Gouvernement, Assemblée, Sénat : Le désaveu de Paul Biya
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Le président de la République a renvoyé aux parlementaires le nouveau code pénal qu’ils viennent de voter. Pour une relecture. Un fait inédit. Décryptage.

Les observateurs avertis se demandaient comment allait finalement réagir le président de la République, lorsque la copie du code pénal «réaménagé», allait atterrir sur sa table, pour promulgation. Après avoir été adopté par les députés et les sénateurs, majoritairement de son parti politique. Parce que pour  l’une des rares fois, aucun texte de lois n’a provoqué autant de contestations, suscité autant de passion et d’indignation dans les couches sociales du pays, avec des arguments «béton» qui ne pouvaient  se casser que devant des dictateurs comme Hitler, Mussolini, Duvalier,  ou d’autres monarques des Républiques bananières… Sur le plan technique, ce sont les avocats, spécialistes du droit, utilisateurs au quotidien du code pénal, qui ont marqué leur stupéfaction.

D’abord parce qu’ils n’ont pas été consultés pour l’élaboration de ce texte d’importance nationale, vieux d’une cinquantaine d’années, et qui doit réglementer leur travail, qui se sont élevés pour crier à l’imposture. Dans l’urgence, le Bâtonnier, Jackson Ngnié Kamga, a réuni à Yaoundé un Conseil extraordinaire du Barreau, à l’issue duquel il a adressé aux députés  un mémorandum détaillé sur les tares du texte soumis à leur examen. Comme pour faire diversion, les membres du Barreau ont été précipitamment reçus par le ministre de la justice, Laurent Esso.

D’aucuns ont naïvement pensé que le garde des sceaux avait «compris» les avocats. Mais, on a fini par comprendre  qu’il a dévoilé sa détermination lorsque devant les députés, il a plutôt tourné en dérision le Barreau, en expliquant à la «représentation du peuple» que ce texte avait déjà été soumis à l’examen du Barreau depuis 2011. Et que le Bâtonnier actuel n’avait qu’à voir ses prédécesseurs, en  vertu de la fameuse «continuité du service».

Comme on pouvait s’y attendre, le texte est passé, comme lettre à la poste,  devant la Chambre basse du parlement, malgré les amendements proposés par l’opposition, notamment le groupe parlementaire du Sdf, et même nombre de députés de la majorité présidentielle.

D’aucuns se mettaient à rêver que l’espoir pouvait venir de la Chambre haute, le Sénat. Le texte y est d’ailleurs passé plus vite qu’à l’Assemblée mardi  28 juin 2016. Le même jour, le Conseil de l’Ordre a tenu une autre  session  extraordinaire à Douala, la deuxième en moins de deux semaines, pour solliciter l’arbitrage de Paul Biya qui a la dernière  griffe à mette au texte : la promulgation. Cette activité épistolaire du Barreau est fortement soutenue sur le terrain par les marches de protestation des avocats anglophones qui, depuis plusieurs jours, battent le macadam à Bamenda et à Kumba. Avec l’intention de poursuivre leurs manifestations, tant que le président ne les aura pas écoutés.

Entre temps, on ne peut pas botter en touche l’acte symbolique des groupes parlementaires du Sdf à  l’Assemblée nationale et au Sénat, minoritaires certes dans les deux chambres, mais qui ont décidé de claquer la porte des travaux, «pour ne pas cautionner la forfaiture», selon les termes d’un député du Social democratic front (Sdf). Un singleton du parti au pouvoir, qui a préféré mettre sa tête à la guillotine, plutôt que de cautionner « la mascarade », est bien l’honorable Martin Oyono, député Rdpc de l’Océan, qui s’est désolidarisé de ses camarades, en refusant de se rendre complice du vote d’un texte « dangereux pour  l’avenir pays ».

Selon des informations de la Nouvelle Expression, la campagne anti code pénal que différentes organisations au Cameroun menaient en direction des chancelleries occidentales, très sensibilisées sur la pertinence des arguments fournis, auraient finalement décidé Paul Biya à lâcher ses  parlementaires et son gouvernement. Manifestement.

Mais les anti-code pénal, version gouvernement, devraient  rester  passablement plus vigilants  qu’enthousiastes. En attendant de voir jusqu’où cette relecture   pourra bien aller.

Au niveau du parlement, la session boucle ses travaux demain vendredi. Y aura-t-il suffisamment de temps pour revoir ce texte en profondeur ? On attend de voir.

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