REPARATION : Une proviseure fait sanctionner trois ministres
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La chef d’établissement s’opposait, à travers une même procédure judiciaire, aux agissements conjoints des membres du gouvernement en charge des Finances, des Enseignements secondaires et de l’Education de base, qui l’accusaient des faits de «contrefaçon des timbres fiscaux et atteintes aux garanties de l’Etat». La justice lui donne raison.

Proviseur du lycée bilingue de Mimboman, dans la ville de Yaoundé, Mme Belinga Florine a eu gain de cause dans le procès qu’elle a intenté à l’Etat il y a six ans. L’affaire a connu son dénouement le 16 octobre 2018 au Tribunal administratif de Yaoundé. La proviseure attaquait une décision conjointe des ministres en charge des Finances (Minfi), des Enseignements secondaires (Minesec) et de l’Education de base (Minedub), un arrêté daté du 17 août 2011.

Les chefs de ces départements ministériels, avaient pris cet acte conjoint à l’encontre de plusieurs chefs d’établissement d’enseignement secondaire au rang desquels la plaignante. Ces ministres leur imputaient des faits de «contrefaçon des timbres fiscaux et atteintes aux garanties de l’Etat». Les timbres fiscaux querellés avaient été apposés sur des fiches de candidature de leurs élèves postulants aux examens officiels, session 2011. Florine Belinga contestait ces charges.

D’après sa plainte revisitée au cours de l’audience consacrée à l’affaire la semaine dernière, c’est dans un communiqué publié dans les colonnes du quotidien Cameroon tribune du 31 août 2011 que la chef d’établissement a appris qu’elle s’est rendue coupable de présentation auprès de l’Office du Baccalauréat du Cameroun (OBC), du Minesec et du Minedub, de fiches de candidature parsemées de faux timbres. Sans lui donner la possibilité de s’en expliquer, l’arrêté conjoint du 17 août 2011 qui ne lui avait pas encore été communiqué a matérialisé l’accusation et ordonné la réparation du préjudice sous huitaine. Elle avait été sommée de reverser aux services du Minfi, 1,161 million de francs sans préjudice de poursuites pénales.

Recours tardif

L’enseignante qui a comparu devant la barre a déclaré qu’à l’issue de deux séances de travail, plusieurs indications pratiques ont été données aux chefs d’établissement, relatives à l’organisation de la collecte et du reversement des frais de timbres fiscaux, qui devaient figurer sur les fiches de candidature. Selon madame Belinga, il était prévu que les agents des Finances se rendent sur place dans les centres d’examen suivant un calendrier préétabli, afin de procéder sur place au timbrage des fiches de candidature. Seulement, aucun d’eux n’était disposé à effectuer le déplacement.

Le chef d’établissement va alors dépêcher ses collaborateurs à la perception de Yaoundé 5, service du Minfi situé au quartier Nkolmesseng, pour faire procéder audit timbrage. Ce n’est que plusieurs mois après que l’OBC va découvrir la présence de timbres contrefaits sur les fiches présentées par son établissement. Interpellé par le tribunal, le Minesec juge la requête du proviseur irrecevable. L'information claire et nette. L’administration soutient que son recours gracieux préalable a été introduit tardivement.

Ce raisonnement a été balayé d’un revers de main par l’enseignante, qui a pris la peine de rappeler qu’elle a reçu communication de l’arrêté le 31 septembre 2011, date à partir de laquelle les délais prévus par les dispositions de la loi du 29 décembre 2006 fixant l’organisation et le fonctionnement des tribunaux administratifs ont commencé à courir. La plaignante explique que l’acte conjoint ayant donné lieu au communiqué publié par voie de presse un mois plus tôt a violé ses droits à la défense, l’a privé du droit d’exercer le principe du contradictoire et aussi jeté l’opprobre sur sa réputation en ce qu’au plan national et international, elle était désormais perçue comme un «proviseur faussaire».

Pour les divers désagréments et l’inconfort que cette situation lui a fait subir, elle réclamait une compensation de 10 millions de francs. En prononçant ses réquisitions, le magistrat intervenant pour le compte du parquet général a suggéré au tribunal d’annuler l’arrêté conjoint des Minfi, Minesec et Minedub au motif qu’il y a eu violation des droits de la défense. S’agissant du volet relatif à l’indemnisation, le ministère public a décidé de ne pas se prononcer parce que la plaignante n’a pas pu s’expliquer des faits mis à sa charge et donc que l’indemnisation n’est pas fondée de son point de vue. Avis contraire pour le collège des juges, qui a prononcé l’annulation de l’acte querellé et alloué à la plaignante un million de francs en guise de préjudice moral.

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