Atangana Kouna raconte comment il s’est retrouvé au Nigeria
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Il dévoile les raisons pour lesquelles il s’est retrouvé au Nigeria après sa sortie du gouvernement en 2018.

«Si je voulais fuir, je ne laisserais pas tout mon argent dans mes comptes bancaires et ma famille ici ! J’allais à un rendez-vous médical en France. Je n’étais pas sous le coup d’une interdiction de sortie du territoire, ni de poursuites judiciaires.» La personne qui fait cette déclaration s’appelle Basile Atangana Kouna. L’ancien ministre de l’Eau et de l’Energie. Il s’explique devant le Tribunal de première instance (TPI) de Yaoundé centre-administratif sur les supposés faits d’«émigration clandestine». C’était le 3 janvier dernier.

Dans les faits, écarté de la noblesse d’Etat, le 2 mars 2018, six jours plus tard, M. Atangana Kouna se rendait au Nigeria, par la route. Une chasse à l’homme était lancée contre ses proches et lui. Au mépris de l’immunité familiale, selon laquelle une personne ne peut être poursuivie par son parent ou son conjoint, ni contraint de le dénoncer si elle est recherchée, Mme Atangana Kouna était placée en garde à vue dans les cellules du Tribunal criminel spécial (TCS), sommée de montrer la cachette de son mari. De même, son cousin l’abbé Dieudonné Alain Nkodo, le vicaire de la paroisse de Mokolo-Yaoundé était mis aux arrêts. L’intervention musclée de l’archevêque de Yaoundé auprès des autorités permis au prêtre de recouvrer sa liberté.

Le 22 mars 2018, l’ex ministre est cueilli dans un hôtel au Nigeria par les forces de défense et remis aux autorités diplomatiques camerounaises dans ce pays. Il est ramené à Yaoundé manu militari, à bord d’un avion spécial, encerclé par les agents secrets. L’événement avait fait un petit buzz. Une information judiciaire est ouverte au TPI. En fait, le ministère public estime que M. Atangana Kouna était, au moment des faits, interdit de sortie du territoire national et, surtout, poursuivi au TCS. Le 3 avril 2019, le juge d’instruction le renvoi en jugement pour les faits d’«émigration clandestine» et complicité.

Chirugie en France

Pour sa défense, le 3 janvier dernier, M. Atangana Kouna affirme que depuis 2006, chaque mois de mars, il se rendait en France pour y subir une chirurgie. En début d’année 2018, il a adressé une demande de sortie à cet effet au chef de l’Etat. Il est écarté du gouvernement le 2 mars. «J’étais devenu un citoyen ordinaire. Je n’étais plus soumis à l’autorisation de sortie préalable de ma hiérarchie. Pour des raisons de commodité, j’ai choisi la route. Je voulais la discrétion. Je voulais changer de vie, sortir de l’enfer : l’acharnement médiatique.»

Sur le voyage, il raconte avoir fait «un voyage normal» à bord de son véhicule conduit par Jean Baptiste Fouda Belinga, son chauffeur particulier, en compagnie de M. Adam Bladi, son majordome et l’adjudant de gendarmerie Edouard Olivier Sakpam. Excepté le majordome, ses accompagnateurs sont restés à Guider, dans la région du Nord, et ne savaient rien de sa destination finale. Il a été récupéré à la frontière par un ami qui l’a conduit au Nigeria. A chaque poste de contrôle, il présentait ses documents de voyage notamment ses deux passeports : diplomatique et ordinaire ainsi que sa carte nationale d’identité. «Aviez-vous obtenu un visa préalable des autorités nigérianes ?», interroge Me Sack. «Je n’avais pas besoin d’un visa. Nous le savons tous, il y a une convention entre le Cameroun et le Nigeria qui garantit la libre circulation des citoyens. On peut voyager d’un pays à l’autre avec sa CNI. Mes deux passeports et ma CNI sont scellés au greffe du TCS», souligne-t-il.

Evoquant la présence de l’adjudant Sakpam, il indique que c’est l’abbé Nkodo qui l’a convié au voyage pour des raisons de sécurité. Il ne l’avait jamais rencontré auparavant. «N’étant plus ministre, je ne pouvais plus déplacer mon garde du corps. J’ai toujours été entouré. Je ne voulais pas voyager seul.» Le procureur en contre-interrogeant l’ex ministre s’est montré superflu. Aucune pièce accablante versée aux débats pour confondre le mis en cause. «Les témoins ont dit que le véhiculesavait une plaque d’immatriculation militaire. Est-ce que cela ne vous permettait pas d’échapper au contrôle ? Présenter nous vos documents de voyage pour voir les traces du contrôle», interroge-t-il. Le portail des camerounais de Belgique (@camer.be). L’ex ministre va reprendre de manière constante ses précédentes réponses. «Si tout était donc normal, pourquoi faire tous ces tours pour aller en France ?», demande le parquet. «C’était mon choix. Je pouvais aller à pied ! C’était pour me décompresser. Je voulais d’abord rentre visite à un ami au Nigeria. Après la France, je devais ensuite aller en Afrique du Sud», répond l’ex ministre.

Vol de montres

S’agissant de son interpellation, il dit que c’est à cause d’une incompréhension avec les dirigeants de l’hôtel au Nigeria que tout a dégénéré. Il se plaignait du vol de ses «montres de luxe confisquées par un agent de l’hôtel ». Il dit avoir été entendu, une fois, au bureau de Laurent Esso, le Garde des Sceaux, par une équipe d’enquêteurs du TCS comme témoin à la suite d’une dénonciation faite contre lui. Pour sa part, l’adjudant Sakpam, en service à la Sécurité militaire (Semil), déclare qu’il a assurait «une escorte officieuse» à la demande de son ami l’abbé Nkodo. Ils ont effectué le déplacement querellé à bord d’un «4X4 avec des plaques civiles». Il ignorait la prétendue interdiction de sortie du territoire alléguée par l’accusation. Il n’a perçu que 20 mille francs des mains du prêtre. L’abbé Nkodo, M. Belinga et M. Adam Bladi ont quant à eux choisi de garder silence pour leur défense.

A la demande du ministère public, le tribunal a requalifié les faits en ceux d’«émigration clandestine aggravé» à l’égard de M. Atangana Kouna et M. Sakpam du fait de leur statut de «fonctionnaires ». De ce fait, ces derniers encourent désormais une peine de prison de 12 mois maximum. L’affaire revient ce vendredi, 24 janvier, pour le réquisitoire du ministère public. Rappelons, outre la présente affaire, M. Atangana Kouna, écroué à la prison de Kondengui, est poursuivi devant le TCS dans deux affaires de détournement de la somme totale de 3 milliards de francs.

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