Une presse et des journalistes sous très haute surveillance
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L'affaire Eric Golf Kouatchou, journaliste et Correspondant à Paris de Canal 2 International, arrêté le 2 avril 2020, puis libéré onze jours plus tard, met en émoi nos compatriotes exilés.

« J’ai été interpellé le 02 avril 2020 à Douala au Cameroun dans le cadre d’une affaire de délation, de dénonciation calomnieuse et de diffamation à mon préjudice pour des faits qui se sont déroulés en France. À l’issue de onze jours de garde à vue, la vérité a triomphé sur l’arbitraire, le commérage et le mensonge. Le formidable élan de solidarité qui a dépassé les frontières du Cameroun et de la France, alors que j’étais pris dans les mailles de la Police Judiciaire, m’a profondément ému. J’ai été libéré, blanchi de tous soupçons ».

Le communiqué de presse, le 17 avril, d’Eric Golf Kouatchou, Correspondant à Paris de Canal 2 international, n'a pas dissipé l'indignation des Camerounais de la diaspora. « Nous avons lu à travers les réseaux sociaux que notre confrère, Eric Golf Kouatchou, aurait facilité l'accès de Calibri Calibro au Salon de l'Agriculture à Paris, qu'il aurait donné son badge professionnel à l'activiste qui avait interpelé le président Emmanuel Macron, le 22 février 2020. Pour nous, cette information invraisemblable relevait du procès en sorcellerie », confie Hermann G'nowa, Rédacteur en chef de Camer-sport, Belgique. Il ajoute : « Cette affaire nous rappelle une époque peu glorieuse de l'histoire de notre pays, où l'exercice de la profession de journaliste était très risqué au Cameroun ».

« Procès Kafkaïen »

Ancien rédacteur en Chef de la Crtv Sud, Cyrille Kemmegne, journaliste camerounais en exil à Paris est encore dépité. « L'interpellation au Cameroun, le 02 avril 2020, du confrère Éric Golf Kouatchou, correspondant à Paris de Canal 2 International, m'a laissé un arrière-goût de désolation et d'amertume. Cet événement malheureux est symptomatique et emblématique de la dictature qui a pris le Cameroun en otage. Figurez-vous qu'un Journaliste travaillant à l'étranger se retrouve dans son pays où il est supposé respirer un air des retrouvailles est humilié à ce point après avoir passé deux semaines de confinement », remarque-t-il avant de poursuivre : « Là où le bât blesse, c'est qu'il est gardé à vue sans avoir été notifié le moins du monde. Et au bout de onze jours, du fait des pressions nationales, mais surtout internationales, il est remis en liberté sans autre forme de procès ». Une affaire qui relance le débat autour de la liberté de la presse au pays de Pius Njawé. « Moralité, au Cameroun, la presse est loin d'être libre et, pour y exercer « en toute quiétude », il faut déshonorer les canons du « plus beau métier du monde » pour être à la solde de la dictature qui feint de ne pas savoir que le développement d'un pays est inhérent aux différents tons qui rythment le quotidien de la presse. Ce procès a été tout simplement "kafkaïen ".

Et le journaliste Noël Ndong, pense que « la justice a bien fonctionné. Mais on aurait pu éviter tout cela si on avait tenu compte des vidéos et caméras au Salon de l'Agriculture et interrogé les services de sécurité de la presse présidentielles et des accréditations des grands événements officiels ». La Maison des Camerounais de France Centre Franco/Camerounais (Mcf/Cfc), tout en se félicitant du dénouement voit dans cette affaire, « l'occasion d'amorcer, avec l'ensemble des organisations et associations qui le souhaitent, une réflexion de la diaspora sur une contribution décisive au développement du Cameroun notamment sur la question de l'Etat de droit ».

« Recul de la démocratie »

Reste que pour Chef Aby Donfack, journaliste à Africain.info, un site hébergé à Lyon, en France, « C'est une fois de plus la preuve du recul de la liberté de presse et de la démocratie au Cameroun. Ils sont très nombreux des journalistes poursuivis ou incarcérés làbas : Lewis Medjo, Paul Tchouta, Amadou Vamoulke, Christophe Bobiokono, Irène Mbezele, Odette Melingui...

On a accusé Eric Golf, d’avoir donné son badge à l’activiste Calibri-Calibro, au Salon de l'Agriculture, pour avoir une position privilégiée afin d’interpeller le Président Macron, sur la situation des droits de l’homme au Cameroun». Il insiste: « C’est fou! Je connais bien Eric ici à Paris, il n’est pas de ce bord-là, on lui a volé 11 jours pour rien. J’étais en reportage au Salon de l’Agriculture ce jour-là et à ce moment-là. Je n’ai pas remarqué que l’activiste arborait un badge presse, encore qu’il ne fallait pas nécessairement en avoir un pour être à ce lieu public. En France, le passage du Président n’impose pas autant de restrictions de circulation des personnes ordinaires, comme ça se passe là-bas en Afrique ».

Le quotidien français, Le Monde, du 18 mars 2012, publie un article d'Albert Camus, qui aurait dû paraître le 25 novembre 1939 mais interdit par la censure. «Un journal indépendant donne l’origine de ses informations, aide le public à les évaluer, répudie le bourrage de crâne, supprime les invectives, pallie par des commentaires l’uniformisation des informations et, en bref, sert la vérité dans la mesure humaine de ses forces. Cette mesure, si relative qu’elle soit, lui permet du moins de refuser ce qu’aucune force au monde ne pourrait lui faire accepter: servir le mensonge».

Cet extrait cité par Eric Golf Kouatchou, dans son communiqué de presse, est d'une actualité déconcertante.

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