RD CONGO : Quand Kabila infantilise la jeunesse congolaise
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RD CONGO : Quand Kabila infantilise la jeunesse congolaise :: CONGO DEMOCRATIC

Décidément, depuis que la mobilisation citoyenne a eu raison du régime de Blaise Compaoré, qui a régné sans partage sur le Burkina pendant 27 ans et qui avait, de ce fait, donné l’impression qu’il était indéboulouable, les dictateurs d’Afrique ont perdu le sommeil, conscients, même s’ils le dissimulent, qu’ils peuvent eux aussi être délogés de leurs palais, de la même manière. Et la preuve que ce sentiment est fondé vient d’être apportée par le pouvoir de Joseph Kabila. En effet, l’arrestation le dimanche 15 mars 2015 dernier de responsables de la société civile venus du Sénégal et du Burkina à l’invitation de leurs collègues congolais pour prendre part à une conférence dont le thème porte sur l’alternance, illustre à souhait le désarroi des autorités congolaises vis-à-vis du rôle qu’entend désormais jouer la société civile pour la promotion de la démocratie. L’on peut même parler d’hystérie, au regard des raisons évoquées par Kinshasa pour justifier son acte. A en croire le porte- parole du gouvernement, le ministre Lambert Mendé Omalanga, passé maître dans l’art de défendre sans état d’âme son mentor, Joseph Kabila, les jeunes Sénégalais et burkinabè interpellés et gardés à vue, sont clandestinement rentrés au Congo pour transmettre des méthodes d’insurrection aux jeunes congolais, en les initiant notamment aux techniques de fabrication de cocktails Molotov.

Les dictateurs se refusent à voir la vérité en face

Le ministre a poursuivi en se référant certainement à la transition burkinabè en ces termes: « Nous n’avons pas l’intention de voir notre Palais du peuple incendié ». Voici qui est clair. Les acteurs de la transition burkinabè sont prévenus. Ils doivent considérer qu’ils auront à faire face à deux fronts. A l’étranger, ils essuyeront les attaques de la coalition des dictateurs, qui n’a pas intérêt à ce qu’ils réussissent, de peur de faire des émules chez eux.
 
A l’intérieur du pays, des peaux de bananes seront jetées chaque jour que Dieu fait sur leur chemin, pour qu’ils échouent à l’effet d’accréditer la thèse selon laquelle en dehors de Blaise Compaoré, personne ne peut diriger le Burkina. Et les deux fronts pourront prendre langue pour parvenir à leur fin. Cela dit et pour revenir aux graves accusations brandies par Kinshasa pour mettre au frais les responsables de la société civile du Sénégal et du Burkina, l’on peut dire que s’il y a deux qualificatifs que les dictateurs ont en commun, c’est leur inspiration en matière d’affabulation et leur obstination à vouloir cacher le soleil avec les doigts de leur main. En effet, le gouvernement congolais semble avoir mis en application l’adage selon lequel « qui veut tuer son chien l’accuse de rage ». Aucune preuve n’a été apportée par le gouvernement pour étayer ce qu’il reproche aux militants de la société civile interpellés. Et dans l’hypothèse où il aurait apporté des preuves, tout le monde sait ce qu’elles valent sous nos tropiques. Elles sont fabriquées le plus souvent par les princes qui nous gouvernent à l’effet de protéger leur trône. L’autre qualificatif que l’on peut attribuer aux dictateurs est lié au fait qu’ils se refusent à voir la vérité en face. De ce fait, ils sont convaincus, jusqu’à ce que le ciel leur tombe sur la tête, que ce qui arrive aux autres dictateurs ne peut jamais leur arriver. Joseph Kabila est dans cette logique. Et le fait de soutenir que les responsables de y’ en a marre et du Balai Citoyen sont venus dans son pays pour inoculer le virus de l’insurrection aux jeunes Congolais, participe de cet état d’esprit. Le président congolais oublie que l’Afrique est en train d’aller vers une sorte de mise en place d’une interafricaine de la société civile. Et cette internationale est notamment portée par les jeunes, les artistes et les femmes. La jeunesse congolaise vit sur la même planète que les jeunes des pays qui sont à l’avant- garde du combat pour la démocratie. Croire que les jeunes de chez lui sont de grands enfants incapables par eux-mêmes de se joindre à cet élan, n’est ni plus ni moins qu’une manière de les infantiliser et d’insulter leur intelligence.
Et si Kabila s’entête à s’accrocher au pouvoir, comme l’on peut le constater aujourd’hui, cette même jeunesse qu’il infantilise, pourrait lui apporter la preuve qu’elle a grandi, à l’instar des jeunes de y’en a marre et du Balai citoyen. La preuve, ils manifestent depuis hier, 17 mars 2015, pour exiger la libération des activistes de la société civile arrêtés.

Les démocrates sincères doivent accompagner l’interafricaine de la société civile

En réalité, le comportement de Joseph Kabila n’est pas isolé. Tous ses collègues de l’Afrique centrale ont en partage ce comportement. Tous sont des prédateurs de la démocratie, des bras pourris de l’alternance. Et ces bras ne craignent pas d’être amputés par leurs oppositions politiques qui, toutes ou presque, ont perdu tout crédit auprès des populations. Par contre, ces bras pourris savent que ces nouveaux soldats téméraires de la démocratie que sont les militants de la société civile peuvent les couper, même sans anesthésie. De ce point de vue, les militants de y’en a marre et du Balai citoyen, qui ont promis de déposer très prochainement leurs valises au Burundi, doivent se préparer à y subir le même traitement que celui qui leur a été réservé par le pouvoir de Kabila. Car le président de ce pays est aussi une icône de la galaxie anti-démocratie.

Franchement, tous les démocrates sincères doivent accompagner cette interafricaine dans sa croisade contre l’arbitraire et la confiscation du pouvoir par nos têtes couronnées. C’est pourquoi, l’on peut saluer l’initiative du gouvernement de la transition de voir libérer le militant du Balai citoyen, embastillé à Kinshasa. Sous Blaise Compaoré, cela n’aurait pas été une préoccupation. L’on peut aussi saluer l’engagement des Etats-Unis à soutenir ce combat juste et noble des sociétés civiles africaines.

A contrario, l’on peut regretter le silence de certains pays comme la France qui, jusqu’au moment où nous tracions ces lignes, n’avaient pas encore demandé officiellement l’élargissement des activistes de la société civile détenus à Kinshasa. Mais le plus grand blâme est à adresser à l’Union africaine (UA. Cette dernière devrait être la première à exiger leur libération, surtout que les agissements de ces jeunes sont en phase avec la charte africaine de la démocratie. Mais de la part de cette institution, qui est en réalité un syndicat de chefs d’Etat, les peuples africains ne doivent rien attendre dans leur lutte au quotidien pour plus de liberté.

© Source : Le Pays

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