Révélations : Titus Edzoa, « Je n’ai jamais été le médecin du président de la République »
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Dans un documentaire diffusé  dimanche 1er mars 2015 sur Equinoxe télévision, l’ex baron du pouvoir parle sans réserve de sa vie  à la fois glorieuse et tumultueuse.

Rien ou presque n’est plus secret sur la vie de Titus Edzoa. L’homme vient de faire l’objet d’un documentaire. Réalisé par Jean Materne Ndi, ce film de 90 minutes décrit la trajectoire d’un fils d’employer des chemins de fer devenu l’une des personnalités les plus influentes du pays. Même si à sa naissance le 4 janvier 1945 à Bonabéri, personne ne peut lui prédire un avenir aussi radieux, son caractère (très agité) va cependant pousser ses parents à le mettre précocement sur le chemin de la construction de son avenir.

« J’étais encore très petit, mais on me trouvait déjà très turbulent et qu’en restant à la maison, je pouvais causer beaucoup de dégâts. C’est ainsi que je fus envoyé à l’école comme auditeur libre à l’école publique de New-Bell Bassa», relate Titus Edzoa. Lorsqu’il a finalement l’âge d’aller à l’école, il est inscrit au cours préparatoire à l’école Catholique St Jean Bosco de Bonadibong. Seulement, il ne cesse de surprendre. Grâce à ses performances scolaires, sur conseil du directeur de cette école, il passe immédiatement au cours élémentaire deuxième année.  La suite du cursus primaire est normale jusqu’à l’obtention du certificat d’étude primaire et élémentaire (Cepe) et du concours d’entrée en 6ème en 1957.

Au secondaire, la première difficulté est celle du choix à opérer pour l’avenir. Entre poursuivre au collège et entrer au petit séminaire, il penche finalement pour la seconde option, notamment au petit séminaire de Bonepoupa près d’Edea où il étudie jusqu’en classe de 3ème. «Ma grande sœur m’a beaucoup influencé d’aller au petit séminaire parce que là-bas prétendait elle, on formait des savants», se souvient-il. Son second cycle secondaire, Titus Edzoa le fait au collège Liberman à Douala jusqu’à l’obtention d’un Baccalauréat français en philosophique en 1964.

Habité par une folle envie de devenir chirurgien, Titus Edzoa a failli passer à côté de ce rêve. Puisque à défaut de bénéficier d’une bourse de l’Etat pour la poursuite de ses études à l’étranger après l’obtention du baccalauréat, il s’inscrit à la Faculté de Sciences économique et de Droit à l’Université de Yaoundé ouverte un an plus tôt.

La manne tombe du ciel

Le séjour de Titus Edzoa à l’Université de Yaoundé ne sera pas plus long que deux semaines. Car entre temps, comme une manne tombée du ciel, il est bénéficiaire d’une bourse étrangère. Son rêve va peu à peu s’accomplir. «  Un jour, au mois d’octobre, je reçois une lettre d’Europe, je me rends compte qu’elle était estampillée en Italie et envoyée par mon ancien professeur du petit séminaire de Bonepoupa et de Liberman l’abbe Celestin Nkou qui deviendra plus tard Evêque. Je l’ouvre et constate que c’était une proposition de bourse pour faire médecine à Milan », confie-t-il dans le documentaire. Après les modalités de son expatriation, il s’envole finalement pour l’Italie en Janvier 1965. Parallèlement à ses études, il pratique ses violons d’Ingres : le football et la musique.

Respectivement en 1970 et 1975 il obtient son doctorat en médecine générale, puis son diplôme de spécialiste en chirurgie générale. Son rêve est réalisé.

Une nouvelle étape

Employé en Italie dès la fin de sa formation, il abandonne tout le privilège qu’il a dans ce pays pour retourner au Cameroun, son pays d’origine. L’obsolescence du plateau technique lui vaut un temps d’adaptation. Dans ses débuts au Cameroun, il exerce notamment à Ebolowa et à Ayos. Jusque-là, entre Paul Biya et lui, aucun contact n’est tissé ni envisagé. Le déclic part de l’opération d’une patiente lorsqu’il officie à l’hôpital central de Yaoundé il s’avère que c est une parente du premier ministre d’alors, Paul Biya qui demande à rencontrer ce chirurgien.

« Je n’ai jamais été le médecin du président de la République »

Les rapports qui se raffermissent entre Paul Biya devenu en 1982 président la République et Titus Edzoa, laissent répandre une rumeur. Celle-ci présente le second comme le médecin du premier. Dans le documentaire diffusé ce 1er mars 2015 sur Equinoxe Tv, il balaie cette rumeur d’un revers de la main. «Je n’ai jamais été le médecin du président de la République », réfute-t-il, même s’il ne nie pas l’avoir souvent soigne. Malgré cette proximité, Titus refuse de se considérer comme un ami de Paul Biya. « Dire que c’était mon ami, c’est un peu exagéré. C’est quelqu’un avec qui j’échangeais sur tous les plans, sauf en politique », éclaire-t-il. En même temps, il officie aussi dans les coulisses comme conseiller du président de la République, avant d’être nommé plus tard ministre chargé de mission à la présidence et bien d’autres hautes fonctions dans le sérail.

La rupture

Tout semble bien se passer entre les deux jusqu’au 30 avril 1997. Ce jour en effet, un coup de tonnerre s’abat sur le ciel de Yaoundé. Celui que l’on présentait comme l’homme de main du président claque la porte du gouvernement à l’approche de l’élection présidentielle. Dans la foulée, il annonce sa candidature à cette élection. Et les raisons de ce revirement inattendu ? « Mes convictions n’étaient plus les mêmes avec celles du système créé par le président Biya […]; la politique n’est pas une affaire de passion, mais de raison », philosophe Titus Edzoa.

A partir de cet instant, sa vie tourne au cauchemar. Le 3 juillet 1997, il dit avoir été enlevé dans la mesure où, son arrestation ne « respectait aucune procédure légale ». Déclaré coupable dans plusieurs affaires, il est d’abord condamné à 15 ans de prison en 1998, ensuite à 20 ans en 2012. Après 17 ans dans les cellules du Sed, il est libéré à la faveur d’une grâce présidentielle en février 2014. Mais, il ne tarde pas à faire parler de lui à travers une lettre adressée au président de la République.  Durant cette longue période de  privation de sa liberté, Titus Edzoa rédige un ouvrage intitulé « Méditations de prison » qu’il conseille d’ailleurs à tous de lire.

Libre depuis plus an déjà, Titus Edzoa confesse que cette étape de sa vie n’a pas été que négative. Même s’il ne souhaite pas aux autres la prison, il souligne qu’un passage dans ce lieu carcéral, pourrait leur permettre de comprendre les choses autrement et d’avoir (comme lui), une autre vision de la vie.

Aux jeunes, il professe l’amour du travail comme seul gage de réussite. Il s’oppose en effet à une certaine opinion qui tente à prouver que l’appartenance aux loges dont il fait partie, est la condition sine qua none pour espérer une ascension sociale. 

© La Nouvelle Expression : Vivien Tonfack

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