Cameroun, La génération spontanée du « Southern Cameroon » et de l’anglophonie : un grotesque montage de prétendues élites du Nord-ouest et Sud-ouest assoiffées de pouvoir
CAMEROUN :: POINT DE VUE

Cameroun, La Génération Spontanée Du « Southern Cameroon » Et De L’anglophonie : Un Grotesque Montage De Prétendues Élites Du Nord-Ouest Et Sud-Ouest Assoiffées De Pouvoir :: Cameroon

Exercer du chantage sur le gouvernement afin d’obtenir des postes : tel est l’activité favorite de nos fameuses « élites », toutes régions et partis politiques confondus. Les récents événements du Nord-ouest et du Sud-ouest en sont une illustration supplémentaire. Les individus de chaque région du Cameroun désireux de bénéficier égoïstement des largesses du pouvoir se cramponnent tous désespérément sur différents arguments, pour la plupart fallacieux et antipatriotiques, pour exercer un chantage odieux et permanent sur le gouvernement, tout en se présentant dans le même temps en interlocuteurs valables et incontournables de leurs régions d’origine. L’argument d’un « Southern Cameroon » totalement différent de la « République du Cameroun » en est un, et est utilisé à dessein par cette catégorie d’individus originaires des régions du Nord-ouest et du Sud-ouest. A cet argument ils greffent un autre : la langue anglaise, et l’opposent stratégiquement à la langue française. Dans leur désir de conquête de postes administratifs et politiques, ils embarquent les masses populaires en usant tout naturellement de populisme, à savoir d’explications mensongères et simples, apparemment évidentes, de leurs difficultés quotidiennes. Au nombre de celles-ci — en tout cas celle la plus usitée —, leur marginalisation par les autres communautés présentes sur le territoire national. 

Un chantage ancien et ininterrompu.

     Tout d’abord, qu’on se le dise bien : les arguments de l’existence d’un « Southern Cameroons » et d’une « anglophonie », emportent l’adhésion de la quasi-totalité des natifs des régions du Nord-ouest et du Sud-ouest camerounais. Les divergences apparaissent simplement sur l’usage qui en est fait, et ce dernier lui-même dépend du gain que chacun en tire par rapport à sa position sociale. Il va sans dire qu’un membre du gouvernement se comporte différemment de son congénère qui, de son côté, se considère comme étant également une « élite » mais sans être pour autant ministre. 
     Deuxièmement, le chantage sur la base de ces deux arguments ne date pas d’aujourd’hui. Il date du lendemain de la réunification. 
     Les jeunes générations d’aujourd’hui, à savoir les « nés après 1982, voire un peu avant », ne le savent plus aujourd’hui, mais la réunification a causé d’énormes problèmes d’harmonisation au sein de l’administration. Agacé, le Président Ahidjo avait pris des mesures exceptionnelles pour favoriser les natifs du Cameroun Occidental. Il avait par exemple décidé leur intégration d’office dans les administrations de leurs choix, et aux grades sollicités. Il était épuisé par l’incessant chantage de John Ngu Foncha. Dès qu’un Camerounais occidental se voyait refusé de recrutement dans une administration quelconque sur la base de cursus insuffisant ou de diplômes douteux, il s’empressait d’aller se plaindre auprès de Foncha. Ce dernier collectait ainsi régulièrement ce type de récriminations, et faisait irruption au bureau d’Ahidjo en ces termes : « voyez comment les Anglophones sont lésés dans la réunification ». Immédiatement, Ahidjo prenait le téléphone, appelait le ministre de l’administration concernée, et Foncha repartait satisfait. Las des interventions intempestives de Foncha, Ahidjo a décidé de nommer un Camerounais occidental au Ministère de la Fonction Publique : Fonlon Bernard. Pourquoi ce choix ? Parce que Fonlon était déjà un des porte-drapeaux des intempestives récriminations des natifs du Nord-ouest et du Sud-ouest aujourd’hui. Aussitôt arrivé à ce poste, il s’était mis à intégrer dans la fonction publique tous les Camerounais occidentaux qui le désiraient, sans s’attarder sur leurs diplômes, au point où ce favoritisme avait à l’époque provoqué des murmures. 
     Un gardien de la paix au Nigeria, était intégré commissaire de police au Cameroun ; un banal médaillé des jeux scolaires au Nigeria ou un ancien footballeur d’Enugu était intégré maître d’éducation physique et sportive ; un greffier de Lagos ou d’Ibadan, voire même un banal employé dans un palais de justice quelque part, était intégré magistrat, etc. Toutefois, les Camerounais orientaux s’étaient malgré tout mis à accepter finalement de bonne grâce ce traitement privilégié, estimant que c’était le prix à payer pour la réunification, à savoir, la reconstitution du Cameroun divisé le 04 mars 1916. Ils étaient encore habités par la colère du 11 juin 1961, jour où le « Northern Cameroons » avait été intégré au Nigeria. Il faut dire qu’à l’époque, l’esprit était fortement au nationalisme. Le Cameroun sortait de la lutte pour l’indépendance et il y existait un réel amour pour les Camerounais occidentaux. 

Relever le niveau de vie des Camerounais occidentaux : la grande tâche du gouvernement après la réunification.

     L’une des tâches que le président Ahidjo a entreprise au lendemain de la réunification, a été de relever sensiblement le niveau de vie des populations d’outre-Moungo. Personnellement, tout gosse, j’avais eu le bonheur de séjourner pour la première fois au Cameroun occidental en 1964, soit trois années après la réunification. Mon père, fonctionnaire de la Jeunesse et des Sports, m’y avait emmené avec ma mère à la faveur des jeux OSSUC organisés pour la première fois à Buea et baptisés « Jeux de la réunification ». C’était pendant les congés de Pâques. Puis, j’y suis retourné au mois de juillet en colonies de vacances à Victoria (Limbe), à « Man of war bay », lieu qui sert aujourd’hui de base au BIR et qui avait été jadis un comptoir de ventes d’esclaves (il existait encore à l’époque les galeries dans lesquelles ils étaient parqués avant d’être embarqués dans des bateaux, ainsi que les chaînes qui les maintenaient attachés). 
     Autant au Cameroun oriental il n’y avait rien, autant au Cameroun occidental en 1964 c’était la catastrophe !!!! Franchement, les Anglais se sont encore plus moqués de nous que ne l’ont fait les Français. Mes yeux d’enfants avaient été terriblement frappés par l’épouvantable misère qui régnait de l’autre côté du Mungo. Je peux dire que plus de la moitié des gens rencontrés dans les rues marchaient encore pieds-nus. C’était terrible !!!!! L’usine Bata qui avait déjà démocratisé le port de la chaussure au Cameroun oriental n’avait pas encore pu pénétrer le Cameroun occidental. En plus, fait plus choquant, il y existait encore la ségrégation raciale. Les belles plages dans lesquelles se baignent innocemment les Camerounais aujourd’hui à Limbe, étaient, jusqu’en 1970, interdites aux Noirs !!!!!!!!!!!!  Le président Ahidjo a dû lutter contre cela. Il a construit la route Douala-Tiko, et l’a inaugurée en 1969. Avant celle-ci, pour se rendre au Cameroun occidental, il fallait passer par Loum où se situait le poste frontière, ou alors Santa lorsqu’on se rendait à Bamenda. En même temps, il a construit le chemin de fer Douala-Kumba. 

     A la faveur de ces deux réalisations de grande importance, les Camerounais occidentaux se sont rués au Cameroun oriental à la recherche du travail et d’une vie meilleure. Ils y étaient naturellement accueillis avec amour. Ils se sont mis à s’installer dans toutes les villes importantes du sud du Cameroun oriental : Douala, Yaoundé, Bafoussam, Nkongsamba, etc. De même, le président Ahidjo avait attribué à la quasi-totalité des élèves du secondaire au Cameroun occidental des bourses de l’Etat camerounais alors que tel n’était pas le cas au Cameroun oriental. Le Ministère de l’Education Nationale était un Ministère Fédéral, et non pas fédéré, comme bien d’autres. Enfin, pendant longtemps, y compris bien après 1972, nul ne peut véritablement dire si l’impôt était exigé aux Camerounais occidentaux. L’ex-Premier ministre du Cameroun oriental, Assale Charles, m’avait ainsi confié que chaque année, de 1962 à 1965, date à laquelle il fut limogé, il se retrouvait obligé de combler le budget du Cameroun occidental où Foncha était Premier ministre tout en étant vice-président fédéral, afin de pouvoir continuer à y payer les fonctionnaires. 
     
Mais, malgré tout ceci, les récriminations des Camerounais occidentaux n’ont fait que croître, sans cesse, indéfiniment. 
     Toutefois, malheureusement, le gouvernement camerounais a bien maladroitement jeté de l’huile sur le feu de la contestation outre-Mungo. 

Les deux monumentales erreurs politiques des présidents  Ahidjo et Biya envers le Cameroun occidental. 

     1971. Le président Houari Boumediene d’Algérie décide de nationaliser les avoirs pétroliers français dans son pays. Paris n’ose pas répliquer par la force comme lorsque Nasser, président égyptien, avait nationalisé le canal de suez en 1956. Les paras français avaient sauté sur l’Egypte. Il choisit une autre solution. Quelle avait-elle été ? L’exploitation de la poche de pétrole découverte au Cameroun en 1954 et mise en réserve par les accords de coopération signés avec Ahmadou Ahidjo au mois de décembre 1958, et qui en fait la propriété exclusive de la France. Toutefois, entre temps, une nappe de pétrole encore plus importante a été découverte au Cameroun occidental. C’est désormais celle-là qui naturellement se met à intéresser Paris et qu’il choisit d’exploiter. Mais, problème : en 1971, la guerre de sécession du Biafra vient tout juste de s’achever. Il y a lieu de craindre une contagion de celle-ci au Cameroun occidental en entament l’exploitation de cette nappe de pétrole. Unique solution pour prévenir ce risque : abolir le fédéralisme au Cameroun. Ahmadou Ahidjo est, sans attendre, convoqué à Paris pour se faire intimer cet ordre. En sa qualité de protégé et d’obligé de la France, il ne peut que s’exécuter. 

     Dès le début de l’année 1972, les services spéciaux camerounais se mettent à faire circuler l’inquiétante rumeur selon laquelle le Nigeria s’apprêterait à envahir le Cameroun occidental. L’armée camerounaise y est par conséquent dare-dare déployée en masse, avec l’approbation évidente et enthousiaste de la population, y compris en premier lieu les Camerounais occidentaux. Au début du mois de mai, Ahidjo repart en France. Il lui est intimé l’ordre de se dépêcher, car entamer l’exploitation d’une nappe de pétrole nécessite des travaux de préparation qui peuvent durée trois, quatre, voire cinq années successives, selon les sites. Sans plus attendre, de retour au Cameroun, il convoque d’urgence les députés à l’Assemblée nationale, et les membres du Comité Central de l’Union Nationale Camerounaise, UNC, au lac municipal, avec un ordre du jour « communiqué séance tenante ». Il commence par la permanence du parti. Après l’exécution de l’hymne national, il annonce à ses « camarades » qu’il a décidé de mettre fin au fédéralisme au Cameroun. Stupéfaction générale de ceux-ci. Ils se ressaisissent et se mettent à applaudir bruyamment cette décision « hautement patriotique » (conformément à la propagande de l’époque) … sauf ceux originaires du Cameroun occidental. Ils comprennent immédiatement la profonde signification de ces simples paroles, en termes de pertes probable d’avantages personnels et s’en inquiètent. Pendant qu’ils sont encore abasourdis, Ahidjo leur demande de se rendre avec lui à l’Assemblée nationale. Ils montent tous dans les voitures. Une fois en ces lieux, il annonce de nouveau sa décision aux députés médusés. Un tonnerre d’applaudissements éclate après un temps d’hésitation dans l’hémicycle. L’hymne national y est de nouveau bruyamment entonné. Mais, pas par les députés fédéraux du Cameroun occidental. 

     Qu’avait dit exactement Ahidjo aux représentants du peuple ce fameux jour ? 1/- Que le fédéralisme est « budgétivore » ; 2/- que ce n’est qu’une étape « dans le vaste chantier de la construction nationale » ; 3/- qu’il faut désormais passer à une étape supérieure pour renforcer « l’unité nationale » ; 4/- et pour concrétiser le tout, un referendum sera organisé quinze jours plus tard. Au journal parlé de 13h de Radio-Cameroun, le peuple est à son tour informé. La surprise est totale et générale. 
     Dès le lendemain, les ministres et fonctionnaires sont déversés sur les routes du Cameroun, pour porter la bonne nouvelle au peuple qui n’y pige rien du tout. Tout juste hier, on lui vantait la « réussite exemplaire » du fédéralisme à la camerounaise. Voici que subitement, on se met à lui dire le contraire. Où se trouve la vérité ? Impossible de savoir. 
     Quoi qu’il en soit, au jour dit, à savoir le 20 mai 1972, les Camerounais ne découvrent dans les bureaux de vote que des bulletins portant les mentions « oui » et « yes ». Pas de bulletins avec la mention « non ». Naturellement, le « yes » est un gigantesque plébiscite. « Le peuple camerounais a manifesté sa grande maturité devant l’histoire en votant massivement oui au referendum », déclare en « mangeant la bouche » Ahidjo. Ce coup de force, véritable coup d’Etat, a été une des grandes erreurs politiques à la fois du règne d’Ahidjo et de l’histoire du Cameroun dont nous subissons dramatiquement malheureusement les conséquences aujourd’hui. 
     Ahidjo aurait pu atténuer son coup de force en autorisant qu’il se déroule une authentique campagne électorale, avec, d’un côté, des personnes prônant le « oui », de l’autre, d’autres prônant le « non ». Mais, les autocrates s’embarrassent-ils souvent de ces élégances totalement superflues à leurs yeux ? En tout cas, le choc est immense au Cameroun occidental et l’incompréhension au Cameroun oriental. Le coup est d’autant plus accusé par les Camerounais occidentaux que Foncha et Muna sont réduits à néant. Quoi qu’il en soit, le Cameroun devient une « République unie », et cesse d’être une « République Fédérale ». Le Cameroun occidental est transformé en deux provinces dépendant désormais exclusivement du pouvoir de Yaoundé. Ahmadou Ahidjo quitte le pouvoir en laissant cette plaie béante dans le cœur des ex-Camerounais occidentaux. 
    Paul Biya en lui succédant, de toute évidence, semble ne pas avoir mesuré la portée du traumatisme subi de l’autre côté du Mungo. En effet, au mois de janvier 1984, il l’aggrave même plutôt. Il supprime, purement et simplement, le qualificatif « Unie ». Le Cameroun devient « la République du Cameroun » tout court. Il reprend le nom d’avant la réunification. C’est une maladresse monumentale. 
     Sur le coup, Paul Biya ne se rend pas compte de l’impact de cette décision sur le plan symbolique, auprès des ex-Camerounais occidentaux. Pourtant pour ceux-ci, il a procédé à une absorption pure et simple de l’ex-Cameroun occidental. Nos deux premiers présidents de la république, Ahidjo et Biya, ont ainsi véritablement composé les ingrédients de la naissance du mouvement clandestin SCNC. Pour tout dire, ils en sont les authentiques géniteurs. Que gagnait Paul Biya à abolir le qualificatif « unie » ? Lui seul peut nous le dire. 
     Une année plus tard, à savoir en 1985, il a tenté de rattraper sa monumentale gourde en organisant un congrès de l’UNC à Bamenda, à l’issue duquel il a débaptisé l’UNC, et la transformée en RDPC. Peine perdue. Même les quelques phrases qu’il prononce laborieusement en anglais, « I was born cameroonian, I will die cameroonian » n’y peuvent rien. La blessure est déjà trop profonde … En fait, il a pathologiquement une connaissance administrative du Cameroun, et rien d’autre. Il connaît ainsi davantage le Cameroun des dossiers et que du terrain. Cette funeste décision qu’il a prise en demeurera une preuve patente dans l’histoire du Cameroun… 
     Toutefois, attardons-nous à la lutte idéologique dans la partie du Cameroun sous administration britannique de 1916 à 1961.

L’affrontement Emmanuel Endeley / John Ngu Foncha.

     C’est connu, Emmanuel Endeley et John Ngu Foncha se sont affrontés sur la question de la réunification du Cameroun. Finalement, l’histoire a fait d’Endeley un sécessionniste, et de Foncha un réunificationniste. 
     Mais, la réalité est tout autre. L’affrontement Endeley/Foncha était avant tout un affrontement idéologique, entre démocratie et tyrannie, indépendance et domination étrangère. 
     Au commencement, Endeley était favorable à la reconstitution du Kamerun sur ses frontières d’avant le 4 mars 1916, c’est-à-dire à la réunification. Mais, pourquoi a-t-il par la suite changé d’opinion ? Pour trois raisons principales. 1/- Parce que du côté du Cameroun sous administration française, la seule formation politique qui prônait la réunification était persécutée : l’UPC. 2/- Parce que les autres partis politiques n’étaient que des appendices locaux des partis politiques français et évoquaient de ce fait bien vaguement la question de la réunification et de l’indépendance. 3/- Parce que les politiciens de Yaoundé non persécutés, semblaient s’accommoder de l’instauration progressive d’un régime de terreur dans leur partie du Cameroun. 
     Ceci explique le célèbre document qu’il avait publié à la veille du referendum du 11 février 1961 : 

    « Presque tout le monde (…) a entendu le mot LIBERTÉ (…) se déplacer librement ; parler en public librement ; adorer librement son Dieu ; parler sans crainte de tracasseries (…) si vous votez pour la République du Cameroun, vous inviterez un nouveau système sous lequel chacun vit dans la crainte de la Police et de l'Armée. Vous ne serez pas libres de vous déplacer ; vous ne pourrez pas librement discuter vos vues politiques en public ; (…); et vous pouvez être arrêtés et bastonnés par la Police et emprisonnés même sans un procès équitable.... (…) Si vous votez pour la République du Cameroun, vous échouerez pour toujours à garantir l'indépendance pour le Cameroun  parce que la République du Cameroun est toujours une COLONIE de la France ».

     Foncha John Ngu, pour sa part, était un autocrate pour qui comptait avant tout la détention du pouvoir. A la faveur de la réunification, il allait devenir vice-président du Cameroun, ce qu’il ne pouvait guère devenir au Nigeria. Que représentait le Southern Cameroons en termes de population dans le Nigeria déjà peuplé de plus de cent (100) millions d’habitants ? Dans sa logique du pouvoir tyrannique, telle avait été sa réponse à Endeley.

« … je souhaite répondre à une résolution du CPNC (le parti d’Endeley) qui prétendait, entre autre, qu’un vote en faveur de la réunification avec la République du Cameroun était sans signification et ne pouvait pas influencer les gens qui opteraient pour l’union avec la fédération avec le Nigeria ; qu’ils demanderaient aux Nations Unies de diviser le territoire en deux parties : ceux qui désirent l’union avec le Nigeria et ceux qui cherchent à s’unir à la République du Cameroun. Ce qu’ils disaient là avait pour but la répétition des désordres civils et tribaux qui ont lieu actuellement dans la République du Congo. 
     Un vote en faveur de la réunification, engagera tout le peuple du Cameroun méridional. Cela parce que le plébiscite a été accepté, non seulement par tous les partis du Cameroun méridional, mais aussi par l’autorité administrante et par les Nations Unies. La Résolution des Nations Unies, en octobre 1959, fut presqu’unanimement supportée par toutes les nations membres présentes (…) 
     Pour ce qui est du partage du territoire entre ceux en faveur de la réunification et ceux qui veulent l’intégration avec le Nigeria, je voudrais rappeler au CPNC que M. Mbilé et le Dr Endeley ont tenté cela aux Nations Unies et n’ont pas réussi. (…) 
     Quant à ce qui est que le Cameroun devienne un second Congo, déchiré par les luttes tribales et le désordre civil, je voudrais préciser au CPNC que nous possédons une force de police prête à veiller que la loi et l’ordre seront respectés dans le Cameroun méridional. Elle arrêterait tous ceux qui commenceraient les désordres et ceux-là seraient amenés à finir rapidement. Si la police est insuffisante pour maintenir l’ordre, je rappelle que les forces britanniques sont là, et qu’elles seraient capables d’aider cette police. » (1)

     Exactement comme Ahidjo qui venait d’exhorter Paris de ne pas retirer l’armée française de notre pays, Foncha était prêt à faire intervenir l’armée britannique contre les Camerounais pour la sauvegarde de son pouvoir. Il était un autocrate, d’où son rapprochement avec Ahidjo. 
    Enfin, l’affrontement Endeley/Foncha, était aussi un affrontement idéologique nord-ouest/sud-ouest actuels. Les populations de Bamenda redoutaient une invasion igbo en se maintenant au Nigeria, car les Igbo se situent juste derrière la frontière. Tandis que celles de Buea, forment sensiblement un même peuple avec les populations installées jusqu’à Calabar, loin en terre nigériane. 
     Par ailleurs, les « Buea » considéraient les « Bamenda » comme des envahisseurs. Finalement, les « Bamenda » étant plus nombreux, le « oui » au referendum l’a emporté sur le « non », et la réunification a pu se réaliser. 
     Lors de la conférence de Foumban, du 17 au 21 juillet 1961, destinées à jeter les bases juridiques du futur Etat fédéral,  les pro-Foncha ont fait triompher leurs vues : pas un mot sur la terreur qu’Ahidjo était en train d’installer sur le pays. Ils sont venus pour acquérir des postes, ils en ont obtenu à profusion … 

L’irruption du « Southern Cameroons ».

     A la suite des maladresses d’Ahidjo et Biya à l’endroit des Camerounais occidentaux évoquées plus haut, l’esprit sécessionniste latent de groupuscules de camerounais occidentaux, s’est réveillé, car il disposait désormais de grain à moudre. Il s’est cristallisé dans un mouvement clandestin à qui s’est attribué pour dénomination « South Cameroon National Council ». L’argumentation de ce groupuscule est populiste, fort simple, mais, naturellement mensongère. En quoi consiste-elle ?
 
     1/- Le Kamerun n’a jamais réellement existé. Le territoire dénommé Kamerun, de 1884 à 1916, est une fiction. Il n’était pas doté d’une administration. Il ne représentait guère une nation. Ce sont quelques roitelets duala qui ont signé de futiles et stupides documents sans importance et sans valeur hors de leurs ridicules « royaumes » avec des commerçants allemands, et rien d’autre. Le reste des populations, y compris leurs propres sujets n’avaient guère été consulté. En conséquence, en dehors d’une poche de duala, les autres peuples n’étaient nullement concernés par ces prétendus « traités » dont du reste ces mêmes roitelets eux-mêmes n’ont jamais détenu la moindre copie. 
    2/- Il n’y a pas eu division du pays en 1916 par les colonialistes, mais plutôt création de deux entités bien distinctes : le « Cameroun français », d’une part, et le « Southern Cameroons » d’autre part. Comment aurait-il pu avoir division dès lors que le Kamerun n’existait pas, n’a jamais existé ? 
    3/- La prétendue réunification du 1er octobre 1961 n’a été d’une annexion d’un Etat indépendant ce jour-là justement, le « Southern Camerouns », le privant ainsi arbitrairement et immédiatement de cette indépendance. 
    4/- Le « Southern Cameroons » se portait infiniment mieux sous administration britannique, de 1916 à 1961, que depuis 55 ans que dure l’invasion-occupation par la « République du Cameroun » actuellement.  
    5/- L’appellation « Southern Cameroons » elle-même est impropre, car le vrai nom du territoire est, et a du reste toujours été, « Ambazonie ». 
     Telles sont les « thèses » des cinglés sécessionnistes Camerounais occidentaux, en réalité des maîtres-chanteurs avides de postes politiques et administratifs. En un mot, ces individus réécrivent l’histoire, la modèlent à leur convenance. 

     Nul besoin de s’attarder sur ces « thèses », d’y gaspiller sa salive, elles sont tout simplement stupides. Le fait le plus révélateur dans ce charabia est l’acceptation avec enthousiasme par l’ex-président du SCNC d’un poste à la Cour Suprême du Cameroun. Aussitôt qu’il a été nommé « Conseiller » à cette plus haute instance judiciaire du pays dont il désirait jusque-là se séparer, il a claqué sans état d’âme la porte du SCNC, a cessé de parler de sécession. Avec un salaire de deux millions (2.000.000) par mois, et un véhicule de fonction avec chauffeur en plus, il a obtenu ce qu’il cherchait depuis longtemps : une belle vie sur le dos des niais qui l’ont, des années durant, écouté, acclamé, encensé. Bref, il a, une fois de plus, démontré que tout le chahut que font les « sécessionnistes » ne vise qu’une chose : occuper de grands postes au Cameroun. 
 
L’anglophonie comme fondement d’un partage égalitaire de postes politiques et administratifs.

     Afin d’entraîner le maximum de personnes dans leur démarche de conquête du pouvoir, les Camerounais occidentaux « sécessionnistes » manipulent habilement de nos jours la question de l’usage de la langue anglaise en l’opposant à celui de la langue française. Leur thèse, sur ce point, en complément aux précédentes, est la suivante : dès lors que le Cameroun est un pays « bilingue », à savoir français/anglais, le partage du pouvoir devrait tout naturellement s’opérer de manière égale entre les locuteurs des deux langues, c’est-à-dire 50% des postes pour les « francophones », 50% des postes pour les « anglophones ». Concrètement, s’il y a trente (30) ministres, quinze (15) « anglophones » et quinze (15) « francophones ». S’il y a dix (10) gouverneurs de régions, cinq (5) « anglophones » et cinq (5) « francophones », s’il y a six (6) postes de directeurs dans un ministère, trois (3) aux « anglophones » et trois (3) aux « francophones », etc. Cette thèse est renforcée dans leur argumentation par le fait que selon eux, il y a eu, le 1er octobre 1961, union de deux Etats « indépendants », le « Southern Cameroons » et la « République du Cameroun », et non pas une reconstitution d’un hypothétique Etat antérieur qui se serait appelé « Kamerun », ainsi que nous l’avons dit plus haut. Ils complètent leur argumentation par le refus de considérer les deux régions de l’ex-Cameroun occidental que sont aujourd’hui le nord-ouest et le sud-ouest comme des régions, sans plus, au même titre que les sept autres que compte le pays. 
     Naturellement, l’idée d’un partage en deux, c’est-à-dire à égalité, des postes politiques et administratifs au Cameroun, ne peut que profondément enthousiasmer et faire fantasmer au plus haut point la quasi-totalité des ex-Camerounais occidentaux. Sur la base de cette idée, la « tromperie » des  « francophones » envers les « anglophones » devient d’une évidente clarté. Ils raisonnent comme dans un mariage polygamique, ou une femme qui a un gosse exige d’être traitée à égalité avec sa rivale qui en a quinze. Dans leur esprit, pour tout dire, le Cameroun est un mariage polygamique de deux épouses, et rien d’autre. 

La faute au gouvernement : son idée saugrenue d’un Cameroun « bilingue » et « biculturel » martelée depuis le 1er octobre 1961.

     En fait, le gouvernement camerounais a été pris dans son propre piège. Depuis 1961, il n’a de cesse de marteler que le Cameroun est un pays « bilingue », et « biculturel ». Cette contre-vérité aussi scandaleuse que monumentale s’est finalement ancrée dans l’esprit de la population au point où elle n’y réfléchit même plus. Elle ne s’attarde même plus sur sa véracité ou non. Comment par conséquent aujourd’hui refuser d’appliquer entièrement ce supposé « biculturalisme » ? Le gouvernement camerounais a systématiquement ignoré les langues nationales et les cultures nationales, dans sa politique aveugle « d’unité nationale », car selon lui, celles-ci seraient un facteur de division, et que ce sont plutôt les langues coloniales qui seraient un facteur d’unité. 55 ans plus part, les résultats sont là : l’anglais et le français n’ont nullement uni les Camerounais, ils les ont plutôt profondément divisés. A preuve, les batailles d’aujourd’hui… C’est le lieu, en toute logique, de reconsidérer le discours officiel. Le Cameroun est plutôt un pays « multilingue » et « multiculturel », car il y cohabite plusieurs langues et plusieurs cultures, sur lesquelles sont venues se superposer l’anglais et le français. 

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