CBC : L’administrateur provisoire au coeur d’un détournement
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Selon la Cobac, Martin Luther Njanga Njoh s’est octroyé des avantages astronomiques.

La Commission bancaire de l’Afrique centrale (Cobac) aura, à l’occasion de sa session ordinaire prévue ce 11 décembre 2015 à Libreville (Gabon), un gros morceau sur sa table. Pas qu’elle ne connaisse pas le menu, mais le plat s’est davantage épicé au fil des accommodations. Elle aura plutôt à choisir, entre l’affirmation de son autorité de garant de l’éthique financière dans la sousrégion et les petits arrangements entre copains, autour du processus de restructuration de la Commercial Bank of Cameroon (CBC) qui a pris de l’élasticité et, surtout, charrie toutes sortes d’appétits et de dilatoires. Le 30 janvier 2015 en effet, le président de la Cobac, Lucas Abaga Nchama, s’émouvait lourdement quant à l’«évolution de la situation de CBC».

Dans une lettre sans fards au ministre camerounais des Finances (Minfi), Alamine Ousmane Mey, le non moins gouverneur de la Banque des Etats de l’Afrique centrale (Beac) constatait qu’à l’issue de l’assemblée générale mixte des actionnaires convoquée par l’administrateur provisoire de la CBC, Martin Luther Njanga Njoh, «l’Etat n’a toujours pas désigné ses représentants au conseil d’administration, qui à son tour devrait désigner les membres de la direction générale». M. Abaga Nchama, après avoir rappelé que la fin de la restructuration de la banque camerounaise était fixée au 31 décembre 2014 camer.be, après avoir instamment demandé au Minfi «de bien vouloir user de [son] autorité pour faire avancer ce dossier», y était allé d’une menace à peine voilée : «La période de restructuration étant achevée sans que CBC respecte la règlementation prudentielle, je soumettrai ce dossier à l’appréciation de la Commission bancaire qui en tirera toutes les conséquences malgré les énormes efforts consentis par l’Etat.»

Mais rien ne semble avoir bougé depuis près d’un an. Plutôt, en octobre d’avant, le ministre des Finances Alamine Ousmane Mey avait prorogé pour la 6ème fois le mandat de l’administrateur provisoire de la CBC, d’ailleurs toujours en cours. Les prémices de cet imbroglio bancaire se dessinaient déjà dès la mise de la CBC sous administration provisoire, en 2009, alors que l’établissement financier accusait pourtant un déficit en fonds propres. A l’époque, l’actionnaire majoritaire Yves Michel Fotso jugeait que la mesure visait à le dépouiller de sa banque face aux refus des autorités et de l’administrateur provisoire d’entériner les offres de rachat ou d’entrée dans le capital de la CBC à eux soumis par des repreneurs de renom. «Il n’est pas difficile de comprendre que ma personne est la réelle cible de la spoliation des actionnaires historiques et majoritaires de la CBC», avait-il alors indiqué à Jeune Afrique.

Le 9 avril 2014, cette institution invitait l’administrateur provisoire à «faire aboutir dans les délais fixés, soit au 30 juin 2014, le processus de restructuration et à convoquer aussitôt que possible une assemblée générale en vue de la formation du conseil d’administration qui, après la procédure d’information préalable à la Cobac, procédera à la nomination d’un directeur général et d’un directeur général adjoint».

DÉTOURNEMENTS SOUS FORME DE TROP PERÇU

Non seulement la logique de dépossession reste de mise, mais en plus, Martin Luther Njanga Njoh semble avoir pris un titre foncier définitif à la CBC. Et l’homme ne se refuse rien, pour dire le moins. Il s’est ainsi octroyé des avantages astronomiques selon la Cobac, un trop perçu qu’une mission de contrôle de cette institution a évalué à 108 millions de francs au 31 octobre 2013. Dans la même correspondance du 9 avril 2014, Lucas Abaga Nchama engageait Martin Luther Njanga Njoh «à procéder, sans délai, au remboursement de toutes les sommes qui lui ont été versées au titre de sa rémunération en dehors de celles expressément visées dans la décision Cobac fixant celle-ci», et qui date du 2 novembre 2009.

En réponse à cette injonction, l’administrateur provisoire de la CBC justifiera le réajustement unilatéral de sa rémunération par «un surcroît de travail et de responsabilité », invoquant «une conjugaison à la fois de la décision du gouverneur, du contrat de travail et des règles internes en vigueur». Il s’appuiera, de surcroît, sur le fait que la décision du gouverneur sus-indiquée n’a pas respecté la formule consacrée, qui «annule et remplace toute disposition antérieure en la matière camer.be». Le gendarme de l’autorité bancaire de l’Afrique centrale était revenu à la charge le 9 juin suivant. Pour rappeler que la mise sous administration provisoire suspendait automatiquement les contrats des dirigeants et les mandats des administrateurs. Sans plus de résultats. Il convient de rappeler que, en tant qu’administrateur provisoire, Martin Luther Njanga Njoh, qui au passage avait été directeur général de la même banque, bénéficie, selon une décision de la Cobac datée du 15 février 2010, d’un forfait mensuel de communications téléphoniques, d’un véhicule de fonction, d’indemnités de mission, de l’acquittement aux frais de scolarité de ses enfants ainsi que de certaines charges domestiques supportées par la CBC.

Une autre injonction à rembourser le trop perçu a été servie au même administrateur provisoire depuis le 12 mars 2015, «après de nombreuses correspondances à caractère litigieux». Les sommes en jeu doivent avoir explosé à ce jour. Après l’interminable partie de ping-pong, la Cobac devrait finalement se décider à frapper avec vigueur cette semaine pas seulement sur les avantages indus et non remboursés de M. Njanga Njoh, mais aussi au sujet d’une administration provisoire plus que jamais sur les braises.

© L’Oeil du Sahel : DOUWORÉ OUSMANE

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