Questions aux Lauréats Ebénézer Billè et Georges Moukouti Onguédou
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Alors que la liste des ouvrages présélectionnés de l’édition 2018 des Grands Prix des Associations Littéraires vient d’être publiée dans la presse camerounaise, nous vous proposons une interview des co-lauréats de la dernière édition du GPAL, les professeurs Ebénézer Billè et Georges Moukouti Onguédou, qui avaient été distingués dans la catégorie Recherche pour leur œuvre intitulée « Hispanoamérica: visión contemporánea ».

Professeurs, pourriez-vous nous résumer en quelques mots le contenu de cet ouvrage qui vous a valu d’être propulsés au-devant de la scène littéraire.

L’ouvrage Hispanoamérica : visión contemporánea publié en 2016 est un essai qui offre une vision actualisée de l’Amérique Hispanique, entité géographique et socioculturelle complexe et plurielle. Nos réflexions visent à comprendre l’hispano-américanité dans ses traits généraux et spécifiques par le biais de l’Histoire et de la Culture. Davantage, nous explorons les questions identitaires à travers des phénomènes tels que la narcoactivité, la violence, les minorités ethniques et raciales et les télénovelas (dont la popularisation à l’échelle mondiale permet de visualiser certaines réalités sociales et culturelles de l’Amérique Hispanique en particulier et de l’Amérique Latine en général). Ensuite, il s’agit aussi de projeter une nouvelle configuration d’une Amérique Hispanique qui intègre les Etats-Unis d’Amérique, en convoquant quelques facteurs linguistiques et historico-politiques qui motivent la grande présence aussi bien de la langue espagnole (co-officielle dans certains de ses états) que de la population hispanique (près de 60 millions d’hispaniques) chez ce voisin nord-américain par ailleurs membre de la ASALE (Association des Académies de la Langue Espagnole) depuis 1980, grâce à son Académie Nord-américaine de la Langue Espagnole créée en 1973. L’ouvrage offre, en outre, une cartographie de l’Amérique Hispanique avec des données spécifiques sur la vie politique, l’économie, la société, la géographie, l’écosystème et la culture (littérature, musique, télénovela, gastronomie, etc.) de chacune des vingt entités territoriales de l’Amérique Hispanique, y compris les Etats-Unis d’Amérique.

Quel intérêt y aurait-il aujourd’hui pour un jeune africain d’apprendre la langue espagnole, ou encore l’histoire et la culture du monde hispanique ?

La langue est l’âme des peuples, une enveloppe qui dissimule la vie culturelle et matérielle des peuples. Toute langue est par conséquent importante ; et davantage importante lorsqu’elle est internationale, parlée par des millions de personnes. Cela suppose une ouverture à l’Autre et au monde, de par la première fonction d’une langue, c’est-à-dire la communication. L’homme le plus fier du monde serait celui qui parle plusieurs langues, s’inscrivant non seulement dans une dynamique interculturelle, mais également de multiplication d’opportunités. Lorsqu’un espagnol demande à un chinois pourquoi ce dernier s’intéresse de plus en plus à la langue espagnole, le chinois parle d’opportunités, soit un vaste marché de plus de 500 millions de consommateurs à travers le monde s’exprimant en langue espagnole (Espagne, Argentine, Bolivie, Chili, Colombie, Costa Rica, Cuba,

Equateur, El Salvador, Guatemala, Honduras, Mexique, Nicaragua, Panama, Paraguay, Pérou, Porto Rico, République Dominicaine, Uruguay, Venezuela, Etats-Unis d’Amérique, Guinée Equatoriale, etc.). L’espagnol, langue de Cervantès, est la deuxième langue la plus parlée et étudiée aux Etats-Unis d’Amérique, juste après l’anglais. En définitive, apprendre la langue espagnole pour un jeune africain c’est apprendre une des trois premières langues les plus parlées dans le monde ; c’est se donner plus d’opportunités de travail, bien que les gouvernements africains dans leur immense majorité soient prioritairement tournés vers les pays dits développés. Le Mexique, pays émergeant, ou le Cuba, offrent régulièrement des bourses d’études aux ressortissants des pays africains dont le Cameroun. Mais combien de camerounais en sont au courant ? Fondamentalement par manque d’ouverture. On pourrait penser que des représentations diplomatiques dans certains de ces pays d’Amérique Hispanique favoriseraient alors cette ouverture réelle.

D’après les chiffres récemment communiqués, 129 ouvrages sont en lice pour le GPAL 2018, avec une participation de 102 associations. Comme depuis la dernière édition on remarque la présence de livres écrits en Espagnol, en plus de l’Anglais et du Français ; 39 pays à travers le monde sont représentés dans cette longue liste. Qu’est-ce qui à votre avis pourrait expliquer que les prix décernés par le GPAL soient autant convoités, y compris au niveau international ? Qu’est-ce qu’on y gagne, en tant que lauréat, si ce n’est pas indiscret ? Car la seule prime de 500 000 FCFA attribuée aux gagnants ne saurait suffire à justifier un tel engouement.

Permettez-nous de remercier derechef l’Association Littéraire "El Calidoscopio" qui, depuis le Mexique, avait proposé notre ouvrage au GPAL 2017. Parlant des livres écrits en espagnol, le mérite revient d’abord à l’Equipe du GPAL qui a pensé à l’ouverture dont nous parlions précédemment. Et on le voit ! En lice il y a des livres proposés par des Associations Littéraires espagnoles, mexicaines, équatoriennes, guatémaltèques, etc. L’ouverture à l’espagnol a, par conséquent, internationalisé davantage le GPAL, contribuant à faire parler par la même occasion le Cameroun dans le monde hispanique. Répondant donc à votre question, nous constatons que les Grands Prix des Associations Littéraires laissent entrevoir un travail de présélection préalable par les différentes Associations Littéraires dont la renommée est consécutive aux prix obtenus par les auteur(e)s et ouvrages que ces dernières proposent. Un prix est déjà une distinction, une reconnaissance, une récompense ou un mérite entraînant gratification ou satisfaction. C’est donc dire qu’un GPAL, outre la fierté de voir son œuvre présélectionnée et ensuite sélectionnée par un jury international composé de membres issus du monde académique et artistique, est définitivement gratifiant.

Votre dernière collaboration ayant été un succès, auriez-vous envie de remettre ça ; avez-vous un nouveau projet littéraire commun en vue ?

Remettre ça, mais pas forcément le Prix ! Il y a un ouvrage en cours d’édition, sur la télénovela latino-américaine en tant que culture populaire et médiatique dont une étude en profondeur s’avère pertinente, car permettant, comme le pense José Ignacio Cabrujas (2002), de comprendre les cultures et les sociétés. En fait, la télénovela, au-delà de l’intrigue amoureuse et passionnelle qui la sous-tend généralement – donnant l’impression qu’elle n’est que mélodrame et conte de fées – traite des questions bien variées. Sur un plan interdisciplinaire, l’on convoque d’une part les relations historiques et de consanguinité que la télénovela, roman télévisé, entretient avec d’autres arts tels que la littérature (roman et théâtre), la musique (mélodie) et le cinéma ; et d’autre part des dimensions et influences sociales et culturelles de la télénovela comme, précisément, phénomène social et culturel.

Merci chers lauréats, d’avoir accepté de répondre à nos questions. Un petit mot de fin, peut-être ; un petit conseil à l’endroit des jeunes auteurs qui aimeraient suivre votre exemple ?

En vous remerciant de l’opportunité que vous ne cessez de nous offrir pour faire connaître notre œuvre, nous voudrions partager notre optimisme à voir le GPAL rayonner davantage sur le plan international et souhaiter que des sponsors s’y intéressent. Aux jeunes auteur(e)s, il est question de croire en leurs recherches. C’est déjà un mérite d’être présélectionné par une Association Littéraire. La compétition est rude, mais tout est dans la conviction.

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