Joseph Fabrice Ondoa Ebogo, J’ai 19 ans et je garde les buts des Lions
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CAMEROUN :: Joseph Fabrice Ondoa Ebogo, J’ai 19 ans et je garde les buts des Lions :: CAMEROON

De son par son parcours sans faille, le nouveau gardien des Camerounais est l’exemple-type du jeune qui part de nulle part pour rayonner dans le monde.

Palais de Justice d’Ekounou, à Yaoundé. Le quartier n’est en rien un de ces quartiers chics que l’on connaît dans la capitale. Ce dimanche après-midi, l’endroit vit aux rythmes des personnes qui reviennent de la messe de 11h qui sort à peine. Les tenanciers de call-box et autres petits commerces essayent de se préserver du soleil ardent et de la poussière qui envahit tous les alentours. La veille encore, l’espoir du quartier s’envolait pour Barcelone. Lui, c’est « Faro », connu sous le nom de Joseph Fabrice Ondoa. Il y a une semaine encore, pratiquement tout le quartier se réunissait chez ses parents pour regarder ses exploits lors de la Can qui se déroule actuellement en Guinée Equatoriale.

Après que les Lions Indomptables quittent la compétition la queue entre les jambes en ayant perdu face aux Eléphants de Côte d’ivoire (1-0), le petit Ondoa est revenu auprès des siens, dans la maison familiale. Arrivé jeudi soir, il est reparti deux jours après un séjour paisible comme ceux qu’il a, à chaque fois qu’il revient au bercail. L’un des voisins de « Faro », celui qui nous mènera d’ailleurs à son domicile, nous avoue : « Il a beau être simple et pareil qu’à l’époque où il jouait aux 2-0 avec nous ici, ça ne s’ignore jamais quand il est là. Même si quelques fois, on ressent qu’il aimerait juste rester tranquille avec ses parents, ses frères et soeurs. »

Cela fait plus de 6 ans que Fabrice a quitté le cocon familial. Son départ s’est passé du jour au lendemain, sans que son entourage ne voie la boule arriver. Démissionnaire des tâches ménagères à la maison, Fabrice était perçu à l’époque comme un petit paresseux qui avait toujours besoin de bons coups de pieds dans le derrière. Son oncle, Jean-Marie Kenegue raconte qu’on le voyait s’amuser comme joueur de champ lors des rencontres entre voisins à Ekounou. Jusqu’au jour où « il est revenu à la maison et nous a annoncé qu’il allait participer au Festi Eto’o ». Comme lui, le reste de la maisonnée prendra cela à la légère. Lors du tournoi, l’équipe de Faro est éliminé très rapidement, mais, une équipe adverse remarquera ses prouesses dans les buts. Il sera alors prêté à celle-ci, qui ira jusqu’en finale de la coupe. Si bien qu’il obtiendra le titre de « l’homme du match ». Dès ce jour, il est contacté par la Fundesport de Samuel Eto’o, qu’il intègre quelques temps après.

Nous sommes en 2006. De cette expérience, il garde de très bons souvenirs. « Nous avons été bien formés et bien encadrés. Grâce au coach Diallo Siewe, nous avons appris le respect, l’humilité et la confiance en soi », dit-il reconnaissant. Trois ans plus tard, c’est le départ pour le FC Barcelone. Fabrice rejoint alors la Masia, le centre de formation de l’équipe, près du mythique Nou Camp. Un changement mineur ; le petit Ondoa a reçu un accueil des plus chaleureux. « Je n’ai pas été dépaysé, car l’encadrement était comparable à ce que nous vivions à la Fundesport. Il y a toujours eu beaucoup de Camerounais dans ce centre ce qui suscitait parfois de la convoitise. Mais nous nous sommes toujours dit que nous devrions travailler plus pour mériter notre place », se souvient-il. En lieu et place de Samuel Eto’o, passé par le même centre plusieurs années auparavant, Fabrice redouble d’efforts et s’adonne à fond pour être dans les bonnes grâces de son encadreur.

« C’est comme un père, il veille sur nous et s’implique dans nos carrières. Il est souvent venu nous voir, même après son départ du Fc Barcelone. Il nous encourage à travailler deux fois plus que les autres, car nous serons toujours attendus au tournant », confie-t-il à propos du Pitchichi. Le 3 mars de l’année dernière, il signait comme professionnel à Barcelone. Après avoir passé 5 années en tant que cadet (A, puis B) et junior. Sa titularisation marque un tournant dans sa carrière. Après avoir gagné la confiance de Tito Vilanova, il pourrait être surclassé en équipe première, si besoin s’impose.

Et là, le rêve deviendrait réalité pour lui. Garder les buts aux côtés de Messi, Luis Suarez et Neymar Junior. La preuve, l’ancien capitaine de la sélection cadette du Cameroun a eu à s’entrainer avec la bande à Messi. Cette journée est restée gravée dans sa mémoire et il s’en souvient comme si c’était hier. Cela n’empêche qu’il soit reparti à Barcelone avec un engouement et une persévérance intacte. La sortie précipitée des Lions à la Can ne changera rien. Soutenu par ses proches et ses millions de followers sur les réseaux sociaux, il est convaincu d’avoir donné le meilleur de lui-même, ses co-équipiers avec. Ce qui n’empêche pas le successeur de Thomas Nkono de tenir des propos assez durs envers la sélection de Volke Finke. « On a manqué de précision. On a perdu beaucoup de ballons. On a raté beaucoup de passes. Au niveau de l’attaque, on a un peu pêché par individualisme. Je pense que c’est ce qui a causé notre défaite », a-t-il confié au sortir de la compétition sur Rfi.

Malgré tout, le cadet de l’équipe reste optimiste et se montre fier de la nouvelle famille qu’il forme avec les autres Lions Indomptables. «Je tire mon chapeau à cette nouvelle famille. Après le deuxième match, lorsqu’on a commencé à subir certaines pressions et polémiques, on est resté soudés. Nous avons réagi comme des frères. Nous n’avons cédé à aucun chantage. […] Chapeau à ceux qui ont très peu joué. Certains journalistes faisaient des interviews pour obtenir certaines déclarations. Je remercie les joueurs concernés de ne pas avoir fait de déclarations qui auraient pu déstabiliser le groupe. »

L’espoir d’une famille

L’intérêt soudain que portent les fans et autres passionnés de football pour Faro impressionnera toujours les frères et soeurs de Joseph Fabrice Ondoa. Pour ses 3 frères et sa soeur, il reste « le même Fabrice qui bavarde beaucoup, imposant et caractériel qu’ils ont toujours connus », nous confie Claude Ebogo, l’aîné de la fratrie. Son envol et sa notoriété soudaine ne change rien à la place qu’il occupe dans la famille Ebogo. « Ça a toujours été un petit frère respectueux. Il garde sa place de petit frère et moi celle de grand frère », s’amuse le cuisinier Claude.

Dans la famille, les profils sont différents les uns des autres. Papa, Thomas Ebogo, est un électricien, spécialisé dans les branchements en ligne. Maman, Catherine Ebogo, elle, est retraitée et a servi pendant longtemps à la sous-préfecture de Kondengui. Seuls Fabrice et son frère aîné qu’il suit, Agnouzoua Ebogo, ont choisi le ballon rond. Les fins de mois n’ont jamais été évidentes pour la famille nombreuse. Et, le succès de Fabrice est perçu comme un salut pour tous. « Il ne faut pas se mentir, il nous aide beaucoup, que ce soit financièrement ou moralement », avoue son oncle. La maison encore en construction où vivent ses parents, sa petite soeur, son frère aîné et des cousins, est l’un des cadeaux du petit prodige à ses parents. Ce qui aurait pu engendrer des problèmes entre les frères Ebogo. Car, Fabrice est aux petits soins de Maman Catherine à chaque fois qu’il revient à la maison.

« C’est tout à fait compréhensible, elle ne le voit pas souvent, donc c’est une manière de rattraper le temps perdu », explique Claude, le grand frère. Derrière sa carrure (1m85 pour 82 kg) et la charge qu’il porte volontiers, Fabrice reste toujours l’avant-dernier de ses parents. Le 24 décembre 2014, il soufflait sur sa 19ème bougie, et reste surpris par les petites choses de la vie. Il n y a qu’à voir les différentes photos qu’il poste des stars du football à côté desquelles il pose admiratif : Neymar, Xavi Hernandez, etc… ou encore, les gants aux couleurs du drapeau Camerounais avec son nom dessus.

Il n’en demeure pas moins concentré. La manière dont il garde les goals, attentif au moindre geste des adversaires, la façon dont il plonge pour rattraper le ballon à chaque fois qu’il s’approche de sa cage, ce qui lui a valu le surnom de « chat », ou encore la déception qui se lit sur son visage les quelques fois où il prend un but, font que certains pensent que la nouvelle équipe camerounaise se repose presqu’entièrement sur le jeune gardien. Lui continue de garder ses objectifs en vue, et, à Ekounou, près de chez ses parents, les enfants continuent de jouer sur le même terrain que lui, se disputant désormais la place de gardien de buts, se rêvant un avenir à la « Faro ».

© Le Jour : Inès Ntsama

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