Gestion des élections en Afrique : quel mode de scrutin pour quel effet ?
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Gestion des élections en Afrique : quel mode de scrutin pour quel effet ? :: AFRICA

Depuis pratiquement deux décennies en Afrique, il ne se passe plus d’élection sans contestation. Du code électoral à la proclamation des résultats d’une élection, en passant par son déroulement, l’élection en Afrique fait l’objet de vives contestations qui aboutissent parfois à des situations de tensions.

L’exemple nous est servi actuellement au Cameroun (élection présidentielle) et au Gabon (élections locales).

Dans les éléments de contestation, il arrive que le mode de scrutin tienne une place de choix. Pour une certaine élite politique, le mode de scrutin adopté par la loi est toujours de nature à favoriser le parti ou le candidat au pouvoir. La question peut se poser de savoir si l’effet du mode de scrutin n’est pas d’abord recherché avant de choisir un mode de scrutin souhaité.

Il conviendra ici de présenter quelques modes de scrutin et leurs effets.

A- les scrutins majoritaires et leur effet Les scrutins majoritaires constituent le mode le plus ancien en la matière quant à la désignation des élus. A l’intérieur, on distingue le scrutin uninominal et le scrutin plurinominal.

S’agissant du scrutin uninominal à un tour, celui qui obtient le plus de voix emporte simplement le siège. L’avantage que procure ce système est la simplicité. Globalement, le parti qui arrive en deuxième position est souvent sous représenté par rapport à son total de voix. Les autres partis n’obtenant à leur tour presque pas d’élu. Bien plus, la
territorialité des partis influence fortement le résultat final dans la mesure où un petit parti ayant une assise locale suffisante peut être représenté, mais aussi que le parti ayant obtenu plus de voix au plan national peut se voir privé de sa victoire, ses suffrages étant trop dispersés.

Quant au scrutin uninominal à deux tours, le cas de la France par exemple, le passage au premier tour est conditionné par l’obtention de la majorité absolue des voix, avec parfois une obligation de réunir un nombre minimal d’électeurs inscrits.

Faute d’atteindre ce seuil, il est naturellement organisé un second tour. Dans ce dernier cas, il y a possibilité de voir les petits partis s’entendre avec d’autres pour obtenir
plus d’élus.

Relativement aux scrutins de liste (à un ou deux tours), l’on attribue à la liste arrivée en tête tous les sièges.

C’est le cas avec la désignation des grands électeurs pour la présidentielle américaine. Dans le scrutin de liste, il y une forte amplification de la victoire, même s’il y a des injustices qu’on peut retrouver. Relativement à leur effet, les scrutins majoritaires visent à désigner une majorité d’élus dans lesquels l’on peut déceler la capacité de gouverner.

Le scrutin majoritaire à un tour favorise l’alternance, mais uniquement entre deux partis, des poids lourds de la politique.

Le scrutin majoritaire à deux tours incite quant à lui plus de partis à conclure des alliances pour le second tour et constitue un gage de stabilité politique. Les scrutins majoritaires font souvent apparaître des majorités stables, fondées sur un affrontement avec l’opposition et au prix d’une certaine injustice dans la représentation.

B- Les scrutins proportionnels et leur effet

Dans son principe, le mode de scrutin proportionnel est simple dans le principe, car les sièges sont attribués selon le nombre de voix. Mais c’est un système complexe dans sa mise en œuvre. Ici, il s’agit moins de voter pour un homme que pour un parti ou un programme politique.

Parlant de scrutin proportionnel, plusieurs méthodes existent pour la répartition des voix.

La méthode du quotient fixe : ici le nombre de voix à obtenir pour avoir un siège est fixé d’avance, c’est ce qu’on appelle le quotient électoral.

Pour obtenir le nombre de sièges à attribuer, il faut diviser le total des voix obtenu par chaque liste par le quotient électoral. Après la première répartition, il va falloir répartir aussi les restes : c’est la méthode du plus fort reste. Cette dernière favorise les petits partis. Dans le même sillage, il y a aussi la méthode de la plus forte moyenne qui favorise les grands. Cette dernière est utilisée pour les sénatoriales par exemple en France où les départements élisent les sénateurs.

A ces méthodes usitées, on peut également convoquer d’autres méthodes comme les systèmes de compensation utilisées en Allemagne.

Dans ce genre de systèmes, les sièges sont répartis au sein de la liste selon l’ordre de présentation le plus souvent, mais aussi parfois selon l’indication de préférences donnée par les électeurs.

Le seuil fixé pour obtenir le droit à la répartition des sièges et la taille de la circonscription constituent des variables déterminantes dans les scrutins proportionnels. Ici, plus le seuil est élevé et plus le nombre de circonscriptions est important, plus l’accès des petits partis aux sièges est difficile.

En Israël par exemple, le choix est fait de n’avoir qu’une seule circonscription au niveau du pays. Ainsi, le niveau du seuil dépend des caractéristiques de chaque pays : fixé à 5% en Allemagne ou en France, il écarte peu de partis nationaux, alors que dans les démocraties plus jeunes avec de nombreux partis, il pourrait priver de représentation une
frange importante de la population.

Cependant, les systèmes proportionnels peuvent malheureusement conduire à une instabilité politique, ils favorisent le multipartisme et donnent un rôle important aux petits partis charnières, souvent partenaires indispensables des majorités.

Les scrutins proportionnels rendent difficile l’émergence d’une majorité qui se veut stable et cohérente, faisant ainsi ressortir une logique de coopération des partis.

C- Les scrutins mixtes

Le scrutin est dit mixte lorsqu’il empreinte des éléments aussi bien du système majoritaire que du système proportionnel. C’est un scrutin qui combine donc, mais avec une grande
diversité, les deux mécanismes.

En France, le mode de scrutin utilisé pour les élections municipales dans les communes de plus d’un millier d’habitants a pour but d’assurer une majorité au vainqueur, de permettre des alliances entre les deux tours et de donner une représentation aux minoritaires. Dès lors, à l’issue du second tour, la liste en tête obtient la moitié des sièges, l’autre moitié est répartie à la proportionnelle entre toutes les listes ayant rassemblé au moins 5% des suffrages.

Dans certains pays africains et notamment ceux de l’Afrique centrale comme le Cameroun, le choix du mode de scrutin fait l’objet de beaucoup de contestations. Lors de la dernière élection présidentielle du 7 octobre dernier, il s’est effectivement une fois de plus posé le problème d’une élection à deux tours.

Les partisans de ce système pensent qu’un scrutin à deux tours offrirait plus de possibilité à l’opposition camerounaise de triompher du parti au pouvoir. L’équation est simple, au premier tour, le parti au pouvoir fait face à une multitude de partis d’opposition.

Au second tour, il n’y a plus de multitudes de partis face au parti au pouvoir, mais un bloc coalisé qui peut faire finalement basculer les choses.

Dès lors que la demande de l’opposition qui souhaite l’existence d’un bulletin unique et d’un vote à deux tours n’est pas satisfaite, il y a pour celle-ci une volonté manifeste de ne pas rendre plus transparentes les élections au Cameroun.

Le vote à deux tours au Cameroun favorise-t-il absolument le parti au pouvoir ? Est-ce un frein à la conquête du pouvoir par l’opposition, la réflexion est lancée compte tenu des effets du scrutin majoritaire à un tour ou à deux tours.

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