Rapport de la Commission Mixte Franco-Camerounaise: Éclairage sur le cas spécifique de Jean Mbouendé
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Rapport de la Commission Mixte Franco-Camerounaise: Éclairage sur le cas spécifique de Jean Mbouendé :: CAMEROON

Décryptage du Rapport de la Commission Mixte Franco-Camerounaise sur le rôle et l’engagement de la France dans la lutte contre les mouvements indépendantistes et d’opposition au Cameroun de 1945 à 1971 : Éclairage sur le cas spécifique de Jean Mbouendé
 
En juillet 2022 à Yaoundé, le président français Emmanuel Macron annonçait la création d’une commission mixte franco-camerounaise  sur le rôle et l’engagement de la France dans la lutte contre les mouvements indépendantistes et d’opposition au Cameroun de 1945 à 1971.

La famille Mbouendé, par l’entremise du gardien de la mémoire de Jean Mbouendé, en la personne de Clément W. MBOUENDEU va immédiatement saisir la balle au bon en préparant un mémoire retraçant le rôle joué par le nationaliste et ses partisans dans cette bataille, et les atrocités subies . Cette correspondance, qui sollicitait une reconnaissance de ces méfaits par la France Officielle et une juste réparation de sa part sera envoyée au président Macron le 03 mars 2023, par lettre recommandée, avec copies respectivement au président Paul Biya, à l’ambassade de France au Cameroun et au Secrétaire Général de l’ONU. Le même jour, les travaux de la commission sont lancés à Yaoundé.

Certains illustres médias, informés par cette démarche patriotique de la famille Mbouendé, vont porter la cause en relayant l’information au maximum. Il s’agit de Forum Libre, Forum Libre International, La Nouvelle Expression, Le Messager, la Radio et la Télévision Équinoxe, la radio et la télévision Balafon, Jmtv+ à Paris.
La communication a fait son effet. Un an après, la commission mixte entre en contact avec Clément W. MBOUENDEU et concorde avec lui pour une séance de travail le 22 mars 2024 sur Jean Mbouendé.

Le jour dit, la commission est chez Jean Mbouendé à Banka , conduite par le professeur Noumbissié Tchouké et le docteur Cyril Kenfack. Le travail, qui était prévu pour une journée, se poursuivra le 25 mars 2024 parce qu’il y’avait du grain à moudre, à travers témoignages et ouverture des archives privées de la famille, en présence d’une demi-dizaine des membres du Cercle des Élites Intérieures du Haut-Nkam et de Mbouendé Siewé André.

La commission partira pour continuer les investigations ailleurs, satisfaite par la qualité des échanges, hautement scientifiques.

Le 21 janvier 2025, la restitution du rapport a eu lieu au palais de l’Élysée en France, suivie d’une séance similaire au palais de l’Unité à Yaoundé le 28 janvier 2025.

Le rapport a alors tenu compte du rôle joué par Jean Mbouendé en tant que syndicaliste, leader du spp et de l’upc dans la subdivision de Bafang pour la mobilisation anticolonialiste, son rôle pour la réunification du Cameroun et les atrocités qu’il a subies en tant qu’acteur de premier plan.

Décryptage du rapport concernant Jean Mbouendé

1- À la page 16, la commission dit merci à la famille Mbouendé pour le temoignage du gardien de la mémoire et de la mise à sa disposition des archives privées de Jean Mbouendé, soit 43 documents parmi lesquels ceux retraçant les atrocités subies par certains de ses camarades de lutte.

2- Les pionniers et les relais.

Les pages 122 et 123 parlent de l’implantation de l’Upc en pays bamiléké en ces termes :
« Si l’upc réussit à s’implanter, c’est parce qu’elle a bénéficié de l’effort des pionniers dans la contestation de l’ordre colonial, et d’initiatives de nature syndicale ou associative. Il y’a entre autres Jean Mbouendé qui rejoint l’upc, entraînant avec lui les membres de son syndicat, celui des petits planteurs. Il y’a aussi Djoumessi Mathias qui rejoint également l’upc fin 1948, avec le Kumzse qu’il a fondé comme déjà précédemment évoqué.

Les statuts du syndicat des Petits Planteurs(spp) sont déposés en mars 1946 par Saitapoum Happi, Jean Mbouendé de Bafang et Tétanfak Laurent de Dschang dans une région marquée par une sociologie des travailleurs spécifique, entre salariés agricoles et markets boys…….Les leaders du spp récemment créé et encadrés par Ruben Um Nyobé et Charles Assalé, deux personnalités syndicales au niveau national de l’union des syndicats Confédérés du Cameroun(uscc-cgt), Jean Baptiste Saitapoum Happi et Jean Mbouendé prennent les rênes du premier syndicat de la région bamiléké à Bafang. Les pressions administratives très fortes ont bientôt raison de l’engagement de Saitapoum Happi qui quitte ses fonctions de secrétaire général après s’être largement consacré à la mise en place du syndicat. Cette démission, loin d’entamer la détermination des autres responsables, la renforce à l’instar de Jean Mbouendé qui maintient son engagement et se consacre à la tête du syndicat à mobiliser les populations contre les pratiques coloniales.

La première  section de l’upc de l’ouest  est ainsi créée à Bafang le 30 juin 1948. Elle est donc dirigée  par Jean Mbouendé, ancien cadre du spp, qui vient de passer plusieurs mois en prison pour activités syndicales ( du 01er septembre 1947 au 15 avril 1948). Les membres du spp adhérent en nombre au mouvement politique. Selon Jean Mbouendé, ils n'établissent pas une véritable distinction entre le syndicat et le mouvement politique naissant , car le nouveau parti, autant que le spp, ont pour but de défendre leurs droits. Faute de pouvoir trouver un remplaçant à la tête du syndicat, celui-ci est dissous au profit du nouveau mouvement qui porte tous les espoirs. En suivant les réseaux mis en place pour le syndicat, Jean Mbouendé implante l’upc dans toute la subdivision de Bafang. 

En parcourant les villages et les quartiers, son équipe collecte les plaintes des populations et encourage celles-ci à rédiger les pétitions à adresser à l’onu. Sur le terrain en dehors de l’administration coloniale qui multiplie les obstacles à l’évolution  de l’Upc, Jean Mbouendé est confronté à l’hostilité du mouvement pro-francais de l’Union Bamiléké dirigé par Nintcheu Tientcheu , un natif de Bafang…. »

Il faut corriger ici pour dire que :

- Le premier comité central(à l’époque on ne parlait pas de section) de l’Upc au Cameroun est implanté à Banka-Bafang le 30 juin 1948, immédiatement après la légalisation du parti le même mois ;
- L’Union Bamiléké était dirigée par le chef Bandjoun Kamga Joseph, Nintcheu Tientcheu, prince Banka n’était que le secrétaire general ;

Il faut ajouter ceci pour bien comprendre :
- Jean Mbouendé mène seul la lutte contre le pouvoir colonial qui interdisait la vulgarisation de la caféier-culture, de 1934 à 1946. La nouvelle de ce combat va se propager au niveau national et cest Saitapoum Happi, prince Bana et frère d’une des épouse de Jean Mbouendé, la princesse Makamdoum, qui servira d’éclaireur pour conduire Charles Assalé, secrétaire général de l’uscc-cgt à Bafang pour voir Jean Mbouendé, et c’est celui-ci qui va conseiller à Jean Mbouendé de créer un syndicat pour défendre la profession, et de l'affilier à l’uscc-cgt. Le principe est acquis, le syndicat est créé avec Jean Mbouendé, non scolarisé, comme président et Saitapoum, intellectuel prendra le secrétariat général. Il sera remplacé par Nitcheu Paul après sa démission ;

- L’incarcération arbitraire de Jean Mbouendé du 01er septembre 1947 au 15 avril 1948 lui a coûté des pertes enormes et multiples :
* sa mère Anne Monga et son premier enfant garçon Joseph sont morts d’avc suite à cette situation ;
* La perte dun cheptel de près de 1 000 bœufs et la disparition des stocks de kola disséminés dans les marchés du grand nord.
- Devenu secrétaire général de l’uscc-cgt en 1947 et étant allé à Bafang lui-même s’enquérir du cas d’arrestation de Jean Mbouendé en septembrz 1947, Um Nyobé porte l’affaire au niveau international au point où la Cgt dépêche depuis  Paris un avocat , maître Blond Fermier pour venir défendre Jean Mbouendé au Cameroun.
C’est donc ce Jean Mbouendé qui introduit Um Nyobé auprès de Djoumessi Mathias qui rallie son association le Kumzse à l’upc avant d’abandonner le combat plus tard, retourné par l’administration.

En 1950, un prêt de 4 000 000 francs métropolitains est accordé à Jean Mbouendé par une banque française située à Clermont-Ferrand en France. L’argent arrive au Cameroun et le Haut-Commissaire, Soucadeaux, refuse de lui délivrer une autorisation d’hypothèque sous prétexte que Jean Mbouendé est subversif.
L’argent est retourné en France, mais entre temps, Jean Mbouendé avait versé un fond de souscription et commencé aussi à rembourser.

La France coloniale va confisquer même ces avances et ce n’est que la résolution n°1334 du conseil de tutelle de l’onu du 15 juillet 1955, saisi par Jean Mbouendé, qui va contraindre la métropole à rembourser. 30% sera envoyé à Jean Mbouendé sans intérês de retard, 70% restant attendu jusqu’à ce jour.

3- La note de bas de page n°32 en page 174  fait référence à la biographie de Jean Mbouendé « Pour la Patrie, Contre l’Arbitraire » page 50 pour confirmer l’incendie des drapeaux de l'onu ramènés de New-York et stockés au siège de l’upc à Douala en 1955.
 
4- Les évènements de mai 1955

Le rapport dit ceci à la page 184 :« …Le 29 mai, le scénario se répète à Bafang : les anti-upecistes, chefs et notables mettent à sac les maisons de Jean Mbouendé, président de section upc et syndicaliste : informé par d’autres chefs, ce dernier s’était déjà réfugié  dans ses plantations à Kékem ».
Ici on renvoie à la note de bas de page n°118 qui fait référence à l'autobiographie de Jean Mbouendé « Pour la Patrie, Contre l’arbitraire »pages 51 à 56 et à l’entretien avec  Clément Wensileudjam, fils de Jean Mbouendé, réalisé par le volet « Recherche » de la commission le 22 mars 2024.

On peut aussi préciser que :

- les chefs Babouantou Moungoué Michel et Banfeko Datchoua Marcel sont ceux qui ont inspiré Jean Mbouendé de s’éclipser ;
- Le chef Banka Tientcheu Michel a organisé un stratagème pour éloigner les ravisseur et c’est son fils Nitcheu qui a fait échec à la démarche ;
- Les chefs Bangangté Njike, Bangou, Kemayou Bernard et Bandenkop, Fezeu ont renoncé de prendre part à la destruction du patrimoine Mbouendé. Les deux derniers, encore jeunes sont devenus la risée du pouvoir colonial depuis cette date et cela a eu pour conséquence de les contraindre à l’exil.
- Les maisons de certains proches et camarades de lutte de Jean Mbouende ont également été détruites ce jour fatidique. : Youmbi Michel qui va mourir en exil au Nigeria après, Nitcheu Paul, Nitcheu Bernard …. Pour ne citer qu’eux.

 A suivre…..

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