À trente-cinq kilomètres déjà avalés en une seule journée, Manuel Vinga et son ami poursuivent inlassablement leur marche fraternelle à travers l’Afrique par l’étape du Cameroun. Ce jour, c’est à trente-sept kilomètres de Bafoussam qu’ils ont posé leur baluchon, confiants et déterminés à atteindre, dès demain, la ville symbole de cette étape décisive. Les deux marcheurs, que les habitants surnomment désormais « les pèlerins de la fraternité », avancent avec une énergie qui surprend, malgré l’âpreté du chemin. Ils ont traversé Makenéné, croisé un trafic dense, mais se sont offert une pause conviviale autour de viande boucanée partagée au bord de la route. Dans leur sac, quelques morceaux de chocolat, des gâteaux, des boîtes de sardines, et l’eau fraîche des sources  où ils s’arrêtent parfois pour boire ou se baigner, suffisent à maintenir l’élan. Le froid s’installe la nuit, leur peau se dessèche, mais leur flamme intérieure reste vive. Car cette marche est non seulement un défi physique, mais aussi un acte symbolique, panafricain et historique.

Leur horizon ne s’arrête pas à Bafoussam. Leur ambition les conduit plus loin, jusqu’au Burkina Faso, pour saluer l’Alliance des États du Sahel et encourager, par leur geste, l’idéal d’un panafricanisme fort et vivant. À l’heure où leur propre  pays a pris  des décisions controversées concernant les travailleurs étrangers, leur démarche incarne une autre voix : celle d’une Afrique unie, fraternelle et ouverte. Sur la route, les paysages se révèlent comme une fresque vivante : champs verdoyants à perte de vue, collines luxuriantes, villages accueillants où les chefferies locales leur offrent l’hospitalité. Chaque rencontre est un trésor, chaque sourire, une force. Ils ont traversé l’entrée de l’Université des Montagnes, admiré les lieux emblématiques, croisé des passants gabonais qui, comme un signe, rappellent l’universalité de leur quête.

La beauté du Cameroun leur fait parfois oublier la douleur de leurs pieds fatigués. Leur marche est aussi une plongée dans l’âme africaine : entre les camions stationnés sur les routes, les paysans rentrant des champs, les chants rythmiques qui accompagnent leurs pas, ils redécouvrent la force qui animait les ancêtres. Manuel et son compagnon se savent porteurs d’un héritage : celui d’une Afrique debout, digne, et toujours en marche vers son unité.

Au fil de leur traversée, un récit se construit déjà, promesse d’un livre qui viendra immortaliser cette aventure hors du commun. Et demain, quand ils entreront dans Bafoussam, ce ne sera pas seulement une étape franchie : ce sera un nouveau chapitre de l’épopée fraternelle de deux hommes qui marchent pour l’Afrique, et qui, par leur courage, inscrivent leurs noms dans la mémoire des peuples.

Plus qu’une marche, l’odyssée de Manuel Vinga et de son compagnon devient une métaphore vivante de la fraternité des peuples. Chaque pas qu’ils posent sur cette terre africaine semble tracer un sillon invisible qui relie les nations par l’esprit, comme si leur souffle et leur endurance tissaient un fil d’union entre les hommes. La nature elle-même paraît reconnaître ce geste : les collines verdoyantes, les rivières claires et les champs fertiles retiennent l’empreinte de leur passage, fragile et éphémère, mais qui, paradoxalement, s’élève en symbole d’éternité. Ainsi, leur marche surhumaine dépasse.

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