Chercheurs d'emplois : L’arnaque tisse sa toile
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Le phénomène prospère à cause de l'ignorance des requérants et de l'opacité entretenue dans le processus de recrutement dans les entreprises.

Comme le vers dans un fruit, des cybercriminels sont installés sur la toile. Tapis dans l’ombre derrière leur écran d’ordinateur, ils séduisent par des offres d’emplois alléchantes. Celles-ci concernent aussi bien les sociétés d'Etat que des entreprises privées basées au Cameroun ou en dehors. Morceau choisi: « Avis de recrutement XX Canada 2020. Bienvenue à la grande société XX international XX Compagny. Le service personnel de (XX Canada) est aujourd’hui à la recherche de personnels expérimentés dans domaines suivants : contrôle de gestion, expertise comptable… ».

L’avis s’achève de manière fort flatteuse. « XX ouvre ses portes pour vous ». Plus bas : la constitution du dossier, les contacts, et surtout le numéro de compte bancaire et le nom du responsable. Ne vous y fiez pas, avertit la consultante à RH Process et Com, Jenny Njip. « Dans une démarche de recherche d’emploi, il est important pour les jeunes de savoir que c’est une activité sérieuse et à temps plein. Aussi, il faut s’informer auprès des entreprises auprès desquelles ils sollicitent les opportunités, sans se limiter au digital. D’où l’intérêt de connaître les différents moyens et outils de recherche. De ce fait, avant de postuler, il est nécessaire de se rassurer de correspondre à un minimum profil recherché, en évitant de se précipiter à postuler à toute offre sans quelques curiosités ».

Ce conseil d'experte arrive trop tard pour certains. En effet, ces loups de la cybercriminalité aux visages d’agneaux ont déjà mordu plus d’un et n’entendent pas s’y arrêter. « J’ai vu une annonce de recrutement d’une société bancaire sur internet. J’ai décidé de postuler. Après avoir déposé le dossier et une somme de 20 000 Fcfa. Je suis tombé sur un communiqué de la structure déclinant tout recrutement. J’essaie de recontacter le numéro chez qui j’ai fait le dépôt, il ne passe plus », relate Clément N.. Pour sa part, une institutrice qui a requis l’anonymat est aussi tombée dans les filets de ces faux recruteurs.

« Mon histoire, faitelle savoir, remonte au mois de mai finissant. Je rencontre mon cousin, un député originaire de la région du Centre. Je lui présente ma situation à savoir que je suis diplômée des Ecoles normales des instituteurs de l’enseignement général [Enieg], promotion 2011. Depuis près de 10 ans j’essaie en vain d’avoir une intégration. C’est ainsi qu’il me propose de déposer un dossier aux Aéroports du Cameroun (Adc) et me file un contact. Je dépose le dossier en ligne, eu égard des risques liés au coronavirus.

Par la suite, je fais un dépôt d’une somme de 26 600 Fcfa au contact que l’honorable m’a donné. Deux jours plus tard, le même numéro m’appelle et me demande si je possède un passeport. Non, ai-je répondu. Il me dit de lui verser une somme de 160 000 Fcfa et m’apprêter pour un entretien d'embauche dans deux jours ». Vérification faite, poursuit la dame arnaquée, il n’y avait aucun recrutement aux Adc. Depuis lors j’appelle le numéro de ce « responsable des Adc », il sonne dans le vide. Des témoignages comme ceux sus-évoqués sont légion. Ils se suivent, mais ne se ressemblent pas. « J’ai deux expériences où j’ai failli me faire prendre. Du moins, j’ai perdu 14 000 Fcfa », révèle un étudiant de l’Université de Yaoundé I.

« Il s’agit des personnes qui m’ont promis du travail. Selon les clauses du contrat, il fallait au préalable une formation pour être recruté. Celle-ci s’élève à 10 000 Fcfa. J’ai payé et suivi la formation, mais ces gens ne m’ont plus jamais contacté ». La seconde expérience, raconte-t-il, « j’ai vu une offre d’emploi affichée au campus [à l’Université de Yaoundé I], j’ai postulé. Les recruteurs m’ont fait savoir qu’il fallait légaliser des documents que j’avais déposés.

Pour plus de diligence, ils ont proposé de le faire à ma place moyennant 4 000 Fcfa. Je leur ai donné l’argent, j’attends toujours leur appel, ce depuis environ 6 ans ». Distinguer une offre d’emploi vraie d’une fausse n’est pourtant pas chose facile, explique Jenny Njip. « Tout est dans les détails, car sur la forme, ce sont souvent des offres « copier-coller ».

En général un bon avis de recrutement donne un minimum d’informations vérifiables (sites internet, réseaux sociaux, email professionnel…) sur l’entreprise et renseigne sur le profil du poste à pourvoir, sans amalgames ni contraires superflus. Et surtout, aucun recrutement n’est payant. Toutefois, avec le phénomène de la cybercriminalité, il faut rester vigilant et s’informer auprès de sources sûres ».

Opacité

Seulement, certaines entreprises et établissements publics, sinon la plupart au Cameroun, sèment eux-mêmes le doute dans l’esprit des chercheurs d’emploi. Celles-ci entretiennent une opacité totale sur les recrutements. Lorsqu’ils leur arrivent de publier des avis d'embauche, c'est généralement deux ou trois jours avant la date de fermeture de dépôt des dossiers du recrutement. Lorsque l’information fuite plus tôt, pour se dédouaner, ces responsables invoquent un faux recrutement, explique un chercheur d’emploi, qui dit parler d'expérience. De vrai-faux recrutements en somme.

Pour éviter tout amalgame, « il est important pour les entreprises de faire une veille informationnelle, à travers un contrôle actif afin de repérer toute information erronée. En outre, il faut qu’elles réagissent à temps, en cas de tentative d’escroquerie, comme le font certaines entreprises qui ont su préserver leur crédibilité et alerter le public sur d’éventuelles tentatives », conseille Jenny Njip.

Le 19 juin dernier, le directeur général du Port autonome de Douala, dans un communiqué, dénonçait ainsi un faux recrutement de 135 gestionnaires de logistique et de transport dans sa structure. « Il s’agit, à n’en point douter, d’une autre vaste opération visant à arnaquer les jeunes Camerounais et leurs parents », décriait Cyrus Ngo’o. Le Dg de la Société camerounaise des dépôts pétroliers (Scdp) a également signé un démenti dans la même veine, il y a quelques jours.

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