Sangmelima : Le Rdpc étouffe une marche des jeunes
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Ils voulaient exprimer leur ras-le-bol face à une élite coupable de ne pas avoir cherché à les sortir de la misère. Conséquence : le meeting du 6 novembre s’est finalement tenu dans une petite bourgade fortement militarisée.

La jeunesse de Sangmelima voit la vie en noir et se considère comme une génération « sacrifiée », « perdue » ou encore « désabusées ». Tenez, le 9 octobre 2019, suite à l'assassinat du jeune Assam Belinga Benjamin - conducteur de moto dont le corps avait été retrouvé en état de putréfaction-, des émeutes à caractère communautaire ont embrasé la ville. Des jeunes armés de gourdins, couteaux et machettes ont pris d'assaut le marché de Sangmelima où ils ont bloqué la circulation, dressé des barrages, improvisé une marche, pillé des commerces, saccagé des boutiques. Les pouvoirs publics et les élites se sont mobilisés pour calmer les tensions. Le ministre des Finances, Louis Paul Motaze, membre titulaire du Comité central du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc) et non moins chef de la délégation permanente départementale du comité central du Rdpc du Dja et Lobo a convoqué une réunion le 12 octobre à Sangmelima.

De nombreux jeunes de la localité étaient présents à cette rencontre. « Si nous avons cassé les boutiques au marché, c’était pour envoyer un signal fort à nos élites qui s’arrogent toute la fortune du pays et les postes, en abandonnant la jeunesse à un avenir incertain. Il n’y avait aucun problème contre les communautés étrangères qui vivent à Sangmelima et nous et nous regrettons notre comportement», explique sous le couvert d’anonymat un leader de la marche avortée du 6 novembre à Sangmelima. Les promesses ont été faites aux jeunes au cours des différents passages de l’élite dans le Dja et Lobo. « Jusqu’à présent, ils n’ont rien fait. Nous avons donc prévu organiser une grande marche à Sangmelima le 6 novembre pour humilier l’élite du département du chef de l’Etat à l’occasion de l’anniversaire du Renouveau. Certains parmi nous ont fait fuiter l’information, raison pour laquelle le meeting a été délocalisé pour le village Zoum et notre marche avortée », explique le jeune, d’un ton vindicatif et revanchard.

La démagogie de Zoum

A l’occasion du 37ème anniversaire de l’accession de Paul Biya à la magistrature suprême, le Rdpc a organisé des festivités sur toute l’étendue du territoire national. Dans la section Rdpc du Dja et Lobo I, l’évènement a dérogé à la tradition en délocalisant le lieu de la fête. Au lieu de Sangmelima, c’est le village Zoum dans le groupement Yembak, situé à une vingtaine de minutes de la capitale départementale du Dja et Lobo qui a finalement servi de cadre à la rencontre politique. Sur les lieux, pas moins de 300 éléments de la gendarmerie patrouillaient la bourgade. Le meeting se déroulera avec beaucoup de tension dans l’air. Entre le petit jeu de ping-pong du maire André-Noël Essian et Louis Paul Motaze, et les bagarres entre des sous-sections, seule la forte pluie qui s’est abattue dans le coin est venue refroidir les ardeurs.

Des petits accrochages se sont également produits entre des éléments de la gendarmerie et ces jeunes qui tenaient à se faire entendre. « La solution ne peut pas être la violence. La solution ne peut pas être dans l’ostracisme à l’égard des autres, mais plutôt dans la recherche des voies et moyens de l’épanouissement de tous », admoneste Louis Paul Motaze, fils du cru. « Nous, élites du département du Dja et Lobo, avons commencé à réfléchir aux problèmes de nos jeunes. Je leur ai d’ailleurs donné une espèce d’aperçu de ce qui pourra être notre plan d’action que nous allons mettre progressivement en place pour que les uns et les autres trouvent leur compte », se défend le membre titulaire du comité central du Rdpc. « Nous avons marre de leurs promesses, il faut que le président de la République sache que l’élite qu’il a nommé pour aider le Sud a échoué », rétorque Guy Martial Alouman, militant de l’Ojrdpc de la sous-section de Mefo. Le portail des camerounais de Belgique. Un avis soutenu par Mvondo Akam, militant dans la même circonscription. « Les jeunes de Sangmelima sont très anxieux sur leur avenir et paralysés par un sentiment de discrimination et d’exclusion dont les premiers responsables sont les élites du département du Dja et Lobo», indique pour sa partun conseiller municipal.

Les chemins escarpés de l’emploi

La négligence de cette élite à répondre aux besoins de la jeunesse et les agissements qui aboutissent à la marginaliser ont « cimenté un sentiment d’amertume et provoqué le ressentiment ». A en croire l’élu local, les émeutes de Sangmelima ont été l’expression directe de la frustration de ces jeunes. « Les jeunes ont dit ce qu’ils attendent de leurs élites. J’ai eu à leur dire que s’il est bon de poser de bonnes questions, il est mauvais d’apporter de mauvaises solutions », contre-attaque le patron des finances du Cameroun. Malgré les réunions de l’élite depuis les malheureux évènements du 9 octobre, très peu de choses ont été accomplies pour répondre durablement aux revendications des jeunes. Une jeunesse de Sangmelima qui estime être « mieux instruite, en meilleure santé et mieux connectée au monde » que les générations précédentes, mais marginalisée, bâillonnée et entravée sur le chemin de l’emploi. Or, croire qu’il suffira, encore, pour calmer la donne, de proposer quelques postes douillets d’apparatchiks à quelques leaders de ces jeunes, serait une grave erreur.

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