Corps infirmier Le parent pauvre de la médecine au Cameroun
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Corps infirmier Le parent pauvre de la médecine au Cameroun :: CAMEROON

Comment travailler dans un cadre où pleuvent des complaintes déplacées des patients, les remarques quelques fois désobligeantes des médecins chef ? C’est le lot du quotidien de plusieurs infirmiers. Qui célèbrent la journée à eux dédiée ce 12 mai 2015.

Il faut attendre le médecin chef.

8h30min. Les patients sont sortis bien tôt, ce lundi 11 mai 2015, pour se diriger au Centre médical d’arrondissement de la Cité Sic à Douala. Une poignée de malades est dans l’espace aménagé pour l’attente. A l’intérieur de la bâtisse, le couloir qui conduit aux différentes salles est occupé par les enfants et les femmes. Parmi  elles, les femmes en gestation, celles qui ont accouché la veille. Dans une salle, trois dames échangent sur les derniers accouchements enregistrés. «Le bébé de madame Penamo a combien de kilogrammes ? A-t-elle eu des déchirures ?» Réponse : «Non, elle n’a pas eu de déchirure. L’enfant pèse trois Kilos. C’est plutôt l’autre patiente qui a eu des déchirures, malgré nos efforts. Son enfant est né avec 4 kilos». Ces femmes sont infirmières. Chaque matin, elles sont les premières à se pointer à l’hôpital. Ici, après avoir jeté un coup d’œil sur les malades hospitalisés, elles s’occupent des nouveaux cas, en attendant l’arrivée du médecin chef. Malheureusement, «il faudra attendre le médecin chef pour avoir l’aval de nous interroger, martèle une infirmière. C’est le patron de la maison. Il devrait déjà être là. Certainement qu’il a eu un impératif.» Après plus d’une heure de patience infructueuse, nous mettons le cap sur une autre structure hospitalière.

L’infirmier n’est pas toujours considéré à sa juste valeur.

Centre médico-social de la Cité-Sic. Il dépend de l’Archidiocèse de Douala. Il n’est que 10h, mais déjà, le dispensaire a fait le plein. Deux infirmières installées dans la salle d’attente appellent les patients par numéro. Après la prise de température et du poids, elles conduisent les malades chez les médecins. «Femmes enceintes, en salle», vocifère une infirmière. Avec le vacarme que produisent les pleurs des enfants, il faut crier pour se faire entendre. Les cinq infirmiers qui travaillent dans le centre vont et viennent. C’est la surprise ici quand on annonce la célébration de la journée internationale de l’infirmière, le 12 mai courant.  Aucune activité n’est prévue de ce côté. Néanmoins, on profite de l’occasion pour faire quelques dénonciations. Sous anonymat, parce que n’ayant pas reçu l’ordre de la hiérarchie, un infirmier souligne : «L’infirmier n’est pas toujours considéré à sa juste valeur. Les patients ne les prennent pas toujours au sérieux.

Ils se comportent comme ci nous n’avons pas été formés. Tout ce qui les intéresse, c’est rencontrer le docteur.» Le fossé qu’il y a au niveau de la grille salariale est tout aussi frustrant. «Les salaires dans les cliniques ne respectent pas toujours les indications du code du travail. Le salaire de base n’est pas respecté, et les primes d’ancienneté par exemple n’existent pas. Pourtant les infirmiers ont été formés. Nous sommes des diplômés d’Etat. Ici au moins nous n’avons pas ces problèmes parce que le dispensaire dépend de l’Archidiocèse de Douala», indique la source. Qui trouve tout de même que les difficultés ne remplacent pas «la satisfaction qu’on ressent quand on a soigné un malade. La joie est indescriptible. Ça n’a pas de prix.»

«Des soins efficaces et rentables»

Ces réalités créent chez l’infirmier un complexe d’infériorité. «Les infirmiers se sentent souvent faibles, impuissants, à tord. Le médecin est là pour le diagnostic, la prescription des médicaments. L’infirmier est l’assistant du médecin, il ne doit pas croire qu’il est le porteur de sac du docteur. Ils travaillent en collaboration. Quand le médecin a fini sa ronde, c’est l’infirmier qui reste près du malade.» Concrètement, le médecin n’est rien sans l’infirmier. Et vice-versa. A l’hôpital Laquintinie, la première observation que fait un autre infirmier sous cape, c’est celle de «la gestion du corps infirmier au ministère». Il désapprouve le fait qu’ «au ministère, ce sont des enseignants qui s’occupent des problèmes des infirmiers.

A Laquintinie c’est pareil. Le chef du personnel est un professeur d’histoire-géographie. La conséquence c’est la lenteur dans le service, parce que l’enseignant n’est pas dans son élément. Le système Lmd a pourtant fait en sorte que l’infirmier à la fin de sa formation peut déjà occuper ce poste.» Le complexe entre médecins et infirmiers se vit également dans cette formation hospitalière. Non sans oublier l’épineuse question des salaires de catéchistes, le non versement des primes à l’origine généralement des grèves du personnel.
 
Cette description de la situation de l’infirmier «n’est pas le propre du Cameroun», nuance un observateur. Raison de plus pour décrier le problème. Encore qu’au Cameroun, ce n’est pas le premier venu qui est infirmier. Il faut être titulaire d’un Baccalauréat D, réussir au concours d’entrée à l’école des infirmiers et suivre une formation de trois ans. Pour cette nouvelle édition de la journée, le Conseil international des infirmières a choisi comme thème : «Les infirmières, une force pour le changement : des soins efficaces et rentables».

© Camer.be : Valgadine TONGA

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