Vision : Comment Biya voit le Cameroun dans 10 ans
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Vision : Comment Biya voit le Cameroun dans 10 ans :: CAMEROON

Le président est resté évasif dans sa réponse à la question qui lui a été posée dimanche dernier.

Avant ce dimanche 20 mars 2016, on était déjà à 8 mois et 18 jours sans la moindre déclaration du président Paul Biya faite à la presse à partir du Cameroun. Son dernier échange avec les journalistes à Yaoundé remontait au 3 juillet 2015 alors qu’il recevait son homologue français François Hollande. Le silence a donc été rompu ce dimanche devant les micros et les cameras à l’aéroport international de Yaoundé Nsimalen où Paul Biya est venu raccompagner le président italien, Sergio Mattarella, au terme d’une visite de quatre jours au Cameroun.

Les deux seules questions posées au président camerounais l’ont été par un journaliste italien ; puis le propos présidentiel a simplement été repris par la presse locale. Il y a eu la sempiternelle question sur les « impressions », question, qui dans la technique journalistique, permet à l’intervieweur de mettre l’interviewé dans de bonnes dispositions d’esprit. La question suivante était donc celle sur laquelle le président Biya était attendu. Il lui a été demandé comment sera le Cameroun dans 10 ans. Et telle a été réponse : « Je ne suis pas prophète, mais ce sera certainement un pays plus développé et qui sera encore plus engagé avec l’Union européenne et l’Italie en particulier. » Sans plus.

Une réponse brève qui portait pourtant sur la vision d’un homme ayant amorcé sa 34ème année à la tête de l’Etat. D’abord il y a eu de quoi s’inquiéter en entendant le président dire « je ne suis pas prophète », lui qui doit quand même savoir où va le pays. Il est arrivé aux affaires en 1962, 20 ans avant son accession à la magistrature suprême. Ensuite, le président a continué son propos sans tenir le langage d’un homme qui est sur la fin, lui qui a fêté ses 83 ans, au moment où des militants de son parti lui demandent de briguer un énième mandat. En tout cas, il n’a guère dit que le Cameroun des 10 prochaines années se fera avec un autre président. Enfin, la réponse du président manque globalement d’éléments concrets sur cet avenir du Cameroun. Le discours de Paul Biya est resté évasif, sans un encrage sur des données réelles.

Stratégie pour la croissance et l’emploi

C’est à se demander si le président maîtrise les dossiers de la République, car une vision sur 10 ans existe bel et bien. Elle est contenue dans le Document de stratégie pour la croissance et l’emploi (Dsce) que le président n’a même pas mentionné. Le contenu de ce document indique qu’il s’agit de la boussole de l’action gouvernementale en vue de l’émergence du Cameroun à l’horizon 2035. Et dire que cette boussole a été conçue sous « la très haute impulsion du président de la République dans l’optique de poursuivre son projet de société des Grandes Ambitions ».

Mis enoeuvre depuis 2010, le Dsce décrit les étapes par lesquelles le Cameroun devra passer pour atteindre l’émergence. La question posée au président Biya touchait directement à la période 2015-2025. Sur 10 ans donc le Cameroun doit réaliser un taux de croissance annuel compris entre 9% et 10%. Certes le cap de 6% n’a pas encore été franchi, mais cet objectif est un axe de réponse qui aurait pu inspirer le chef de l’Etat. Plus globalement, la vision de développement du Cameroun à l’horizon 2035 se résume dans cette formule contenue dans le Dsce : « le Cameroun : un pays émergent, démocratique et uni dans sa diversité ».

Forcément, les prémices doivent être visibles dès 2025. Il s’agit des bases déjà posées pour une économie dominée par le secteur industriel en général et manufacturier en particulier, un pays qui exporte et est intégré dans le commerce mondial. Un pays où la pauvreté a nettement reculé et le revenu par habitant s’est considérablement accru. Un Etat démocratique avec des institutions stables et la séparation effective des pouvoirs, où la justice est indépendante ; un Etat qui tire son autorité de la légitimité populaire, qui permet le développement social ainsi que les libertés collectives et individuelles, avec une administration décentralisée.

Un Cameroun où les comportements individuels et collectifs sont fondés sur les valeurs suivantes : cohésion, solidarité, intégrité, travail et fierté. Une société camerounaise qui fonctionne sur la base de la concertation, le dialogue, la tolérance, le respect mutuel, le recours à la médiation ou à la justice. C’est en tout cas ce que prévoit le Dsce. Ce document et le cap qu’il au Cameroun ont déjà inspiré bien de discours et de publications.

Dans cette galaxie livresque, il y a l’ouvrage collectif paru en 2014 aux Editions Clé, sous la direction du président du Groupement inter-patronal du Cameroun, André Fotso, et du Pr Roger Tsafack Nanfosso, économiste chevronné. Le livre est intitulé : « 100 propositions du Gicam pour l'émergence du Cameroun ». Les éléments de langage sont ce qui manquait le moins au président de la République.

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