octobre 2019, deuxième jour des émeutes avec un renfort venu de Yaoundé et Ebolowa pour sécuriser les personnes et les biens. A leur arrivée dans la ville, les forces de sécurité ont levé des barricades dans la ville et se sont interposées entre les deux communautés en conflit qui se regardaient en chiens de faïence.

Dans les quartiers, au marché central et dans plusieurs carrefours, des patrouilles ont été permanentes. La ville a été bouclée et il fallait montrer patte blanche pour se déplacer. Au sein de la population, l’on sentait encore de l’électricité dans l’air, notamment dans les conversations. Samedi, 12 octobre 2019 au marché central, l’on pouvait encore voir plusieurs magasins pillés ou vandalisés. A la boutique de Mbouobouo Aboubakar, en face du poste de police, le deuil. Le chef de la communauté bamoun évaluait les pertes et ne cessait de secouer la tête, « qu’est-ce que moi j’ai fait à ces gens ? Ne suis-je pas aussi un fils de Sangmélima ? Plus de 20 ans que je vis ici ? », Se lamentait-til.

A l’entrée du marché central, l’impact du feu. Comme s’il y’avait eu incendie à cet endroit. Parlant du bilan, Saïdouna Ali, sous-préfet de l’arrondissement de Sangmélima informait vendredi, 11 octobre 2019 que, « c’est jeudi, 10 octobre 2019 que les choses dégénèrent. La communauté allogène informée que les boutiques sont en train d’être pillées, opèrent une déferlante vers le marché central ». L’autorité administrative ajoutait que, « les deux groupes se regardaient déjà en chiens de faïence et étaient déjà prêts aux affrontements plus sanglants. Grâce à la ceinture de sécurité mise sur pied, le pire a été évité. Les deux parties ont été contenues et le calme est revenu dans l’après-midi du 10 octobre 2019 ». Le sous-préfet de l’arrondissement fait en outre savoir que, « quelques dégâts ont été observés au plan humain et au plan matériel. Au plan humain, il convient de le dire de manière forte, aucune perte en vie humaine n’a été enregistrée.

Quelques cas de blessures ont été enregistrés. Toujours selon Saïdouna Ali, « au plan matériel, la journée du 09 octobre 2019 a permis de constater que huit magasins de commerce ont été victimes de dégâts. Et la journée du 10 octobre a connu beaucoup plus de dégâts au niveau du marché central que dans certains quartiers de la ville ». Une commission d’indemnisation a été mise sur pied par Félix Nguélé Nguélé, gouverneur de la région du Sud. Et Haman Koulbout, le préfet du département du Dja et Lobo de mettre en garde, « pour ceux qui ont posé des actes répréhensibles, les autorités judiciaires vont faire leur travail ».

Le 23 octobre 2019, le Mouvement pour la renaissance du Cameroun (Mrc) obtient une autorisation de manifestation publique du sous-préfet d’Ebolowa 2. Ceci, en vue de son meeting à Ebolowa, le vendredi, 1er novembre 2019. Ayant eu vent du projet de meeting du Mrc à Ebolowa, le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc) décide de contrer le projet du parti de Maurice Kamto en sollicitant à son tour du même sous-préfet de l’arrondissement d’Ebolowa 2, l’autorisation de manifestation publique sur le même lieu, le même jour et à la même heure. C’est alors qu’André Francis Obam, souspréfet d’Ebolowa 2 décide le 28 octobre 2019, d’interdire les manifestations publiques programmées par les deux partis politiques pour, « menace de trouble à l’ordre public (tensions, provocations et affrontements entre les deux camps) ».

Manipulations

Ces tensions sociopolitiques reflètent-elles la réalité quotidienne des habitants de la région du Sud ? Maurice Kenne, commerçant à Ebolowa répond par la négative. Pour le ressortissant du département des Bamboutos, région de l’Ouest Cameroun, « ce sont des soubresauts qu’on l’on observe toujours à l’approche d’une échéance électorale. L’on a l’impression que certaines personnes tirent les ficelles dans l’ombre et les jeunes pour la plupart désoeuvrés se laissent manipuler ». Un avis également partagé par Bernard Amougou, sénateur de la Mvila. Le portail des camerounais de Belgique. Le chef de la délégation permanente départementale du comité central du Rdpc pour la Mvila pense en effet, « qu’il y’a des gens tapis dans l’ombre qui droguent les jeunes et ces derniers se laissent aller à des débordements ». Pour François Deffo, un autre commerçant basé à Ebolowa, « je n’éprouve aucune difficulté de cohabitation avec mes frères du Sud. Je suis originaire de la région de l’Ouest, mais je suis né ici à Ebolowa, j’ai fait mes études dans cette ville et j’ai pris pour épouse une fille d’Ebolowa.

J’y suis à l’aise. Je trouve la population locale très hospitalière. J’ai pu acquérir un lopin de terre et je mène mes activités sans difficultés ». Pour Etienne Tanefo, chef de la communauté bamboutos et représentant du chef de la communauté de l’Ouest dans le Dja et Lobo, « nous sommes établis à Sangmélima depuis de longues dates. Nous vivons en parfaite harmonie avec les autres communautés et mêmes, certains d’entre nous avons pris femmes parmi les filles bulu et de ces unions sont nés plusieurs enfants ». André Abossolo, enseignant dans la ville d’Ambam dans le département de la Vallée du Ntem fait remarquer que, « l’homme du Sud a toujours eu une coexistence pacifique avec les autres Camerounais venus d’ailleurs, le seul problème qui se pose et qui peut se poser partout dans la République lorsque vous êtes étranger c’est de respecter la population autochtone. En d’autres termes, vivre en harmonie avec les populations qui vous accueillent dans la paix et la concorde ». L’enseignant ajoute, « il faut éviter de poser des actes susceptibles de vous mettre en conflit avec la population locale. Genre, agression, viol, meurtre, vol, mépris, arrogance ».

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