Quand une jeunesse affamée finance un pouvoir absent : le symbole d’un pays à bout de souffle
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Au Cameroun, la scène aurait pu faire rire si elle n’était pas tragique. Un panier, deux jeunes femmes, quarante millions de francs CFA en espèces, remis avec cérémonie au secrétaire général de la présidence. Officiellement, cette somme représente la participation de la jeunesse camerounaise à la candidature du président Paul Biya pour l’élection présidentielle de 2025. Dans un pays où l’accès à l’eau potable, à l’emploi et aux soins de santé est un luxe, cette mise en scène confine à l’indécence.

Dans les quartiers populaires, les jeunes fuient le pays au péril de leur vie, dorment dans des studios sans courant, meurent faute de soins. Pourtant, devant les caméras, une poignée d’individus affirment représenter cette majorité invisible, pour remettre une cagnotte à un président absent, administré à distance, muré dans un silence devenu normalité. La scène aurait pu relever du théâtre de boulevard, mais elle cristallise un système à bout de souffle, incapable de proposer une vision d’avenir et qui s’accroche à des symboles vides.

Cette stratégie, aussi grossière soit-elle, est rodée. Elle consiste à utiliser l’image de la jeunesse pour légitimer un pouvoir vieilli, à détourner l’attention par le spectacle au lieu d’engager le dialogue. Derrière le sourire figé des officiels, la réalité est brutale : c’est l’argent du peuple qui circule dans l’ombre, recyclé dans une mise en scène censée émouvoir, mais qui indigne jusqu’aux plus jeunes. La jeunesse camerounaise, dans sa grande majorité, n’était pas au palais. Elle était dans les salles de classe sans bancs, dans les rues sans avenir, dans les hôpitaux sans matelas. Elle n’a pas donné cet argent. Elle ne soutient pas cette illusion.

À travers ce simulacre, c’est une fois de plus l’avenir du Cameroun qui est monnayé. Une jeunesse affamée, utilisée comme levier de propagande, devient le vecteur involontaire de sa propre dépossession. Mais quelque chose a changé. L’indignation se répand. La parole se libère. Les réseaux sociaux s’enflamment. Ce n’est plus l’heure du silence, c’est celle du refus.

En octobre, cette jeunesse ne portera pas un panier. Elle portera un choix. Et ce choix pourrait bien faire tomber plus qu’un rideau de théâtre : il pourrait ouvrir un nouveau chapitre.

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