Les deux pays partagent une frontière longue de 1094 kilomètres. 90% des importations du pays d’Idriss Deby transitent par Douala.

Le communiqué de la présidence de la République du Tchad publié mercredi dernier, résume avec éloquence l’interdépendance entre ce pays  et le Cameroun. « Face à cette situation (agissements des Boko Haram Ndlr) qui menace dangereusement la sécurité et la stabilité du Tchad et porte atteinte à ses intérêts vitaux, le gouvernement tchadien ne saurait rester les bras croisés ». Un détail : chaque matin, dès 5h30, des centaines de motos quittent Kousseri avec des bayam-sellam pour ravitailler Ndjamena en banane et autres vivres, un peu comme les vendeuses de Mokolo ou du marché Mfoundi qui affluent le matin. Il faut les voir sur le pont Ngueli qui sépare les deux pays.

Le Tchad importe du Cameroun le ciment hydraulique, les savons, les pates alimentaires, de la bière, les eaux minérales naturelles ou artificielles, les eaux gazéifiées, les bonbonnes, bouteilles et autres récipients en verre, boîtes, sacs et autres emballages en papier, carton ou ouate de cellulose. Le Cameroun importe du Tchad des arachides, des animaux vivants de l’espèce bovine, des tourteaux et autres résidus solides extraits de graisses ou huiles végétales, des graines et fruits oléagineux, des vêtements (pour femme surtout), des parfums, etc.

Ces échanges commerciaux ont augmenté de 83% entre les deux pays depuis 2005. Dans la zone Cfa, le Cameroun est le premier partenaire économique du Tchad. Mais dans la zone Cemac, la coopération entre les deux pays est exemplaire. En fait, l’économie tchadienne, et pas conséquent « ses intérêts vitaux » dépendent du Cameroun. 90% de ses importations passent par le port de Douala. Des camions parcourent les 1800 km qui séparent Douala et Ndjamena en cinq ou huit jours. L’activité du transport qui nourrit des milliers de familles au Cameroun, notamment dans le septentrion a trouvé son essor avec le transport des marchandises tchadiennes.

Bien plus, le pétrole, la principale source de revenu du Tchad, est exporté sur le marché international grâce au pipeline qui traverse le Cameroun. Cette conduite souterraine relie les champs pétrolifères de Doba dans le sud du Tchad à la station balnéaire de Kribi, au Cameroun, soit une bande de terre de 1 070 km de long. Au-delà de l’économie, il y a la composition sociologique des populations qui lie les deux pays. Il s’agit pour l’essentiel des mêmes peuples. Il n’est pas rare de trouver des familles installées de part et d’autre de la frontière. C’est ainsi qu’au sein de certaines familles, le grand frère est chef traditionnel au Cameroun et le petit frère occupe le même poste au Tchad.

Les peuples du sud du Tchad tels que les Moundang, les Mousseï existent dans les deux pays tout comme les peuples sahéliens, les Kotoko, les arabes Choas, et les peuls.  Sur un autre aspect, l’essentiel des journalistes tchadiens y compris l’actuel ministre de la Communication ont été formés au Cameroun. Pour ce qui est de la santé, les évacuations sanitaires se font pour l’essentiel vers le Cameroun. Difficile de ne pas trouver dans la partie Nord du Cameroun un village où il n’y a pas un Tchadien. Des familles se sont installées souvent par vague au gré de l’instabilité de leur pays jusqu’au début des années 90. Et ces peuples vivent harmonieusement avec les Camerounais.

Depuis peu, de nombreux Camerounais se sont installés au Tchad et vivent en toute quiétude. Par ailleurs, le Tchad et le Cameroun partagent également les eaux du Logone, un fleuve qui draine une partie du grand bassin endoréique du lac Tchad. Il est formé de la Vina (entièrement camerounaise) et de la M'Béré (frontière entre le Cameroun et la Centrafrique, puis le Tchad). Il se jette dans le Chari en rive gauche à Ndjamena. C’est donc ces deux pays liés par l’histoire qui veulent désormais s’unir pour combattre un ennemi commun : le terrorisme. Place aux actions. Le temps presse.