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© Avec Camer.be : Rév. Dr Joël Hervé Boudja
- 04 Apr 2021 08:36:23
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FRANCE :: PÂQUES 2021, LA PREDICATION DU REV DR JOËL HERVE BOUDJA
Textes : Esaïe 25,6-9 ; 1 Corinthiens 15,19-28 ; Marc 16,1-8
Cette fête de Pâques est très riche symboliquement. En la résurrection de Jésus, nous voyons le renouvellement de la vie, le triomphe de la vie sur la mort, de l'amour sur la haine, du bien sur le mal, de l'espérance sur le désespoir, de la lumière sur les ténèbres, de l'esprit humain qui refuse d'accepter la défaite. La commémoration de Pâques peut nous donner une nouvelle énergie, et peut-être un nouveau courage, la possibilité d'espérer dans une situation qui semble impossible.
Le fait que nous célébrions Pâques au printemps, quand les arbres et les plantes refleurissent après un hiver où ils semblaient morts, quand la lumière revient après des mois de ténèbres, renforce le message symbolique de Pâques. Tout ce symbolisme nous dit quelque chose d'essentiel, qui va au plus profond du cœur humain. C'est pourquoi il y a une fête de vie, une fête de renouvellement, dans beaucoup de religions. Mais, confronté à ce symbolisme, il ne faut pas être trop romantique, il faut être réaliste. En fait, en ce monde, l'amour ne triomphe pas toujours sur la haine ; au contraire, le mal triomphe trop souvent sur le bien.
La vie n'est pas toujours vainqueur sur la mort. Même les arbres meurent. Tout ne finit pas bien. Aujourd'hui, parfois, les médecins réussissent à sauver la vie de quelqu'un, même s'il ne respire plus, même si son cœur ne bat plus, même s'il semble mort. On refuse d'accepter qu'il soit vraiment mort, et on se bat pour qu'il vive. Mais les efforts des médecins ne réussissent pas toujours.
Souvent, trop souvent, on doit accepter que le patient soit vraiment mort, et cela veut dire qu'il ne respirera plus jamais, que son cœur ne battra plus, qu'il ne parlera plus jamais avec ses amis, qu'il ne rompra plus jamais de pain avec eux. Il y a deux mille ans, ayant passé déjà deux jours dans la tombe, Jésus était définitivement mort ; tout le monde le savait, y compris ses disciples. L'affaire triste de Jésus était terminée.
C'était la fin. Stupeur et silence Reprenons brièvement la dynamique du récit : les femmes viennent pour garder dans la mort celui qui a été mis au tombeau. Intervient un messager mystérieux qui annonce l'extraordinaire : la résurrection de celui qu'elles cherchent ; ses paroles résument brièvement tout le récit évangélique. Venues de très bonne heure pour embaumer un corps mort, les femmes ressortent donc du tombeau avec un message de vie. Un corps a disparu, une parole est remise.
Or cette parole, déployée à la mesure d'un récit, n'est-ce pas l'évangile que nous venons de parcourir ? Les femmes ont peur. C’est assez compréhensible. Les événements des derniers jours ont été violents. La peur panique a envahi le groupe des intimes de Jésus. Tous ont renié, fuit, trahit et se sont mis en position de survie. L’entreprise collective du changement de paradigme religieux s’est effondrée. L’équilibre ancien a été ébranlé mais il a tenu ferme, les modernistes ont été mis en déroute.
Le roi des juifs est mort. Rome et le Temple se sont alliés, ils ont triomphé des doux rêveurs qui voulaient transformer le monde. Alors nous comprenons la peur des femmes. Il n’est pas question de se relancer dans une aventure sans espérance de victoire d’autant plus que l’amer goût de l’échec est encore très présent et que même l’hommage au mort n’est pas encore rendu.
Désorientées, déstabilisées, désespéré, défaites… il n’est pas question d’aller parler aux hommes qui sont encore dans un état de prostration bien plus marqué. La mention du tremblement et de la peur indique alors la situation nouvelle dans laquelle les auditeurs de l'évangile (de Marc) devraient être installés : accueilli ou non, le message change quelque chose dans leur vie.
Car les femmes sont moins ici la figure de ceux et celles qui annoncent l'Évangile que de ceux et celles qui le reçoivent (l'initiative de l'annonce reste du ressort du ''jeune homme'' mystérieux et divin). Et la stupéfaction leur ôte la parole. Paroles de salut Initialement, il semble que le récit évangélique se clôturait au v. 8, sur l'image des femmes s'éloignant du tombeau, stupéfaites. Plus tard, une autre main a ajouté un texte (d'ailleurs absent de plusieurs manuscrits) où le Ressuscité parle, agit, envoie en mission.
Cette ultime page (v. 9-20) commence par une apparition à Marie de Magdala. Il est probable que l'écrivain s'est ici inspiré de l'évangile selon Jean (chap. 20 ; tout son récit est d'ailleurs une mosaïque de textes empruntés à Luc, aux Actes, à Matthieu, à la première lettre aux Corinthiens, à la lettre de Jacques etc.). La fête de la résurrection ne nous dit pas que, malgré les apparences, tout finira bien. Cela ne serait pas réaliste, ce n'est pas notre expérience. Il ne faut pas s'attendre à ce que Dieu intervienne juste avant la fin de l'affaire pour nous rendre heureux.
La résurrection nous dit que, après nos déceptions et nos défaites, même définitives, après la fin de notre histoire, Dieu crée une nouvelle histoire, tout à fait inattendue. En Jésus ressuscité, nous sommes intégrés dans une nouvelle création, dans une nouvelle histoire, où la vie triomphe vraiment sur la mort, la joie sur la tristesse. La résurrection de Jésus, c'est le triomphe de la vie sur la mort. Pas seulement pour Jésus, mais pour nous tous. Jésus ne triomphe pas que pour lui-même. Dans la résurrection de Jésus, Dieu nous promet à tous la vie éternelle.
Jésus est les prémices, nous le suivrons. Quelle merveilleuse promesse, cette résurrection ! Quel merveilleux cadeau, la vie éternelle ! Ou est-ce que c'est plutôt une menace ? Pour comprendre la résurrection comme une promesse, il faut vouloir vivre. La vie à jamais : est-ce que c'est vraiment ce que nous voulons ? Certainement, nous ne le voulons pas tous. Il y a ceux pour qui la vie n'est pas un cadeau, qui attendent, même avec impatience, la fin de leurs jours.
Pensons à certains malades qui savent qu'il n'y aura pas de guérison pour eux et à qui la vie apporte chaque jour des douleurs ou des humiliations nouvelles ; dans la Bible, c'est le cas de Job, qui n'espère que mourir. Pensons aux prisonniers qui n'ont aucun espoir d'être libérés, qui sont peut-être humiliés et torturés par leurs gardiens, et qui ne veulent qu'être tués.
Pensons à ceux qui, pour n'importe quelle raison, se méprisent ou se détestent, pour qui chaque jour est un supplice parce que, quoi qu'ils fassent, où qu'ils aillent, ils sont accablés d'une manière insupportable par eux-mêmes. Pensons à ceux qui vivent dans une solitude profonde, qui sont au milieu d'une société ou d'une famille pour laquelle ils n'existent pas, qui semble les rejeter ou simplement les oublier.
Souvent, leur seul soulagement est de dormir, et pour eux le sommeil est un avant-goût d'une mort soulageant. Aussi, le nombre de personnes qui se suicident ou qui tentent de se suicider est témoin du fait que la vie n'est pas toujours un cadeau. Il y a beaucoup de cas moins dramatiques, de personnes qui, quoiqu'elles supportent assez bien leur vie, acceptent voire guettent la fin de leurs jours : par exemple, ceux qui sont usés et épuisés par une vie trop pleine de travail et de soucis et qui veulent se reposer ; ou ceux dont le corps, trop âgé et ne fonctionnant qu'à moitié, est plutôt un fardeau que l'expression de leur humanité. Non, il n'est pas évident de dire que la résurrection de Jésus est une promesse à accepter avec joie.
Pourtant, l'Église nous invite tous à en faire la source de notre joie, parce que cette résurrection n'est pas la menace d'une vie sans fin, elle est la promesse d'une vie transformée. La résurrection de Jésus ne peut être comprise que dans l'optique de sa vie sur terre avant sa mort. Il guérit les corps et il guérit les âmes. Il guérit les malades, les paralysés, pour que leur corps ne soit plus un poids à supporter, et il change le cœur humain pour qu'il soit capable d'aimer. Cette guérison, physique et spirituelle, est un avant-goût et un gage de la résurrection.
Comme le dit l’apôtre Paul : "Le corps est semé corruptible ; il ressuscite incorruptible ; il est semé méprisable, il ressuscite glorieux ; il est semé infirme, il ressuscite plein de force ; il est semé corps animal, il ressuscite corps spirituel" (1 Cor 15 :42 - 44). Si Dieu remplit le corps de vie et de force, la force et la vie qu'il donne à l'âme est l'amour. Si nous aimons, nos voisins ne vivront plus dans une solitude insupportable ; si nous aimons, nous ne nous maltraiterons plus les uns les autres, nous ne nous exclurons plus les uns les autres ; si nous aimons, nous nous pardonnerons mutuellement, nous nous pardonnerons nous-mêmes.
Si nous aimons, nous ne chercherons plus à nous entretuer, à faire des pactes sataniques chez les marabouts, les féticheurs, pour tuer notre frère, notre sœur, pour détruire l’autre ou l’enfant de l’autre sachant pertinemment que nous aussi, nous sommes parents, savoir qu’en allant éteindre l’étoile des enfants des autres, nous éteignons aussi l’étoile de nos enfants. Nous devons apprendre à vivre. Vivre dans l'amour, c'est un élément essentiel de la résurrection, et cet amour nous permettra de vouloir vivre à jamais.
Par amour, Dieu, qui est amour, nous invite à partager sa vie éternelle ; c'est-à-dire qu'il nous invite à vivre éternellement dans l'amour. C'est pourquoi déjà, chaque fois que nous faisons à un autre un geste d'amour, nous vivons ensemble un avant-goût de la résurrection. C'est aussi pourquoi l'Église a raison de nous inviter à fêter dans la joie le triomphe de Jésus, le triomphe de la vie et de l'amour sur la mort. Nous sommes devant un choix : celui de croire ou de ne pas croire ce qui est arrivé.
Dépasser l'incompréhensible parce qu'indicible pour nous laisser envahir par un mystère qui nous surpasse complètement. Un mystère dont le sens ne peut se prouver, voire s'éprouver qu'en Dieu lui-même. C'est pourquoi, nous devons d'abord décider de choisir. Choisir de croire que le Fils de Dieu est bien venu sur cette terre et qu'il est mort et ressuscité. Par sa mort, il a vaincu la mort et de la sorte, il nous fait le don de la vie éternelle. Dieu a achevé l'œuvre de sa création.
Face au tombeau vide, nous sommes conviés à nous laisser émouvoir par l'amplitude du don divin. A l'instant de la Création, le Père avait fait de chacune et chacun de nous des êtres créationnels, c'est-à-dire des êtres capables de Dieu au sens où il nous avait donné un mandat : celui de nous conduire ainsi que le monde vers leurs accomplissements respectifs. Aujourd'hui dans l'événement de la Pâques, le Christ nous fait entrer dans une nouvelle dynamique. Le Fils de Dieu achève l'œuvre de Création du Père en faisant de nous des êtres résurrectionnels, c'est-à-dire des êtres qui choisissent de Le suivre car ils vivent avec cette conviction intime et profonde que la mort a été vaincue, que la mort de la mort est un des nouveaux noms de la résurrection. En d'autres termes, le signe du tombeau vide nous indique la promesse d'un salut, d'une vie éternelle, d'une résurrection. Non seulement, celle de Dieu mais également la nôtre.
Un peu comme s'il nous disait de ne pas trop nous préoccuper de la mort, car elle n'a finalement plus de puissance sur nous. La foi en la vie éternelle n'est pas quelque chose d'anodin, elle signifie prendre la vie au sérieux et la vivre jusqu'au bout. La vie éternelle nous oblige à goûter pleinement cette vie, avec ses joies, ses responsabilités mais également ses peines.
Notre vie n'est pas une roue qui tourne sans fin mais une flèche qui a une direction. Dans la foi, notre vie vaut la peine d'être vécue, à chaque instant qu'il nous est donné de vivre. Une vie vécue dans la confiance devant quelque chose que nous ne pouvons pas nommer tellement elle reste mystérieuse pour notre intelligence.
Nous sommes des êtres capables de Dieu, des êtres capables de résurrection, des êtres qui se réjouissent pleinement de la vie terrestre car nous avons en nous cette conviction que quelque chose d'ici se poursuivra dans l'au-delà.
Mais ça, c'est d'abord une question de choix. A chacune et chacun de décider si ce qui s'est passé il y a tant d'années est bien vrai, si ce qui va au-delà d'une certaine historicité comporte bien le don de la divinité. Dieu en nous offrant aujourd'hui encore son tombeau vide, nous laisse la liberté de choisir.
C'est par l'exercice de notre liberté que nous devenons des êtres résurrectionnels. Alors et alors seulement, le tombeau est tout habité de la présence divine.
Amen
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