Cameroun: La ruse en sursis
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« La pièce est jouée !», « acta est fabula ! ». Tel est le titre qui barrait la Une de votre quotidien vendredi dernier. L’histoire nous apprend que cette locution latine annonçait, dans les théâtres romains antiques, la fin de la représentation et le moment pour le public de se retirer.

Après la trépidante phase du contentieux post électoral et l’audience de proclamation des résultats de l’élection présidentielle ce jour par le Conseil constitutionnel, la pièce sera définitivement jouée, du moins toutes les séquences prévues par le législateur camerounais.

Nous ne dirons pas comme Rabelais que « la farce est jouée » parce que le dénouement de cette présidentielle était certes connu à l’avance, à cause de la machinerie politico-juridico-clientéliste autour du président sortant. En effet, les principaux adversaires de Paul Biya s’y sont mis à fond, cassant les codes, secouant les cocotiers, passant des messages clairs ou subliminaux et bougeant les lignes d’un système finalement vermoulu.

Pour certains qui se voyaient déjà au sommet du Graal, snobant les réalités têtues de l’environnement électoral camerounais, la montagne a accouché d’une musaraigne. Mais pour d’autres observateurs, lucides et réalistes, la présidentielle du 7 octobre n’était qu’une étape, un virage à négocier vers le boulevard démocratique que les Camerounais appellent de leurs vœux.

En ce sens, le scrutin sur lequel le rideau sera tiré ce jour a tenu ses promesses. Les Camerounais, dans leur majorité ont repris goût à la politique, et ont plus que par le passé conscience que la République c’est la chose commune et non l’affaire d’un groupuscule d’individus gloutons, arrogants et ivres de leurs privilèges. Le peuple camerounais a gagné en maturité et sait désormais faire la part des choses entre les émotions fugaces et entretenues et les questions qui engagent véritablement le devenir de la nation. Pas surprenant donc que beaucoup de téléspectateurs aient choisi de regarder l’audience du contentieux post électoral au lieu du « match de gala » Malawi-Cameroun.

Mais il ne suffira pas de dire que « rien ne sera plus comme avant » après cette élection. Il faudra que chaque citoyen, chaque parti politique, chaque institution œuvre pour que la vitalité démocratique qui fleurit dans des discours hypocrites se traduise dans les faits. Il faudra que toutes les personnes en âge de voter s’inscrivent massivement sur les listes électorales et votent le jour dit. Pour cela, il est important que tous les partis politiques concourent effectivement à l’expression des suffrages.

Par ailleurs, le temps est venu de toiletter et moderniser notre code électoral, en y retirant tous les éléments conflitogènes. Ce n’est qu’ainsi qu’il peut favoriser l’acceptation des résultats. Il urge également de rendre nos institutions électorales, notamment Elections Cameroon (Elecam) et le Conseil constitutionnel, plus consensuelles, et d’y nommer des Hommes, non pas sortis de la cuisse de Jupiter, mais moins marqués politiquement, moins carriéristes et, partant, moins vulnérables à la sujétion partisane. La tendance ambiante à ruser avec la loi et l’élégance républicaine fait encore, hélas, le lit de victoires aigres-douces.

L’espoir est permis. Si la majorité silencieuse semble disposée à tolérer le triomphe entaché d’irrégularités de Paul Biya, sur la base d’un consensus improbable autour du paradigme du « vieux-qu’il-faut-laisser-au-pouvoir jusqu’à-ce-que-la-nature-elle-même-s’en-occupe,fort-de-ce-qu’une-figure- alternative-n’a-pas-encore-émergée-dans-son-camp-et-au-sein-de-l’opposition qui-s’entredéchire », le peuple se montrera certainement plus regardant et exigeant lors des prochaines consultations électorales sur la qualité des hommes et femmes à qui il va confier son destin à la présidence de la République, au Parlement et dans les conseils municipaux.

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