La contestation de la réélection d'Ali Bongo à la tête du Gabon provient-elle des faiblesses du processus électoral ou de sa volonté de s'éterniser au pouvoir ?
GABON :: LE DéBAT

La contestation de la réélection d'Ali Bongo à la tête du Gabon provient-elle des faiblesses du processus électoral ou de sa volonté de s'éterniser au pouvoir ?

En Afrique, les matches de football ont toujours été les compétitions les plus disputées, les plus commentées laissant sur les carreaux d'interminables débats. En politique, le début des années 90 marque l'avènement d'élections multipartites avec la compétition électorale qui, du coup est devenu le sport le plus populaire. 

Et ainsi que les connaisseurs s'accordent à le dire, tout comme les matches de football, certaines élections méritent d'être applaudies, d'autres sont de tragiques parodies, mais la plupart se situent entre ces deux extrêmes. Vingt six ans après le début de l'ère des élections multipartites en Afrique, il existe encore des améliorations à apporter sur leurs issues

Toujours en Afrique, il n'est pas rare que les passations de pouvoir, suite à une victoire de l'opposition, se fassent de manière pacifique La plupart de ces régimes sont le fruit de compromis négociés sur des durées relativement longues. 

D'autres élections, en revanche, révèlent une évolution différente. Comme l'a indiqué feu Omar Bongo, qui déclara un jour qu' « on n'organise pas des élections pour les perdre », de telles compétitions sont surtout des opérations cosmétiques destinées à légitimer le statu quo. Elles se déroulent souvent dans des pays où les mêmes dirigeants sont au pouvoir depuis des décennies. Il y a quelques années, avant que les révolutions populaires en Tunisie et en Égypte ne provoquent la chute d'hommes forts, la plupart des élections en Afrique du Nord appartenaient à cette catégorie.

Actuellement, une dizaine de pays d'Afrique subsaharienne ont les mêmes dirigeants depuis des années. Ces dirigeants remportent les élections qu’ils organisent respectivement de diverses manières, notamment en supprimant les partis d'opposition ou « en les interdisant, en se comportant de façon à ce que ces partis boycottent l'élection dans son ensemble, en monopolisant les ressources de l'État ou les médias, en intimidant les électeurs ou en fraudant purement et simplement.

Bien qu'ayant été entaché par les habituels cas de fraudes et de violences dans plusieurs régions, le déroulement du dernier scrutin au Nigéria, a été applaudi. Les analystes jugent que l'élection remportée par le président Muhammadu Buhari a été la plus irréprochable que le pays ait jamais connue. Bien avant, en Guinée, 52 années de dictature ont pris fin grâce à une élection qui semblait peu probable. Alpha Condé, un opposant de longue date, est devenu le premier président démocratiquement élu depuis l'indépendance.

Dans ces deux cas, comme dans de nombreux autres pays en Afrique, certains des éléments indispensables à la tenue d'une élection libre et juste faisaient défaut. La pratique des fraudes électorales, une expérience institutionnelle insuffisante et le manque de liberté et d'indépendance des médias n'ont cessé de menacer les processus électoraux

Etant donné les nombreuses faiblesses  des institutions de certains pays africains, la bataille acharnée qui caractérise souvent les élections qui y sont organisées peut parfois déboucher sur des troubles et des conflits violents. Les élections compétitives ne se sont pas toujours bien déroulées en Afrique. Au Cameroun, au Zimbabwe, en Côte d'Ivoire, au Congo RDC, au Gabon,  les élections ont eu tendance à affaiblir les institutions. Dans ces pays et tant d'autres, les élections ont contribué à accroître la polarisation des groupes ethniques et conduit à des crises diverses.

L'observation des élections en Afrique, se concentre souvent sur le jour du scrutin.  Une élection n'est pas un événement, mais un processus. Il est nécessaire de surveiller ce qui se produit des mois, si ce n'est des années, en amont. La réussite des élections est directement liée à l'indépendance du système judiciaire, à l'environnement médiatique et politique, ainsi qu'à la capacité de la société civile de participer à la vie publique.

La commission électorale a validé le 31 aôut dernier la réélection très serrée du président sortant, Ali Bongo Ondimba. Mais son adversaire Jean Ping crie à la « mascarade ». Résultats qui ont enclenché des interminables heures tendues à Libreville, la capitale. Habitués à la paix civile, les Gabonais se souviennent des troubles après l'élection d'Ali Bongo en 2009 dans la capitale économique Port-Gentil, avec des pillages meurtriers et l'incendie du consulat de France.

La Cenap (Commission électorale nationale) a annoncé que le président sortant avait remporté 49,85% des voix, contre 48,16% à Jean Ping, soit 5.594 voix d'avance dans un pays de 1,6 million d'habitants. C'est le résultat mirobolant d'un des 9 gouvernorats, le Haut Ogooué, la région natale d'Ali Bongo, qui aurait permis à ce dernier de remporter la victoire. Le président sortant y aurait obtenu 96% des voix et la participation y aurait atteint 99,98%. 

L'équipe de Jean Ping a réclamé un nouveau décompte dans cette région, alors que la participation n'a pas dépassé 60 % dans l'ensemble du pays.

Les problèmes qui ont surgi ces derniers jours au Gabon lors d'élections controversées  proviennent-elles des faiblesses des processus électoraux ou de sa volonté de s'éterniser au pouvoir ? Telle est la question de la semaine

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