Présidentiel du 7 octobre 2018 : décryptage des forces en présence
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A l’orée de la campagne officielle de l’élection présidentielle du sept octobre 2018, il nous semble pertinent de procéder à un décryptage des forces en présence. La tentative est d’autant plus intéressante que la propagande du régime a beau jeu d’alimenter la confusion pour une fois de plus égarer et démotiver l’électeur. Partout sur les plateaux, s’activent troubles fête à la solde, politiciens sous le masque de l’université ou du journalisme, vrais faux candidats ; sous fond de procès en incapacité d’organisation de l’opposition. Il faut presque se pincer pour ne pas rire lorsque des zélateurs du pouvoir reprochent un manque d’idéologie aux candidats concurrents ; brandissant alors le « libéralisme communautaire » jamais implémenté comme l’unique horizon de la nation portée vers la « terre promise » par son guide spirituel BIYA !

Des frontières idéologiques plus ou moins assumées :

Les candidats Jean Maurice KAMTO et AKERE MUNA se classent aisément dans un centre droit laissé vide par une union nationale pour la démocratie et le progrès otage des aventures alimentaires de ses cadres ; tandis que l’union démocratique du Cameroun d’Adamou NDAM NJOYA se contente volontiers de son réduit « mfoumbanais ». Alors que de leur bouche, toute diatribe radicale contre le régime sone presque faux, leur inconscient libère de temps à autre des marqueurs idéologiques clairs : monsieur KAMTO affirmant sur un plateau de la » grande interview » sur Canal 2 soutenir l’article 322 du code pénal pénalisant les difficultés de paiement des loyers au prétexte que les propriétaires endettés doivent pouvoir espérer satisfaire leurs créanciers, monsieur AKERE MUNA s’empressant d’exempter le président BIYA de poursuites judiciaires sans que rien ne lui ait été demandé. Hommes de l’établissement (pas une tare dans un pays où toute relation professionnelle avec un président radio actif semble devenue une infamie), l’un et l’autre rêvent de nouer une alliance de gouvernement entre les franges les plus réformistes de l’appareil et les contre élites périphériques pour poursuivre le chantier national. Si cette quête demeure bredouille, il est certain que ce positionnement gêne aux entournures la propagandes des affidés du candidat sortant. D’où un déplacement du centre de gravité du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC) vers des rhétoriques dignes des extrêmes droites les plus nauséabondes.

« La nation est agressée de l’extérieur ; les ennemis de l’intérieur menacent la stabilité du pays ; Paul BIYA est le meilleur risque ; la jeunesse a trahi BIYA ; le roi est bon ce sont ses conseillers qui sont mauvais », entre nationalisme farfelu, xénophobie et tribalisme refoulés, partout sur les plateaux, adversaires politiques, diplomates et réfractaires du pouvoir perpétuel en prennent pour leur grade. C’est dans ce chaos d’invectives et d’insinuations malveillantes que le candidat JOSHUA OSIH parvient à imposer des thèmes socio démocrates qui on le mérite d’éclipser ne serait-ce que ponctuellement trop ponctuellement à notre goût, les querelles de personnes. Le coût du travail au Cameroun avec une proposition de salaire minimum à 160000 FCFA, la mutualisation de la prise en charge du risque maladie avec une proposition de couverture à hauteur de 500000 FCFA en contrepartie d’une contribution forfaitaire, la réforme des mécanismes de sélection et de formation des élites camerounaises en suggérant la suppression de l’école nationale d’administration et de la magistrature véritable moule à prébendiers à la solde des régimes corrompus ; le débat sur la forme de l’Etat en optant pour un fédéralisme à 10 Etats. Autant d’engagements mis en relief par le traditionnel discours enflammé du front social démocratique (SDF). La percée médiatique du candidat JOSHUA OSIH se heurte néanmoins à un déficit de lieutenants capables d’expliquer et relayer le contenu technique d’un programme tourné en dérision à tort pour son aspect démagogique.

De l’efficacité du vote :

Par sollicitude pour l’opposition ou par ruse, de partout fusent des appels à la coalition ou à la candidature unique de l’opposition. De toute évidence, dans un scrutin à un tour tel que voulu par le sortant BIYA, il n’y a point de choix du cœur dans l’espoir de revenir à la raison dans un second temps. Pour autant la candidature unique de l’opposition est une chimère au sens où le pouvoir use et usera toujours de corruption pour susciter ici ou là un ou plusieurs vrais faux opposants disposés à troubler la scène. Il n’en demeure pas moins que des réalités institutionnelles devraient guider l’électeur vers le vote le plus utile et ramener bien des candidats à la raison sous peine de passer pour des farceurs ou des alliés objectifs du régime. Si l’élection présidentielle n’a qu’un tour, de fait un second tour s’imposera car il faudra bien obtenir une majorité parlementaire pour gouverner.

A l’exception du RDPC, seul le SDF jouit d’une infrastructure parlementaire capable de constituer une coalition de gouvernement lors de la législative que tout éventuel gagnant de l’opposition devrait s’empresser de convoquer après dissolution du parlement dès sa prestation de serment. Même pour gouverner par ordonnance il lui faudra une loi d’habilitation que la majorité parlementaire RDPC ne sera pas obligée à adopter. On en déduit aisément que toute dynamique collégiale de l’opposition qui n’aurait pas pour maître d’œuvre le SDF est peu sérieuse ; sauf à imaginer un candidat de l’opposition devenu président de la république gouvernant avec une majorité parlementaire d’emprunt. Une cohabitation peu souhaitable au regard de notre esprit public sujet à caution. Sauf à se perdre dans les multiples conjectures dont nos débats politiques ont le secret, le candidat OSIH est bien le vote utile vers lequel l’électeur rationnel devrait s’orienter pour éviter une déperdition des voix favorables au candidat sortant. Une telle augure est peu probable. Non seulement le bulletin du « bataillon d’intervention rapide » est bien celui qui surdétermine l’élection au Cameroun comme dans bien des pays d’Afrique dirigés par des groupuscules militaires cachés sous le masque de civils. Au surplus si les textes stipulent un suffrage universels, la réalité perpétue un suffrage censitaire à l’occasion duquel des feudataires instrumentalisent des masses misérables et incultes.

Tout cela donne une large part d’artifice à l’élection camerounaise tant ce n’est pas à cette occasion que l’administration témoignera d’une neutralité qu’on ne lui connait point. Pour autant, se priver de son droit de vote, c’est jouer les idiots utiles du régime BIYA.
Bonne élection à tous les camerounais dans la paix et le civisme !

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