Revenu s’installer au pays depuis quelques années, l’ingénieur et enseignant qui a longtemps travaillé pour la firme Volkswagen pense qu’il revient aux Camerounais de l’étranger de mettre sur pied un mécanisme de financement de leurs investissements au pays.

Le Forum de la diaspora qui s’est achevé le 30 juin dernier recommande la création d’un secrétariat d’etat en charge de la diaspora. Quelle serait la plusvalue d’un tel organe, alors qu’il existe depuis 2005, une division en charge des Camerounais de l’étranger au ministère des Relations extérieures ?

Pour ma part je ne pense pas que les problèmes de la diaspora vont se résoudre avec de nouvelles structures. Il faudrait plutôt trouver des contenus pour les contenants déjà existants

De l’étranger où vous avez longtemps vécu, avez-vous senti plus de considération pour les Camerounais de l’étranger avec la création de cette division?

Non, on ne ressent pas son implication pour la cause de la diaspora.

Avant le Fodias qui répond au besoin de mettre sur pied une plateforme de promotion et de valorisation de la diaspora, il y a eu d’autres cadres comme draw a vision of Cameroon (davoc) initié par les Camerounais de l’étranger eux-mêmes. et pourtant, la diaspora ne semble pas toujours bien comprise au pays. Pourquoi cette situation ?

Il faut d’abord se poser la question de savoir si la diaspora elle même comprend le pays. Je pense que non. Car, contrairement à ce que l’on pense, il ne suffit pas d’aller au pays une fois par an, de critiquer tous les manquements pour comprendre le pays. Les gens au pays ont de vrais défis. Il existe des incompréhensions de tous les côtés.

Après plusieurs années passées en Allemagne, vous avez décidé de renouer avec le pays en y investissant. Qu’est-ce qui vous a décidé à revenir ?

Je voulais aussi contribuer au développement de mon pays, participer à un transfert de connaissances. C’est d’ailleurs pourquoi en ma qualité de président de la Cameroon Diaspora Network Germany, j’ai œuvré pour la création d’une nouvelle filière de formation en mécatronique automobile à l’IUT de Bandjoun. Aujourd’hui après seulement deux ans, il y a près de 180 jeunes Camerounais qui étudient dans un environnement académique très proche de ce qui se fait en Allemagne.

Quelles activités menez-vous exactement au Cameroun, votre pays ?

Je suis promoteur d’une concession Automobile (Volkswagen) et distributeur des huiles Liqui Moly et des Produits Bosch au Cameroun.

Les tracasseries administratives et la corruption sont souvent à la base du recul de plusieurs Camerounais qui vivent à l’étranger. Comment avez vous réussi à surmonter ces pesanteurs ?

Je n’ai pas encore réussi. Je surmonte les différentes adversités et j’espère tirer mon épingle du jeu. Je pense que la persévérance est la qualité qu’il faut avoir avant d’investir au Cameroun.

En tant qu’ancien président des Camerounais d’Allemagne, vous êtes certainement au fait des plaintes de vos compatriotes. Certains évoquent la double nationalité ou la mise sur pied d’un fonds spécialement dédié à la diaspora. en quoi de telles mesures, si elles sont prises rendront la diaspora plus dynamique ?

Bien sûr que ces mesures peuvent aider la Diaspora à investir au Cameroun. Même si à mon avis, elles ne sont pas l’élixir. Je pense que plus que la double nationalité qu’on retrouve sur toutes les langues, la réduction ou même l’annulation des frais de visa, peut mieux dynamiser le tourisme et le commerce intérieur. On pourrait d’ailleurs avec cette décision remettre Camair- Co à flot. Vous vous imaginez bien qu’il n’est pas facile pour une famille de quatre enfants de débourser près de 500 000 F CFA seulement pour les frais de visa. De même, la mise sur pied au sein de l’API (Agence de Promotion des Investissements) d’un programme destiné au Camerounais de la diaspora avec les mêmes avantages aujourd’hui donnés aux grandes entreprises (en termes de douanes et impôts) serait d’un apport considérable. C’est-à-dire qu’au lieu de favoriser seulement ceux-là qui vont investir en milliards, on pourrait baisser cette barre à 10 millions de F CFA par exemple pour les Camerounais de la diaspora aux idées nouvelles et non concurrentes à celles des locaux (pour éviter une concurrence déloyale). Cette limite serait accessible à plusieurs membres de la diaspora porteurs de projets très innovants avec un fort potentiel d’emplois. Je suis contre un fonds dédié à la diaspora car je pense que les locaux ne peuvent pas financer la diaspora à travers des fonds. Ça ne serait pas un bon signal si la diaspora devait se positionner pour avoir les financements publics. Par contre, la diaspora peut elle même cotiser et mettre sur pied des fonds pour soutenir ses investissements au pays.

En comparaison aux citoyens des pays voisins que vous côtoyez à l’étranger, ressentez-vous les mêmes plaintes que celles que formulent les Camerounais ?

Disons que les Camerounais de la diaspora sont très attachés à leurs pays, le Cameroun. Toutefois les différentes adversités font que le plus souvent, les Camerounais se retrouvent pour analyser la situation. Ce qui donne lieu à des débats très passionnants et pleins d’émotions. Les autres vont chez eux plus facilement, le billet d’avion n’est pas très cher, les visas sont inexistants, etc.