Paul Biya : 43 ans de pouvoir, un héritage de crise et de corruption au Cameroun
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Paul Biya : 43 ans de pouvoir, un héritage de crise et de corruption au Cameroun :: CAMEROON

Le règne de Paul Biya, l’un des plus longs de l’histoire africaine, touche à sa fin dans un climat d’incertitude et de désillusion. Au pouvoir depuis 1982, le président camerounais laisse un pays fracturé, miné par la corruption et des inégalités criantes. Autrefois classé parmi les économies prometteuses, le Cameroun est aujourd’hui un pays pauvre très endetté, où 55% de la population vit sous le seuil de pauvreté malgré d’abondantes ressources naturelles .  

L’ère Biya se caractérise par un autoritarisme sournois. Sous couvert de stabilité, son régime a systématiquement étouffé les libertés, menaçant d’arrestation les critiques du président et verrouillant l’espace politique. En 2023, des journalistes comme Martinez Zogo ont été assassinés pour avoir dénoncé des malversations, illustrant une répression brutale . La crise anglophone, née de la marginalisation des régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, symbolise l’échec de la gouvernance inclusive. Depuis 2016, ce conflit a fait 6 000 morts et déplacé 638 000 personnes, les séparatistes et l’armée se renvoyant les exactions .  

Sur le plan économique, le bilan est accablant. Le Cameroun a été sacré "pays le plus corrompu au monde" en 1998 et 1999 par Transparency International . Des milliards de dollars disparaissent dans des scandales, comme les fonds de la Coupe du monde 1994 "égarés entre Paris et New York", tandis que les infrastructures se délitent . Le choix d’organiser seul la Coupe d’Afrique des Nations 2022, coûtant 1 500 milliards de FCFA, a aggravé la dette dans un pays où des enseignants sont en grève et des femmes accouchent devant des hôpitaux saturés . 

La question de la succession plane comme une menace. À 93 ans, Biya, absent de la scène publique pendant des semaines, n’a aucun plan de relève. Son successeur constitutionnel, Marcel Niat Njifenji (89 ans), est tout aussi âgé et fragile . Cette incertitude alimente les craintes d’une lutte de pouvoir entre clans, d’autant que son fils Franck Biya, pressenti pour lui succéder, bénéficie de soutiens internationaux .  

Le tribalisme institutionnalisé a creusé les fractures. Les Beti, ethnie du président, monopolisent postes clés et ressources, alimentant les ressentiments régionaux . Le refus de rapatrier la dépouille d’Ahmadou Ahidjo, son prédécesseur, incarne l’incapacité à panser les blessures historiques .  

Aujourd’hui, les Camerounais attendent trois choses : une amélioration de leurs conditions de vie, la sécurité face à Boko Haram, et la fin des conflits régionaux. Paul Biya quittera le pouvoir sans avoir relevé ces défis, laissant une nation au bord de l’implosion .  

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