Quelles élections législatives et municipales en 2020 au Cameroun ?
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Quelles élections législatives et municipales en 2020 au Cameroun ? :: CAMEROON

Incertitude. Initialement prévu en 2018, puis en 2019, le double scrutin devant conduire au renouvellement de l’Assemblée nationale et les conseils municipaux est désormais attendu en 2020. Mais on ne peut s’empêcher de se demander si les conditions seront remplies pour qu’il se tienne.

Bien malin qui pourrait dire quand se tiendront les prochaines élections municipales et législatives au Cameroun. Les mandats des conseillers municipaux et des députés élus le 30 septembre 2013 ont déjà été prorogés deux fois.

Le 15 juillet dernier un décret du président de la République prorogeait le mandat des conseillers municipaux jusqu’au 29 février 2020. Quelques jours plus tôt, un autre décret présidentiel indiquait que «le mandat des députés à l’Assemblée nationale est prorogé pour une durée de deux mois à compter du 29 octobre 2019». La date probable donc du scrutin couplé que l’on attendait en 2018 est février 2020.

Seulement rien ne permet de l’affirmer avec certitude. Et l’incertitude vient des raisons évoquées pour décaler deux fois déjà les élections des députés et des conseillers municipaux. Le décret de juillet qui prorogeait le mandat des conseillers municipaux «pour une durée de 12 mois à compter du 15 octobre 2018» n’avait mentionné aucune raison.

Mais celle qui revenait le plus souvent dans les analyses était la nécessité de désengorger le calendrier électoral. Surtout que dans la correspondance adressée le 14 juin 2018 aux présidents du Sénat et de l’Assemblée nationale pour leur demander de réunir leurs bureaux afin de les consulter sur le report des élections législatives et municipales, le président de la République faisait allusion à la difficulté de «l’organisation matérielle» de ces élections.

En 2018 en effet, il était prévu quatre scrutins différents : les sénatoriales, la présidentielle, les législatives et les municipales. « La tenue de ces élections présidentielles, législatives et municipales, au regard de la date de convocation du corps électoral entraînera un chevauchement des différentes opérations relatives à ces scrutins », avait écrit Paul Biya. Le même argument ne peut pas être avancé en 2019, année au cours de laquelle juste les élections municipales et législatives étaient attendues.

Harmonisation

L’exposé des motifs du projet de loi déposé le 25 juin à l’Assemblée nationale motivait la prorogation des mandats des députés et des conseillers municipaux en ces termes : « d’une part, pour permettre la tenue régulière de la session parlementaire ordinaire du mois de novembre, traditionnellement consacrée à l’examen de la loi de finances ; d’autre part, pour prendre en compte les différents délais légaux prévus tant par la Constitution que par la loi du 19 avril 2012 portant code électoral, modifiée et complétée par la loi du 21 décembre 2012, en vue d’une harmonisation destinée à permettre la tenue du double scrutin législatif et municipal devenu une tradition dans [notre] processus électoral
depuis 2007 ».

Si ces raisons tiennent la route, on est tout de même tenter de penser que d’autres encore pourraient rendre difficile l’organisation du double scrutin législatif et municipal en février 2020. Il s’agit notamment de la situation sécuritaire du pays, avec la crise qui perdure dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest depuis trois ans.

Aucune solution n’a été trouvée à cette crise entre-temps et on a du mal à entrevoir la fin des affrontements dans cette partie du pays d’ici février prochain. Sera-t-il donc possible d’organiser des élections crédibles dans la partie anglophone du Cameroun dans un contexte de crise ?

Certains n’hésitent pas à répondre par l’affirmative. Le principal argument qu’ils avancent est le fait que le scrutin présidentiel s’est bel et bien tenu le 7 octobre 2018, alors que la crise battait déjà son plein dans les régions anglophones.

Crise anglophone

Mais en face, on leur rétorque que cette fois-ci, il s’agira d’élections locales. La participation au scrutin présidentiel du 7 octobre 2018 a été particulièrement faible dans les régions anglophones : 05,36% dans le Nord-Ouest et 15,94% dans le Sud-Ouest.

De tels chiffres seraient difficilement acceptables pour des élections locales. Bien plus, si des candidats ont pu faire toute leur campagne électorale pour la présidentielle sans se rendre dans le Nord-Ouest et le Sud-Ouest, pour les législatives et les municipales, il faudra bien se présenter devant les personnes dont on sollicite les suffrages. Qui osera le faire dans les zones incontrôlées du Sud-Ouest et du NordOuest où les actuels élus ont d’ailleurs reçu parfois des menaces des séparatistes ?

Après deux reports des législatives et municipales, un autre est-il possible ? D’après l’article 170 du Code électoral, «(…) le Président de la République peut, par décret, proroger ou abréger le mandat des conseillers municipaux pour une durée n’excédant pas dix-huit (18) mois, après consultation du Gouvernement et du Bureau du Sénat». Ce qui n’offre plus vraiment de marge. Sauf que s’agissant du mandat des députés, l’article 15 de la Constitution ouvre un champ beaucoup plus large. «En cas de crise grave, le Président de la République peut, après consultation du président du Conseil constitutionnel et des bureaux de l’Assemblée Nationale et du Sénat, demander à l’Assemblée Nationale de décider par une loi de proroger ou d’abréger son mandat».

La crise anglophone est bien une crise grave. Et si l’on tient à organiser des élections couplées, alors on est bien
loin d’être sorti du brouillard.

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