Population mondiale : quand donner naissance en Afrique devient un crime
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Population mondiale : quand donner naissance en Afrique devient un crime :: AFRICA

« Nous sommes 7 milliards. Dans 30 ans nous serons 9 milliards. En 2100, demain matin, nous serons 11 milliards et demi. Jamais dans l’histoire de l’humanité il n’y a eu autant d’habitants sur la planète. La première proposition que j’ai voulu faire c’est la création d’un organisme pour suivre la population mondiale, et pour moi le premier défi, qui est défi environnemental, c’est combien d’habitants vont pouvoir habiter sur la planète. Il faut lutter contre le changement climatique, mais la première cause du changement climatique c’est le nombre d’habitants sur la planète.

Le Nigéria va donc passer à 400 millions d’habitants. Lagos, la capitale économique en a 22 millions. Si on ne pose pas la question de la natalité sur le continent africain, de la natalité en Asie ou de la natalité dans un certain nombre de pays, on ne pourra pas protéger les équilibres écologiques. » Ces propos de sont Nicolas Sarkozy, l’ancien président français au cours d’une émission politique il y a 4 ans sur une télévision française.

Accusations

Une partie de la presse française était parmi les voix qui se sont élevés pour s’indigner de ces déclarations, en démontrant même que cet argumentaire était cousu de fil blanc, sans fondement. Le magazine Marianne expliquait par exemple que « la responsabilité humaine dans le réchauffement climatique auquel fait face le monde aujourd’hui – et que Nicolas Sarkozy a donc reconnue sans ambages – est la conséquence, par définition, de son activité… passée, et non future. En l’espèce, de l’explosion de l’émission de gaz à effet de serre (GES), provoquée non pas par la hausse démographique dans les pays en voie de développement mais par l’explosion industrielle des pays qui se sont développés.

Ainsi, souligne le Giec (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat), “les émissions des six gaz à effet de serre couverts par le protocole de Kyoto ont augmenté de 80% depuis 1970 et de 30% depuis 1990”. Et la principale cause de ces émissions de Gaz à effet de serre est la production d’énergie (25%). Or, toujours aujourd’hui, les chiffres d’émission de gaz à effet de serre dus à la production d’énergie rapportée au nombre d’habitants ne pointent pas du tout la responsabilité de l’Afrique. Arrivent largement en tête les “Etats-Unis d’Amérique”, puis… l’Union européenne.

Par conséquent, quand Nicolas Sarkozy affirme que “la première cause de la dégradation de notre environnement c’est l’explosion de la population”, c’est faux. Et quand il affirme qu’en luttant contre les émissions de gaz à effet de serre dans les pays développés, “nous travaillons sur les conséquences et pas sur la cause” du réchauffement climatique actuel, il a encore faux. Le magazine concluait cette analyse en disant que Nicolas Sarkozy était en train « d’appliquer à l’Afrique une double peine : celle d’avoir vu le monde se développer en grande partie à ses dépens, et la rendre responsable par-dessus le marché des conséquences néfastes de ce développement qui l’a laissée pour compte. »

L’accouchement incriminé

Après Sarkozy, son successeur à l’Elysée Emmanuel Macron ne s’est pas écarté de cette idée, avec ses propres mots et méthodes. Au cours d’une conférence de presse en marge du sommet du G20 en juillet 2017, il avait déclaré que «le défi de l’Afrique (…) est civilisationnel. Quand des pays ont encore aujourd’hui sept à huit enfants par femme, vous pouvez décider d’y dépenser des milliards d’euros, vous ne stabiliserez rien.» Au mois de novembre de la même année 2017, lors d’un échange avec des étudiants burkinabè, Emmanuel Macron avait justifié ses multiples prises de parole sur ce sujet en faisant le lien avec la question migratoire. «J’ai un souci partagé, comme tous les dirigeants africains l’ont, je l’ai partagé parce que le sujet des migrations en Afrique me concerne. Parce qu’il finit aussi en Europe et ça concerne mes concitoyens donc j’ai le droit d’en parler.»

D’après le magazine Paris Match dans son édition en ligne du 5 juillet 2018, les deux présidents avaient longuement échangé sur ce sujet de la démographie en Afrique au début du mandat d’Emmanuel Macron, et Nicolas Sarkozy y voyait un défi essentiel, et avait expliqué dans Le Point en août 2016 «La civilisation européenne se sent devenue minoritaire. La démographie fait l’Histoire, et non le contraire. Voici ce qui explique notamment les interrogations européennes. L’axe du monde est clairement passé vers l’Afrique et l’Asie. Il nous faut réagir, ou on disparaîtra». Dans les différentes sorties d’Emmanuel Macron, on peut également ramasser pêle-mêle des phrases comme « la démographie africaine est une véritable bombe, il faut bien le dire», prononcée sur BFMTV le 15 avril 2018, ou «ne pas en parler, c’est irresponsable» comme il avait dit devant les étudiants burkinabè à Ouagadougou.

Le prétexte tout trouvé

Il est évident donc, la croissance démographique en Afrique est de plus en plus un problème pour l’Occident, et les dirigeants le font savoir, d’une manière ou d’une autre, et à toutes les occasions. Si ça se dit tout haut aujourd’hui, c’est que cela a été longtemps discuté tout bas dans la chambre. Et il serait naïf de penser qu’ils se limitent à la seule dénonciation, ils ont compris qu’il faut faire quelque chose. A ce sujet, plusieurs politiques ont été mises sur pieds depuis longtemps qui visent non seulement à ralentir la poussée démographique sur le continent noir, mais aussi à réduire le nombre déjà existant.

Nous y reviendrons, mais en attendant, il faut bien se rendre à l’évidence que les diverses accusations sur l’Afrique, du genre « c’est le nombre de leur population qui est responsable du réchauffement climatique, ou que le sous-développement de l’Afrique est corollaire du nombre de sa population, toutes ces accusations n’ont qu’un seul but, se donner une raison pour faire ce qu’ils veulent faire. Comme le dit le proverbe africain : qui veut tuer son chien…l’accuse de rage

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