Le talentueux monsieur Biya
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Le Conseil constitutionnel a déclaré Paul Biya vainqueur de l’élection présidentielle du 7 octobre 2018 au Cameroun. Mais entre nous, comment pouvait-il en être autrement ?

Le brillant Code électoral

Dès le lancement de ces présidentielles, tous les candidats –sauf Biya– se sont plaints du Code électoral. Ils ont contesté les bureaux de vote qui étaient installés dans des lieux non contrôlables comme les casernes militaires, les chefferies, les commissariats, etc. Et heureusement que ces lieux-là ont été remplacés à la veille du scrutin.

Mais ce qui me choque personnellement dans notre Code électoral, c’est que l’élection présidentielle se joue à un seul tour ! Et que dans son article 115 alinéa 3, il est stipulé que le procès-verbal d’Elecam est « supérieur » à la copie que détiennent les représentants des partis politiques. Sans oublier que pour être candidat, l’article 124(1) demande de verser une caution de 30 millions francs CFA alors que ce montant était préalablement fixé à 5 millions de FCFA seulement…

Les merveilleuses conditions de campagne

Déjà, le Cameroun comprend environ 360 communes sur toute l’étendue de son territoire. Et pourtant la campagne n’a été prévue que pour deux semaines seulement ! Quel homme ordinaire (en dehors de Pierre La Paix Ndamè) pouvait donc parcourir 25 villes en moyenne en moins de 24 heures seulement ? Hein ? Est-ce que ça fait sérieux ?

Surtout que pendant que les candidats (ordinaires, eux) étaient en train de morfler avec les maigres 15 millions qui leur avaient été alloués par l’Administration territoriale pour leur propagande, il y a un candidat surhumain qui bénéficiait d’un budget de campagne quasiment illimité illimitable ! Et c’est pour cela que ses grandes affiches et ses t-shirts se retrouvaient partout dans tous les coins de rues. C’est pour cela qu’il avait réquisitionné presque tous les fonctionnaires, ou en tous cas tous les véhicules administratifs puisqu’on les a retrouvés dans les centaines de meetings de campagne de son RDPC…

Le fantastique candidat-président

Paul Biya est un homme talentueux, et donc il ne pouvait pas perdre ces élections. Puisque c’est lui qui avait fixé le calendrier électoral (c’est lui qui avait choisi toutes les dates). C’est lui qui avait nommé les Directeurs d’Elecam, et c’est lui qui avait désigné les onze juges du Conseil constitutionnel qui seraient chargé de proclamer le résultat de ces élections présidentielles… C’est bizarre, non ?

Paul Biya était le seul arbitre. Et en même temps le président. Puisque pour son déplacement à Maroua le 29 septembre par exemple (le seul, d’ailleurs), on a mobilisé toutes les forces de l’ordre. Son court discours a retenu l’attention de tous les médias du pays, pas parce qu’il était candidat mais davantage parce qu’il était président. Et c’est avec cette stature de « l’expérience » qu’il s’est placé au-dessus de la mêlée des autres candidats, et que pour dire vrai Paul Biya n’a jamais réellement agi comme s’il était un postulant qui était venu devant les Camerounais afin de nous solliciter nos suffrages.

Le bourrage des urnes

Je ne fais pas un procès d’intention. Je ne dis pas que Paul Biya ne peut pas gagner ces élections à la régulière (les Camerounais ont déjà le syndrome de Stockholm). Je ne nie pas que le RDPC est le parti politique le plus représenté sur le territoire national, mais c’est justement ça le problème !

Car dans les communes les plus isolées de notre territoire où il est le seul parti représenté physiquement, qui peut témoigner des résultats qui sont issus de ces bureaux de vote ? Dans des contrées en crise comme la zone anglophone du Nord-Ouest et du Sud-Ouest qui sont en guerre (il faut le dire), qui peut contester les chiffres que les gens d’Elecam nous ont sortis de là ? Hein ? Est-ce que les autres candidats avaient des observateurs et des représentants dans tous les bureaux de vote ? Non ! Est-ce que les déplacés de guerre sont retournés dans leur localité d’origine afin de pouvoir voter ? Je n’en suis pas si sûr !

Mais dans tous les cas hein, la machine est tellement bien huilée et les méthodes si imperturbables qu’on ne peut s’empêcher de penser que ce système dit « biométrique » n’est en réalité qu’un système électoral biyamétrique…

Le talentueux monsieur Paul Biya

Donc comme prévu hein, le Conseil constitutionnel a déclaré monsieur Paul Biya vainqueur de l’élection présidentielle qui a eu lieu ici le 7 octobre. Mais entre nous les Camerounais, est-ce qu’il pouvait même en être autrement ?

Le talentueux monsieur Paul Biya ! Car pendant que ses adversaires battaient campagne, le bon monsieur recevait-lui tranquillement Ahmad Ahmad et il se projetait déjà sur la CAN de 2019.

L’expérimenté monsieur Paul Biya ! Car pendant les procès sur le contentieux électoral, on a constaté une coalition étrange entre le Minatd, Elecam, le RDPC mais également le Conseil constitutionnel !

Le machiavélique monsieur Paul Biya, car ces élections n’étaient ni plus ni moins qu’un simulacre de légitimité.

Puisque tous les Camerounais le savent, la seule chose qui intéresse monsieur Paul Biya c’est sa longévité au pouvoir. C’est le seul sujet qui le préoccupe. C’est le seul objet pour lequel il peut se sentir concerné ou bien menacé. Et même si ça fait déjà trente-six ans que ce spectacle se perpétue, personne ne peut plus douter sur le vicieux talent de ce monsieur qui vient d’être « réélu » président du Cameroun.

Et personne n’en doutera en 2025 lorsqu’il s’agira une énième fois de se re-maintenir au pouvoir…

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