CRISE ANGLOPHONE : Kamto et Tumi jouent à cache-cache
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Dans sa dernière lettre au peuple camerounais, datée du 28 avril 2019, le président du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC) estime que le Cardinal émérite de Douala reste le seul représentant valable des séparatistes dans un éventuel dialogue avec le pouvoir.

Maurice Kamto, le président du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC) sait parfaitement de quoi il parle depuis la prison principale de Yaoundé, où il est en détention provisoire depuis le 28 janvier 2019, suite aux manifestations publiques qu’il a organisées deux jours auparavant à Douala. Camer.be. Comme la plupart des sécessionnistes, le Cardinal Christian Tumi est originaire de Kumbo, l’un des foyers de la rébellion armée qui sévit dans les régions anglophones du Nord-Ouest et du Sud-Ouest depuis novembre 2016. Bien plus, la dernière grosse prise des séparatistes, Ni John Fru Ndi, a été réalisée justement à Kumbo.

Par ailleurs, c’est essentiellement à Kumbo que le journaliste camerounais Patrick Fandio a réalisé le documentaire sur les activités des sécessionnistes, diffusé sur la chaine de télévision France 24. C’est certainement, et à coup sûr, ces indices qui poussent Maurice Kamto à déclarer : « Ni la majorité des Camerounais, ni la communauté internationale ne sont favorables à la partition de notre pays (…) Un autre argument spécieux est de dire qu’il n’y a personne en face avec qui négocier. Il n’y a pas lieu d’épiloguer longuement sur ce point. Que l’on donne donc une chance à la All Anglophone Conference (AAC) que le Cardinal Christian Tumi et d’autres essaient d’organiser depuis un certain temps et se heurtent malheureusement à l’opposition du gouvernement camerounais.

Cette initiative pourrait être une pierre utile à la construction du dialogue inclusif auquel la situation du pays nous invite ». Des affirmations que le président du MRC assume, tant il est convenu que la solution à ce conflit, où des groupes armés se revendiquant d’un Etat imaginaire appelé « Ambazonie » tuent sans raison des civils innocents, pillent leurs biens, saccagent ou brûlent des édifices publics (écoles, hôpitaux et marchés), viendrait inéluctablement de Christian Tumi, qui reste l’une des personnalités morales crédibles de l’église catholique romaine au Cameroun. L'info claire et nette. Le leader du MRC avait déjà soutenu mordicus, il y a quelques mois, devant le Conseil constitutionnel, lors des audiences organisées pour résoudre le contentieux postélectoral, qu’il était capable, en l’espace de quarante jours, de mettre fin à la crise anglophone.

Le choix qu’il porte aujourd’hui sur le Cardinal Christian Tumi laisse quelque peu songeur. Rien dans cette lettre rédigée par l’ancien ministre délégué auprès de la Justice de 2004 à 2011 n’indique cependant que le choix porté sur Christian Tumi est le meilleur. Tant il n’est pas établi qu’il pourra être écouté par la branche armée de la rébellion. Autre difficulté qu’il pourrait rencontrer dans cette mission ô combien délicate, c’est la prolifération des mouvements sécessionnistes dans cette partie du Cameroun. Pas moins de 10 branches lourdement équipées de matériels de guerre mènent des activités clandestines en zone anglophone, avec parfois des revendications contradictoires.

Le prélat entretient par ailleurs des relations orageuses avec le pouvoir de Yaoundé. Ses prises de position en faveur du fédéralisme lui ont toujours attiré les foudres des adeptes de l’Etat unitaire. Ici encore, la forme de l’Etat telle qu’il la conçoit entre en conflit avec la posture des séparatistes. En 2017, déjà le Cardinal Tumi s’était, dans un livre intitulé « Cardinal Christian Tumi, libres propos d’un visionnaire : livre-interview », opposé à la sécession. « C’est difficile d’admettre la sécession », avait-il déclaré, estimant que c’est « le manque de dialogue qui nourrit la crise ».

« Il faut qu’on les écoute et qu’on cherche à savoir ce qu’ils veulent », avait-il soutenu en parlant des séparatistes. « Il faut privilégier le dialogue. Quand on dialogue, on résout beaucoup de problèmes. Ce qui fait problème, c’est qu’on n’a pas créé un forum de dialogue », avait-il conclu. Du coup, la proposition de Maurice Kamto de faire de l’archevêque émérite de Douala le principal interlocuteur du gouvernement dans le processus de résolution de la crise anglophone est voué à l’échec. Du simple fait des oppositions idéologiques.

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