Cameroun, Est: Flou sur l’obtention des titres fonciers
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Les observateurs de la gouvernance foncière conseillent de revoir les ordonnances du président de la République, fixant entre autres le régime foncier et la procédure d’expropriation pour cause d’utilité publique.

Le litige foncier qui oppose Albert Tiajio, un homme d’affaires basé à Bertoua et la Communauté urbaine de la localité depuis 2016, met en lumière le flou qui entoure le système d’immatriculation des terres dans cette partie du pays. Le 24 avril 2016, la Communauté urbaine avait mené une opération « coup de force » sur un site querellé devant abriter les travaux de construction de l’hôtel de ville. Avec l’aide d’un bulldozer, la municipalité a ouvert une voie d’accès qui mène à une parcelle avec titre foncier du département du Lom-et-Djerem au quartier Koumé. Albert Tiajio, propriétaire du titre foncier en question et ses occupants, ont tous observé la destruction de la concession. Selon, le secrétaire général de la Communauté urbaine, Dominique Sabolo qui avait personnellement supervisé cette opération, « en 2009, une commission avait fait une descente sur le terrain lorsque le domaine appartenait encore à l’Etat, en vue d’obtenir ce site pour ses réalisations. Et ce n’est qu’en 2010 M. Tiajio brandit son titre foncier». M. Sabolo explique qu’une Déclaration d’utilité publique (Dup), de cette parcelle a été signée en 2014 par l’exministre des Domaines, du Cadastre et des Affaires foncières, Jacqueline Koung à Bessike.

De son côté, Albert Tiajio disait être surpris par l’action de la Cub, au moment où des procédures sont pendantes devant des juridictions et des administrations.

L’obtention frauduleuse des terres, motif pour lequel M. Tiajio était accusé, est monnaie courante dans la ville de Bertoua et ses environs. Selon un responsable à la délégation régionale des Domaines, du Cadastre et des Affaires foncières, des personnes qu’on peut qualifier de « prédateurs fonciers » ont compris que la propriété foncière est une grande source de richesses. Pour se remplir les poches, ces individus arrachent les vastes étendues de terre à vil prix, avec «la complicité des autorités administratives et traditionnelles». Vulnérables, les populations les immatriculent frauduleusement pour les revendre sous forme de morcèlement, sans toutefois respecter les plans cadastraux. « Vous allez constater que dans certains quartiers, il est difficile de créer des routes, parce que les terres ont été vendues anarchiquement », dénonce-t-il.

C’est pour cette raison qu’entre 2005 et 2008, l’actuel gouverneur de la région du Centre, Naseri Paul Bea, alors préfet du département du Lom-et-Djerem, avait constaté qu’au quartier Dja Dombé, en plein cœur de la ville de Bertoua, un même lot d’un lotissement se faisait attribuer à plusieurs personnes. A la délégation régionale de l’Est, l’on soutient que « l’Etat a déjà perdu beaucoup de procès dans des tribunaux, et payé d’énormes sommes aux justiciables, à cause des mauvaises procédures d’immatriculation. Il était donc temps que le ministre prenne cette décision pour voir clair».

Coûts

Dans cette mafia, les coûts pratiqués varient selon les zones. « Actuellement, en zone urbaine à Bertoua, le coût allaient de 5000 Fcfa à 25.000 Fcfa le m2. Or, il y a de cela 04 à 10 ans, le m2 coûtait entre 500 Fcfa et 2000 Fcfa ».

En zone rurale cependant, la situation est exactement le contraire. « Les terres se vendent selon les propriétés et les familles concernées. C’est chacun qui fixe son prix. Il y
a des personnes qui vendent un hectare de forêt à 350.000 Fcfa. D’autres louent l’hectare à 50.000 Fcfa par an», déclare Sa Majesté Philémon Ngouri, chef de troisième degré du village Kouba, situé à 12 kilomètres de Bertoua, sur la route de Garoua-Boulaï. C’est sur cette base qu’un homme d’affaires, très influent dans la ville de Bertoua, est devenu propriété de centaines d’hectares de terres à Kouba et dans les villages voisins que sont Adinkol, Kounté, Moïnam et Boulembé. «Aujourd’hui, cet homme d’affaires a déjà borné tous ses terrains dans les villages suscités. Il a juste donné le droit coutumier ‘nourriture et de vin aux populations’ », conclut le chef de village Kouba. Ce même mode d’obtention des terres est observé à Gbakombo, une grande zone de production agricole située à environ 10 kilomètres de la ville de Bertoua. «Là-bas, plus de 200 hectares de terres sont détenues et mises en valeur par des fonctionnaires et les autorités dont l’obtention des différentes espaces est le résultat des tractations floues avec des imposteurs qui se font passer comme étant propriétaires de ces terres », confie un riverain.

Zones rouges

Selon une source bien introduite à la préfecture de Bertoua, certaines localités sont déjà classées zones rouges où il n’est plus conseillé d’aller chercher une parcelle de terre. Il s’agit de Bonis; Koékong ; de Mandjou, et de Koumé-Koffi, sur la route qui mène à Lom Pangar.

Parlant justement de Lom Pangar, des spéculateurs qui étaient au parfum du projet de construction du barrage réservoir avaient pris l’initiative d’aller occuper des espaces sur le site. Conséquence, au moment du paiement des indemnisations d’un montant total de 1.255.162.120 Fcfa en 2011, ce sont ces « accapareurs » qui ont profité, au détriment des populations autochtones. Les victimes de cette « escroquerie foncière » avaient manifesté leur colère lors de la cérémonie de la pose de la première pierre par le chef de l’Etat, Paul Biya, en août 2012.

Au cours de la semaine du foncier tenue du 21 au 25 janvier dernier au Palais des congrès de Yaoundé, les observateurs de la gouvernance foncière étaient tous unanimes pour régler définitivement  le problème. D’après eux, il faut revoir les ordonnances du président de la République du 06 juillet 1974, fixant respectivement le régime foncier, le régime domanial et la procédure d’expropriation pour cause d’utilité publique et les modalités d’indemnisation. Tout comme les décrets n° 76 du 27 avril 1976, fixant respectivement les conditions d’obtention de titre foncier, les modalités de gestion du domaine national, et les modalités de gestion du domaine privé de l’Etat.

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